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06/05/2011

CHRONIQUE CD : Stefano di Battista / Woman’s land

 

     Stefano di Battista / Woman’s land


Stefano di Battista (ss & as, comp), Jonathan Kreisberg (g), Julian Oliver Mazzariello (p), Francesco Puglisi (b),Jeff Ballard (dm)

Enregistré en Janvier 2011

Label: Pierre-Olivier Toublanc  Distribution : Discograph


 cover di battista woman's land.jpg

 

Rendre hommage aux femmes à travers certains portraits de quelques-unes réelles ou mythiques, tel est le projet concocté par le saxophoniste romain à la  sonorité voluptueuse, au phrasé sensuel, aux harmonies chaleureuses, aux mélodies ensorcelantes, au beau chant (bel canto)… Comme aucune femme ne ressemble à aucune autre, on trouve dans ces vignettes des climats différents correspondants à leurs personnalités ou à leur époque (délicieusement rétro avec Coco Chanel, be-bop avec Ella Fitzgerald bien sûr, introspectif avec Molly Bloom la Pénélope du roman Ulysse de James Joyce, envoûtant le tribut à Joséphine Baker, empreint d’un lyrisme profond à l’égard de la grande actrice inoubliable sa compatriote Anna Magnani, rythmé pour la première femme cosmonaute Valentina Tereskova, langoureux avec ce poème, Woman’s Land  au territoire des femmes, à la gent féminine en général, aux mères, sœurs, épouses ou compagnes, anonymes ou célèbres, authentiques ou fantasmées…à LA femme. Un disque qui reflète parfaitement l’univers de ce musicien qui exprime son italianité grâce à son instrument qu’il soit soprano ou alto et aussi son souffle, ses doigts son cœur.

 

Jacques Chesnel

 

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02/05/2011

ESTAFETTE

 

Il fallait quelqu’un pour porter rapidement la dépêche, le commandant avait dit c’est urgent, très urgent, je compte sur vous, ça devait vraiment être si urgent et important car au lieu de me tutoyer et de me regarder avec son mépris habituel il m’avait vouvoyé avec un certain sourire inhabituel. J’ai donc enfourché ma moto amochée mais encore vaillante et je suis parti aussitôt sur mon destrier pétaradant alors qu’au loin sifflaient les obus de plus belle si on peut dire ça comme ça.

J’avais reçu deux lettres cette semaine, une de mes parents, de Maman qui insistait une fois de plus pour que je fasse très attention car elle avait eu des nouvelles de copains à moi qui étaient morts durant le dernier assaut, fais attention mon Jérôme on attend ton retour on aura besoin de toi à la ferme, avec en plus un mot de Papa qui me rappelait que son père à lui avait été ordonnance d’un général lors de la première guerre, la dernière disait-il, qu’il fallait que je sois fier et courageux ; une de Monique, ma promise, avec des traces de rouge à lèvres partout sur la feuille devenue presque illisible mais je pouvais lire qu’elle m’aimait que c’était dur d’attendre si longtemps la prochaine permission, j’avais mis sa lettre sur mon cœur et je la relisais tous les soirs avant de trouver le sommeil. J’avais entendu dire que la fin de cette guerre, la nouvelle dernière, était proche à cause de toutes ces batailles qu’on avait gagnées et que l’ennemi, le dernier, allait bientôt capituler, enfin, et pourtant ça continuait de siffler bon dieu ça se rapprochait et moi, dans ma précipitation, qui avait oublié mon casque. Avant de partir en trombe Lucas et Émile, mes deux meilleurs copains de chambrée m’avaient dit en rigolant oh ! est-ce ta fête aujourd’hui l’estafette ?, on est le trente septembre mon vieux, j’avais souris, ce sera notre fête à tous bientôt vous verrez dis-je en enfourchant la bécane, je suis le héraut qui va porter les bonnes nouvelles à l’état-major à l’arrière de ces putains de tranchées, bordel et vrouououm.

Le lendemain, les copains apprirent par le lieutenant que Jérôme parti en trombe avait été retrouvé à quelques centaines de mètres lors du dernier bombardement, avec deux éclats d’obus dans sa tête sans casque. On le décora d’une médaille à titre posthume : «Soldat de première classe d’origine antillaise Jérôme Midon, estafette en mission, mort au champ d’honneur ce 30 septembre 1918 ».

 

© Jacques Chesnel

15:37 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

23/04/2011

SON EX

 

Elle lui dit qu’elle avait revu son ex

Il considéra cela comme un exploit

Elle trouva son propos excessif

Il répondit qu’il ne fallait pas exagérer

Elle allait lui faire un exposé

Il imagina cela comme une extravagance

Elle ne l’avait pas dit expressément

Il proposa une exhortation

Elle refusa cette exhibition

Il avoua ne pas être expert

Elle poussa une exclamation

Il mit cela en exergue

Elle considéra cela comme un exutoire

Il en fit un lien externe

Elle envisagea un expédient

Il en fut tout excité

Elle crut passer un examen

Il réclama l’exclusivité

Elle suggéra de tout exhumer

Il devina l’exécrable

Elle se dit excédé

Il allait lui pourrir l’existence

Elle voulait aller à l’extrême

Il fut d’un coup exsangue

Elle contempla du visage son expression

Il retint son expiration

Elle craignait l’expulsion

Il retarda l’explosion

Elle sourit puis exulta

Il fut certain de l’exploit

Elle attendit l’explication

Il se vit exproprié

Elle mijota une expiation

Il refusa l’extrapolation

Elle trouvait cela exténuant

Il était comme dans l’extase

Elle mima l’exubérance

Il s’en trouvait exempt

Elle commit une exégèse

Il était au bord de l’explosion

Elle remarqua son expressivité

Il voulait être plus expéditif

Elle suggéra alors une expérimentation

Il refusa l’explétif

Elle ne proposait pas l’exonération

Il subodorait l’exode,  voire l’exil

Elle nimbait cela d’un halo d’expurgation

Il pensa sottement à un excrément

Elle lui réclama des excuses

Il affirma que ce n’était pas explicable

alors

Elle lui confirma illico son expulsion et son exécution

Il était maintenant certain d’être devenu ainsi le deuxième ex.

 

© Jacques Chesnel

 

 

01:27 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

13/04/2011

Chronique CD

 

         STÉPHAN OLIVA

“FILM NOIR” & “AFTER NOIR”

PIANO SOLOS                           (PIANO GONE) PORTRAITS

(Illusionsmusic 313005)                  (sans bruit sbr013)

 

Avant-propos.

 C’est au cours des années 50 que le terme « film noir » est employé pour la première fois, dans la revue Les Cahiers du Cinéma ; il s’agit de dénommer le cinéma américain de cette décennie considérée comme son « âge d’or », le nouveau roman policier noir (notamment celui de Dashiell Hammet) en étant l’origine.

A ce sujet, lire les ouvrages suivants :

. Le Film Noir Américain de François Guérif (Denoël,1999)

. Le Film Noir : l’âge d’or du cinéma criminel américain d’Alfred

  Hitchcock à Nicolas Ray de Patrick Brion(La Martinière, 2004)

. Le Film Noir, 1940/1955 de Nicolas Gotteri (Fol’fer, 2010)

 

Stéphan Oliva, pianiste à l’univers poétique singulier et cinéphile averti a trouvé en la personne de  Philippe Ghielmetti (producteur avec Stéphane Oskéritzian et Gérard de Haro), un partenaire complice (cf. le précédent opus sur le même label, Ghosts of Bernard Herrmann (2007). Pour ce nouveau projet  plutôt ambitieux sur un genre et une conception toute hollywoodienne  en se réappropriant les musiques et leurs thématiques, en explorant les rapports entre cinéma et musique, la décision fut prise en cinq minutes ; ce qui, vu le nombre de films (dont certains « cultes ») et de réalisateurs importants, allait entraîner un choix résolu et donc, in fine,  pas mal de sacrifices : pourquoi tel film plutôt que tel autre ?.

 

RECTO FILM NOIR.jpg

 Film Noir : Dix films en Noir et Blanc sont donnés à entendre plutôt qu’à voir grâce aux 88 touches en Blanc et Noir du piano de Stéphan Oliva à travers (médiation) ses arrangements et improvisations. Deux autres sont en couleur : The Long Goodbye, Le Privé, Robert Altman (1972) et Der Amerikanische Freund, L’Ami américain de Wim Wenders (1974) ; une Suite consacrée à Akira Kurosawa se compose de L’Ange Ivre (1948), Les Salauds dorment en paix (1960), Entre le Ciel et l’Enfer (1963).

Conception onirique toute personnelle en forme de rétro et intro/spection des certains classiques ou chefs d’œuvre dits incontournables (et pourtant tournés) du genre, plutôt une évocation faite de réflexions et de réflectivité sur la dramaturgie, les personnages, l’atmosphère : jazzy dans la convergence des notes façons MJQ dans Odds Against Tomorrow ( Le Coup de l’Escalier) de Robert Wise, musique de John Lewis ; lugubre avec l’insistance ces notes graves insinuantes dans The Asphalt Jungle de John Huston, musique de Miklos Rosza ; espaces de silence inquiétants entre la résonnance des notes dans Touch of Evil (La Soif du Mal) d’Orson Welles, musique de henry Mancini ; esquisses, évocations et prolégomènes de la mélodie des thèmes de John Williams (The Long Goodbye de Robert Altman) et de Miklos Rosza (Double Indemnity de Billy Wilder et déambulation/divagation, procédure erratique dans Sunset Boulevard du même réalisateur avec/sur la musique de Franz Waxman.

 

 AFTER NOIR.jpgAfter Noir : Portraits : A part The Blue Gardenia (La Femme au Gardénia, Fritz Lang, 1953) dans lequel chante Nat « King » Cole, les compositions et improvisations du pianiste sont consacrées aux acteurs et actrices, vedettes célèbres de cette époque.

Robert Ryan (1909–1973), dont le portrait grimaçant, en couleurs, illustre la pochette, est cité trois fois pour les films On Dangerous Ground (La Maison dans l’Ombre de Nicolas Ray, 1949), une autre version de Odds Against Tomorrow  et Crossfire (Feux croisés de Edward Dmytryk, 1947), portraits d’une noirceur reflétant à chaque fois le personnage inquiétant. Deux actrices, l’une objet d’un culte qui perdure, Gene Tierney (1920-1991), inoubliable dans Laura et l’autre moins célèbre mais toute aussi éblouissante, Piper Laurie (1932) sont l’objet de deux courtes plages débordantes de sensualité et de charme troublant. La « suite »(24 :04) intitulée After Dark est composée en évoquant les silhouettes  de Humphrey Bogart, Nat King Cole, Sterling Hayden, Lizabeth Scott, Gloria Grahame et Robert Mitchum dans les films qui ont marqué leurs carrières respectives et enthousiasmé les cinéphiles.

Symbiose réussie entre ces moments/monuments de l’histoire du cinéma et la musique inspirée, réinventée, revivifiée et interprétée par un artiste qui a su resté lui-même en apportant ainsi son tribut personnel à ce qu’on nomme avec raison le 7ième Art.

Film Noir : le CD se trouve dans quelques FNAC parisiennes et sur  HYPERLINK "http://www.illusionsmusic.fr" www.illusionsmusic.fr

After Noir : en téléchargement sur  HYPERLINK "http://www.sansbruit.fr" www.sansbruit.fr

 

Jacques Chesnel

 

 

       

 

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08/04/2011

MICMAC AU SALOON



Lorsque les deux state-cowboys, Viktor Boyau et Jude Olive, pénétrèrent dans le Sorryboard saloon de Sioux City ce soir-là, un silence immédiat et total dura exactement sept secondes, comptez avec moi …………….puis le brou-ha-ha-ha reprit de plus belle ; les deux lascars avaient obtenus ce qu’ils voulaient : faire une entrée remarquée sans les habituelles bagarres qui s’ensuivent généralement en ce lieu. Irma-la-Mousse, la barmaid sino-américaine et boiteuse, leur demanda sèchement  bous bière ?, ils répondirent non nous scotch et nous bien tassés. Leur aspect volumineux, du type rembourré, ne se remarquait pas trop et pourtant les vêtements des deux gaillards craquaient de partout à cause des billets de la banque écossaise Lechmann Brothers qu’ils venaient de dévaliser il y avait deux heures dans la petite ville voisine. La nouvelle n’était pas encore parvenue jusqu’ici en ce jour de fête de la Saint-Pancrace, à cette heure tardive. Irma-la-Mousse déposa les verres sur le comptoir et dit bous payer tout de suite deux dollars, s’il bous plaît… et une pluie de billets s’échappa des poches d’Olive puis de celles de Viktor devant les yeux écarquillés de l’assistance ; on n’avait jamais vu autant d’argent d’un seul coup, le brou-ha-ha et ha-ha cessa hormis quelques déglutis slurp ou hoquets gloup difficilement réprimés.
Les plus intéressées d’un seul coup furent les dames de bonne compagnie putassières qui s’agglutinèrent autour de nos héros d’un soir en caquetant à qui mieux mieux avec effets d’œillades, de tortillements du croupion et les seins copieusement en avant… on se serait cru dans un ouest-pas-trop-terne genre John Ford avec des gars comme John Wayne et le génial Victor McLagen… sauf qu’il n’y avait pas encore de caméras de tournage ni de surveillance.
C’est le moment que choisit Les McCann (même patronyme que le pianiste de jazz soul) pour entrer discrètement dans l’établissement à sa manière de père placide, le shérif surnommé « Laisse-ma-canne-tranquille » par la population, on n’y vit que du feu sauf les deux compères qui avaient des yeux tout partout. Il venait comme tous les jours à la même heure pour l’attraction, le numéro pour lui époustouflant de Hosnia Moutaraka et son numéro de danse du ventre venu tout droit de son Egypte soit-disant natale ce qui restait à prouver, mais dont il était secrètement et fiévreusement   amoureux.  Quand ils virent la fameuse étoile dorée sur le gilet du bonhomme, la sueur commença à se propager partout sur leurs corps, accompagnée d’un léger tremblement qu’ils essayaient en vain de contrôler, de dissimuler ; le shérif passa à côté sans sourciller, regardant les dames et surtout Hosnia comme d’habitude avec une certaine avidité. Viktor et Olive ayant réglés leurs consommations, ne trouvèrent qu’une seule solution : dégager vite fait bien fait tandis que le shérif au milieu de la basse-cour en ébullition les dévisagea subitement avec curiosité, intensité puis insistance en s’approchant d’eux pas trop fiers d’un coup.
 -  Euh, dites-moi, les gars, d’où qu’c’est-y qu’vous v’nez, j’ai comme  qui dirait l’impression qu’on s’connaît, non ? qu’on s’est d’jà vu quèque part, non ?, ou alors que vos bobines me font penser à quéqun que j’ai bien connu, non ?
Les deux gars sont pétrifiés et sentent quelque chose de chaud dégouliner sur leurs mollets, leurs vessies en perte de contrôle, ils n’en mènent pas large en serrant leurs fesses sans plus de résultat. S’adressant d’abord à Viktor yeux dans les yeux, Less lui demanda si à Hinton il connaissait une certaine Marjorie, oui c’est ma Moman lui répondit l’interrogé, à Olive si à Waterburg il avait des relations avec une certaine Meryl, euh voui fit le gars, ben c’est ma mère… et Less tomba subitement à genoux en hurlant devant l’assistance médusée : mes petits, mes chers petits retrouvés, mes garçons à moi… tous pleurant à chaudes et abondantes larmes.

Voilà le conte de fées que racontait vers la fin de sa vie, Abigail, l’une des danseuses du Sorryboard saloon qui avait assisté à cette réunion inattendue, inespérée entre le shérif et les deux enfants qu’il avait eu avec leurs deux mères différentes abandonnées enceintes quand il avait été nommé shérif pendant trente ans dans un autre état lointain et qu’il n’avait jamais revues ou jamais voulu les revoir, aventures sans lendemain de soirs de bringues. Une fois revenu à Sioux City, il avait eu d’autres préoccupations qu’il jugeait bien plus graves. La morale veut qu’avec ses enfants retrouvés, ils se partagèrent le magot, disparurent rapidement de la ville et qu’on n’entendit plus jamais parler d’eux.

C’est la morale de l’histoire, si on peut dire, que contait Abigail à ses deux petits-enfants dont elle disait n’avoir jamais connu leur grand-père… Less, encore lui ?

©  Jacques Chesnel

21:06 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

02/04/2011

UN HOMME DES TAS

 

Ça l’avait pris tout petit et ça n’avait pas changé bien qu’il fut resté tout petit. Son premier tas fut de sable, un beau tas érigé en château-fort avec pont-levis, donjon et tours, le tout détruit par de grosses vagues ce qui provoqua son premier trépignement grave suivi de sa première grève sur le tas. Plus grand (enfin plus âgé) il participa à de nombreux jeux de guéguerre et n’était pas le dernier à tirer dans le tas ou à tabasser, ce qui ne lui rapporta pas un tas d’amis. Il eut cependant un bon copain, Torticolis, connu dans une autre histoire, mais le genre de tas que faisait ce compagnon ne lui convenait pas, de trop petits tas pour lui qui voyait déjà loin, très loin, trop loin. Ado, les filles et le sport furent ses occupations favorites : faire un tabac avec les donzelles en profitant des lumières tamisées avec tact, ne pas les laisser faire tapisseries, ne pas se montrer taciturne, au foot tacler ses adversaires, les mettre au tapis, ne pas rendre son tablier trop vite, taper dans le tas sans faire trop de tam-tam mais avec du cœur à la tâche. Aux affaires publiques : changer de tactique avec talent, ne pas faire tarabiscoté pas plus que tatillon, y aller à tâtons mais talocher fort, ne pas dévoiler trop tôt son talon d’Achille, avec cependant une obsession : boire la tasse. Plus tard, quand il arriva près de la sortie, qu’il se retourna sur son passé et qu’il vit le tableau, il se demanda s’il avait été à la hauteur de son talent et se fit la réflexion suivante : ce n’était pas la peine d’avoir mis des talonnettes, d’avoir taillé tant de costards, insulté tant de tarés sur leurs tarins, tablé sur tant de  sujets plus ou moins aboutis tacitement, d’en avoir laissé sur le tarmac et en avoir fait des tartines ou bien s’être montré si taquin tardivement à ce tarif-là, sans aucun tabou et maintenant tout ça pour tas...

Il finissait par se demander s’il avait été un vrai homme  des tas.

 

©  Jacques Chesnel

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28/03/2011

FIN DE PARTI (E)

Quand on lui tendit le micro, ce n’est pas sa main qui trembla mais le micro, du moins c’est ce qu’il prétendit après sa brève allocution. Il avait dû beaucoup ramé, faire beaucoup de circonvolutions pour admettre à la fin qu’il avait un peu perdu, un peu seulement. Ses amis, du moins ce qu’il lui en restait, se contentèrent de ricaner comme d’habitude, on ne se refait pas, on ne le refait pas. L’après-midi, il n’était pas allé au bureau, préférant rester en famille à regarder les chaînes du câble à la télé, faire un peu de piano sur son vieux Yamaha au son pourri pour se changer les idées car les nouvelles n’étaient pas très bonnes, il faudrait trouver des arguments et surtout ne pas faire grise mine, conserver cet air mi-hautain mi-méprisant qui était plus ou moins volontairement son image de marque. Il joua quelques standards de jazz, toujours les mêmes qui plaisaient aux vieilles dames qui le soutenaient avec leurs regards énamourés ce qui lui plaisait et le rassurait mais fit quelques fausses notes qu’il essaya de noyer dans ses improvisations habituelles. A cinq heures, il alla se changer et revêtit un costume sombre sur une chemise bleue clair et une cravate bleue foncé. Se baissant pour lacer ses chaussures en croco, il ressentit un léger vertige ce qui l’inquiéta quelques secondes après, cela faisait longtemps que cela ne lui était pas arrivé, comme un léger trouble dans ses certitudes ?. Il allait falloir coûte que coûte faire contre mauvaise fortune bonne apparence mais cette fois ce serait plus difficile. Quand l’auto vint le chercher pour le bureau, il ne salua pas son chauffeur et se trompa de porte pour entrer dans le véhicule, il prit la gauche et vit comme un présage, un mauvais présage. Son arrivée fut saluée par les vrais amis, du moins par ce qu’il lui en restait constata-t’il en regardant ses mains et ses dix doigts et pensa d’un coup aux rats qui quittent le navire, déjà ?. Il accentua son sourire dans un sens moins carnassier et fit la bise à sa secrétaire qui ne tendit pas l’autre joue. Un regard vers les journalistes dont il perçut l’air narquois et se rendit dans précipitamment dans son bureau dont il ferma la porte plutôt brutalement. Assis, il respira un bon coup et assura la dizaine de personnes que tout irait bien. Il savait comment réagir à ce genre de situation et le patron le savait aussi lui faisant totalement ou presque confiance, bien que depuis quelque temps le temps justement n’était pas ou plus au beau fixe sur le tactique, car c’était bien de tactique dont il s’agissait, à adopter. Faire le dos rond n’était pas son genre, mordre il savait faire mais là pas question, cela sonnerait comme un aveu visible. Ah ! l’ironie, railler l’adversaire, voilà, non, pas cette fois, astuce au retournement trop prévisible, parler d’abord d’autre chose, voilà voilà, commencer par parler d’autre chose, les sujets ne manquant pas, oui bon mais après revenir au sujet du jour où la France entière l’attendait et boirait ses paroles que certains trouveraient imbuvables et d’autres, quelques autres ?, circonstanciées, voilà voilà : circonstanciées, le mot adéquat. Pas besoin de notes, tout devenait de plus en plus clair, il esquissa un sourire de circonstance (bien entendu) qui rassura ce qui lui restait d’amis du moins pour l’instant car il savait qu’un jour cela pourrait, devrait, changer sinon il lui faudrait écoper l’eau de la barque après le naufrage. Il se leva, passa un coup de peigne dans les quelques cheveux sur son front dégarni ce qui lui donnait cet air de crâneur qui lui allait si bien, rajusta sa cravate, but une gorgée d’eau, c’est à vous dans trois minutes, les caméras sont prêtes, quand faut y aller.

Il se racla la gorge, fit un clin d’œil à sa secrétaire qui ne lui rendit pas, et sortit sous le feu des projecteurs.

Il commença son allocution avec un large sourire, mesdames, messieurs, chers amis, les choses étant ce qu’elles sont, je voulais vous dire que…

Il sortit sous de rares applaudissements et quelques ricanements puis se fit communiquer les derniers chiffres ; ce n’était pas bon, mais alors bon pas du tout.

 

© Jacques Chesnel

13:16 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

26/03/2011

HISTOIRE TROP COURTE

Lorsqu’elle claqua la porte, il alla claquer tout son fric.

Lorsqu’elle découvrit le pot-aux-roses, il était à découvert.

Lorsqu’elle tomba dans la déprime, il s’affala sur son sofa.

Lorsqu’elle se mit à grossir, il ne fit pas le poids.

Lorsqu’elle refit surface, il avait déjà plongé.

Lorsqu’elle s’adjugea un amant, il perdit sa copine.

Lorsqu‘elle prit son pied, il avait pris les devants.

Lorsqu’elle eut son accident d’auto, il ne fut pas cabossé.

Lorsqu’elle rendit l’âme, il avait déjà perdu l’esprit.

Lorsqu’elle grimpa au ciel, il monta sur ses grands chevaux.

 

Moralité : Lorsqu’on ne peut pas faire plus long, on arrête là.

 

© Jacques Chesnel

 

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18/03/2011

THÉO DORT

 

Théodore dort donc ; profondément, sans rêve, du moins le croyons-nous car il n’est pas agité, lui qui souvent bouge au lit. Théodore a diné, sobrement comme tous les soirs et s’est couché de bonne heure comme tous les soirs aussi, c’est-à-dire vers vingt-deux heures vingt-deux ; il a lu pendant quinze minutes le même passage du même livre qu’il connait par cœur et qu’il déteste : c’est son somnifère personnel et secret. Théodore dort enfin du sommeil qu’on dit du juste. Justement, il faut savoir que Théodore est célibataire contre son gré, théologien quoique non croyant mais s’intéressant théoriquement à la théosophie, c’est pourquoi il se fatigue très vite et se couche tôt afin de dormir sans songeries ou autres cauchemars. Pour notre endormi, la théosophie est-elle bien l’art d’enculer les mouches ou autres petites bébêtes à défaut de se farcir le démon qui court après lui, nourri de mauvaises intentions et comptant bien parvenir à ses fins inavouables et inavouées mais néanmoins vouées aux gémonies suivant les théorèmes que Théodore qui dort échafaude hors de son sommeil ?, telle est la question qu’actuellement il ne se pose pas mais que par contre on peut (se, vous) poser. Théodore dort donc, la bouche ouverte ou bien grinçant des dents, sa respiration est calme, il déglutit quelques fois et se réveille toujours entre trois heures et trois quinze pour un petit pipi et un grand verre d’eau de Vittel vite avalé et rapidement se rendort Théodore d’un sommeil toujours aussi profond. Si parfois, quelque songe l’effleure, il n’en laisse rien paraître ou ne veut en tirer nulle conclusion, ce n’est pas dans ses habitudes et dieu sait s’il en a dont il voudrait bien se défaire : il pète au lit, oui, il pète au lit consciemment ou non, avec non seulement quelque soulagement intestinal mais aussi une sorte de volupté familière se délectant des odeurs qui le culpabilise mais comment se retenir la question est vite évacuée à la vitesse des gaz évaporés avec un sorte de plaisir coupable en plus de la fuite bienfaisante. Donc Théodore dort et pète au lit, c’est entendu, suffisamment aussi pour comprendre et supporter cette solitude, les expériences d’un voisinage féminin ou masculin s’étant soldées par des échecs répétés en raison de ses bruits et odeurs non supportés par ces personnes du sexe opposé ou identique malgré leurs compréhensions, et même parfois leur compassion.

Théodore dort et pète, pète et dort, c’est tout Théodore.

 Quand Théodore ne dort pas il pète quand même des pets diurnes différents des pets nocturnes le mettant dans une certaine pétaudière auprès des personnes qu’il fréquente de moins en moins à son grand regret, notamment quelques individus plutôt prétentiards et pète-sec, ce qui le rend encore plus péteux ou en pétard devant leurs regards pétillants et/ou désapprobateurs. Dans certaines occasions il aimerait alors filer ailleurs comme un pet sur une toile cirée, lâcher une belle mouette, cracher une vraie perlouse du tonnerre, pousser  un grand vent venteux de ventilateur performant pour se faire oublier ; impossible, mieux vaut rester impassible dans ces moments-là et se retenir, refouler les expulsions, retarder les émissions, freiner les exhalaisons, envisager par contre, hélas,  ces prémonitoires gargouillements parfois audibles et remarqués car remarquables (comme dit l’autre dauphin du monarque) par leur intensité et leur répétition…

Alors, me direz-vous, si Théodore dort donc encore, n’allons surtout pas le réveiller… paf !, il vient de péter, comme d’habitude… on ne changera pas un dormeur si particulier ; si particulier, dites-vous ?... vous n’avez pas de gaz, vous ?, ni de gargouillis ?... et bien voilà, moi je pète et répète que je pète, comme Théodore qui dort encore… chut.

 

                   ©  Jacques Chesnel

 

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08/03/2011

L’AS DE LA RAMASSE

 

  On l’appelait l’as de la ramasse et quand on lui demandait pourquoi, il répondait que son cou penché provenait de l’époque où il était portefaix (mot qu’il préférait à débardeur, ce vocable désignant pour lui le maillot de corps échancré qu’il portait par tous les temps) à cause d’avoir porté trop de ces putains de kilos de colis ce qui m’a fait du tort. Depuis toujours, il ne connaissait plus ou ne voulait plus connaître son prénom si bien qu’il répondait à hé salut Rémy par un doigt d’honneur qui lui faisait pencher le cou de l’autre côté avec difficulté sans l’ombre d’un sourire ; quant à Martin, son patronyme, il disait préférer la bière plutôt que le cognac du même nom.

A l’heure de la retraite, Torticolis se mit à ramasser tout ce qu’il trouvait par peur de manquer en raison du faible revenu accordé après quarante ans de bons et si peu déloyaux services récompensés par une médaille de la ville comme trophée remis par le maire en drôle de personne avec vin mousseux réchauffé et le discours blabla vous pouvez être fier, mon cher Rémy Martin du devoir accompli pour notre communauté et blablabla, ce qui lui faisait une belle jambe disait-il avec la preuve de son sourire, putain il sait pourtant qu’on me nomme Torticolis maintenant, Tor-ti-co-lis, enfin M’sieur l’Maire depuis l’temps. Donc, d’abord sur les quais, il commença à ramasser et stocker dans son modeste deux pièces tout ce qu’il trouvait principalement d’utile puis peu à peu d’inutile et ce fut du rassemblement, de l‘accumulation, de l’amoncellement, de l’empilement, de l’entassement, de l’accroissement, de la superposition allant jusqu’à l’agglomérat et l’engorgement, métaux fréquemment utilisés puis métaux rares, singuliers ou rares… puis au cours de ses longues promenades tout ce qu’il pouvait dégoter, chiner, ensuite ce fut le tour des vidoirs, dépotoirs, vide-ordures, poubelles collectives ou individuelles ; les voisins, les gens, étonnés, moqueurs, railleurs ou rieurs, commencèrent à lui donner ce dont ils voulaient se débarrasser sachant que ce n’était pas pour en faire commerce mais pour satisfaire à ses besoins ou à une lubie de vieux solitaire. Torticolis s’entendit affubler d’un sur nom supplémentaire Ramasse-miettes, père Ramassis, Trouve-par-terre et autres appellations qu’il prenait avec un sourire sans ombre. Il ne recevait personne depuis longtemps, tous ses collègues ou copains étaient ou disparus ou morts la plupart à cause de l’alcoolisme alors que lui à part une petite bière de temps en temps…

Ramasse.jpg

 Il avait refusé l’aide sociale, je peux me débrouiller tout seul, les assistantes avaient été éconduites après avoir essayé de le raisonner, mais Monsieur Martin nous pouvons vous aider, on est pour ça, je n’ai besoin de rien et puis d’abord je m’appelle Torticolis, Tor-ti-co-lis, insistait-il, les dames pouffaient. Les jeunes gens de son quartier, ceux qu’on désigne péjorativement comme « les jeunes » le prirent en affection et lui attribuèrent la distinction suprême de « l’As de la Ramasse », l’invitèrent à leurs réjouissances qui consistaient à se retrouver dans une cave pour discuter toute la nuit en fumant des joints, ce qui l’enchanta. On le vit alors déambuler dans tous les coins de la ville à la recherche de nouveaux jeunes compagnons qui lui offrirent bandanas, blousons, pantalons et santiags, il devenait méconnaissable aux yeux des habitants, reconnaissable à sa seule déformation physique, son problème de cervicales. Il commençait à traîner un peu la jambe, à se mouvoir avec difficulté et à se baisser pour la collecte,  confondant souvent un tel avec un autre, tel objet avec un autre, bref, Torticolis entrait dans le troisième âge et sortait de moins en moins souvent. Bientôt, on ne le vit plus du tout jusqu’au jour où les voisins alertés par l’odeur émanant de son appartement appelèrent la police qui eût du mal à pénétrer à cause d’un capharnaüm indescriptible du sol au plafond, un bordel monstre.

Au milieu de tous ces objets, outils et ustensiles innombrables, ces bouts de tout et de rien, Torticolis, l’As de la Ramasse s’était ramassé tout seul. On trouva dans sa main la médaille de la ville mais on ne voyait  plus l’ombre de son sourire.

 

©  Jacques Chesnel     illustration : © Buz     

 

19:06 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

20/02/2011

JE SUIS UN SALE CON

 

Voilà ce que je viens de lire sur un mur devant moi en passant dans cette rue où j’étais seul, ce graffito (un graffito, des graffiti) qui donc m’accuse moi puisqu’en le regardant et le lisant je suis un sale con, tout comme vous qui lisant cette phrase vous êtes un sale con, sauf le respect, que je vous dois de la part du sale con que je lis que je suis. Mes quelques amis vous diront que ce n’est pas vrai, que néanmoins bien des fois je me suis conduit comme un con plutôt sale, mes ennemis, plus nombreux, vous diront le contraire bien que de rares fois en certaines circonstances je n’étais pas pour eux le même sale con que d’habitude.  Et puis d’abord, pourquoi sale alors que je m’efforce tous les jours, comme vous je pense, de me laver de fond en comble, de la tête aux pieds en insistant sur les endroits qui sentent, avec bain le dimanche ; et pourquoi ne dit-on jamais propre con, ne graffito-t-on jamais je suis un « propre » con ? ;  ensuite posons-nous des questions sur le vocable con lui-même, sexe de la femme si bien chanté par Georges Brassens et Pierre Perret qui semblaient en connaître un rayon, un rayon de con, ainsi que sur le terme injurieux associé parfois à brave, invincible ou vaillant et jamais à peureux, foireux ou dégonflé, ça t’aurait une de ces gueules (de con), va toi hardi con ou couard con, non ? ; et aussi jeune con, vieux con, pourquoi pas marmot con ou antique con, non ?… et puis tous ces mots commençant par con de concassage à convulsivement en passant par confesse (donner fessée à un con) et condamné (con à se damner), conjoint (con sur con) et condiment (le goût du con) ; que dire de ces cons qui vont en bande, bande de cons (bander pour un con !) et pas cohorte, compagnie, meute, sarabande ou Sarah bande (de cons) ?...

En lisant cette phrase qui m’interpellait si curieusement, je descendis du trottoir par inadvertance, ce qui me valut de la part d’une automobiliste un retentissant connard avec un majeur dressé virilement par la vitre de son tacot, se faire traiter de connard par une connasse fut pour moi comme une consolation bien que je ne sentisse pas concerné, encore heureux qu’elle n’ait pas ajouté sale, mais non on ne dit pas sale connard, enfin pas à moi, je vous le confirme et vous adresse toutes mes considérations… bande de non-cons, néo-cons ou cons tout court, simples conjectures…

 

©  Jacques Chesnel

02:05 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

05/02/2011

DES FEMMES ET DES VIEUX (à propos d’un film)

 

-    Ça faisait longtemps qu’on n’était pas allés au cinéma, ou on avait pas

 l’temps ou pas le cœur à ça ou pas l’pognon pasque les prix maintenant

-       Et vous avez vu quoi ?

-       Maurice, oh !, tu t’rappelles du titre… y doit être encore à la cave pour la mise en bouteille du cid’… mais c’était une drôle d’histoire que j’ai pas tout compris, on dirait qu’maintenant moins tu comprends plus c’est mieux, et pis ces retours en arrière pour qu’on perde un peu plus la boussole…attendez euh, des hommes… et merde… Maurice !

-       Ça a eu un certain succès à c’qu’on lit et dit par la bouche à oreille couac tous les critiques y s’empoignent toujours pour un oui pour un non et pour rien des fois

-       Aah ! ça m’revient… des histoires de curés qui sont des moines et qu’ils veulent pas partir de leur nonastère et alors ils chantent tout le temps des cantiques en latin du grégoirien… j’ai lu de ces trucs avec des mots, catarsisse, acmé, doxa, subcécament que j’ai cru un gros mot, allégorique, spiritualité, mysticisse, humansisse, fulgurances plastiques, vous vous rendez compte, transcendance que j’vois pas c’que la danse et la transe viennent faire là-dedans, tout ça qu’ils se balancent pour se rendre intéressants à qui dira un mot plus haut que l’autre qui renchérit aussi sec et ça n’en finit plus… de toutes façons, yen a plus que pour les séries américaines, pour les jeunes, les nanars pour les mordus-tordus de la gâchette ou pour les intellos qui se gaussent… Maurice dit que lui veut du simple, du commode, et du cul du cul du cul tout plein, comme sur TF1, p’tête bien de la sociale de temps en temps et encore, bon, mais Yvette qu’est un peu bigote sur les bords du bénitier voulait absolument qu’on voit son film là et ben non a vu et on n’est pas revenus et non a regretté Dany Boum et voilà et pis zut

-       Mais Ginette, il faut bien s’élever un peu et pas rester au ras de pâquerettes, on a tous besoin d’autre chose qui nous interroge, nous interpelle, nous…

-       Avec nos problèmes du pain quotidien de tous les jours, on veut de quoi s’échapper, donc se marrer, se tordre, se gondoler, à pisser de rire dans ce qui reste de nos culottes et pas se faire chier, pardonnez-moi, chère amie, on veut plus se faire chier, j’sais bien qu’c’est escatologique comme ils disent les gros  mais pour nous les petits de la France d’en bas c’est le bon mot que voilà j’épelle c. h. i. é .r., un point c’est tout… alors Maurice… mais qu’est-ce qui fout ce con toujours à la cave, il doit picoler le cid’ nouveau avec Ernest… il dit et pourquoi pas les femmes et aussi pourquoi pas les vieux, yen a que pour les jeunes qui deviennent vieux encore plus vite tellement on les abrutit avec la réclame, les fringues, le râpe, les chansons à la con du genre Benjamin Violet, Patricia Kassetoi-Povcon, Vincent Delerbe, Johnny Kapudidées, Lady Gaga, Miss Gigi, Mister Gogo et tous ces Gugusses, heureusement qu’ya encore Loana de temps en temps sinon… et pour les films pareils, nous on veut des films nouveaux avec Lino Ventura, Michel Serrault, Charles Vanel, Fernandel, Bernard Blier, Gaby Morlaix, Gabrielle Dorziat, Marguerite Moreno, mais pas la Nadine surtout, Simone Signoret, des vrais vedettes quoi, pas des succédanés qui font des damnés succès qu’on aime pas

-       Mais elles sont toutes mortes vos vedettes, Ginette

-       C’est pas grave du tout, faut se débrouiller, regardez les nouvelles technicités à la mode compliquée mais bon, peut-être de vrais clones pas des faux clowns, faut révolutionner le cinoche, tout bousculer, faut comme une nouvelle vague comme l’ancienne mais encore plus nouvelle, on prend des femmes de nos âges, pas des pantines, des mannequines ou des marionnettes, non celles de maint’nant avec des vrais vieux qui connaissent la musique et les vrais gestes, des acteurs qu’ont du vécu, de la viande, du nerf, du cœur et des couilles…pas de faux acteurs peints en bleu comme dans ce navet pourri d’un avatatar que j’ai pas vu sauf en affiches beurk, non, des bien en chair avec de vrais os, de vrais muscles, de vrais dialogues à la Michel Audiard des tontons flingueurs, m’enfin voyons c’est pas si dur… et puis ya le procédé de la rotoscopie qu’est nouveau et qui vient de sortir… tout ça, quoi, j’comprends pas tout mais c’est intéressant !

ah, voilà Maurice qui remonte… alors est-y bon le cid’, sers en nous donc un p’tit coup mon gars

-       Alors, on a encore dégoisé de quoi ou sur qui, mesdames de la parlotte ?

-       On parlait cinéma justement, Ginette elle a tout plein de bonnes idées vous savez pour le renouveau nécessaire qu’elle propose pour révolutionner l’bazar

-       Eh ben, on va en profiter, je l’emmène ce soir voir le nouveau Dany Boon, Rien à déclarer… et vous ?

-       Moi non merci, c’est pas mon genre… mais Ginette, ça oui…

 

 

©  Jacques Chesnel

 

 

 

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29/01/2011

LE GROS NAVION

 

L’ avion a décollé et prend de la hauteur

- ça va, Maurice ?

 - attends un peu, je suis serré avec la ceinture que je

l’hôtesse :

- ne décrochez pas encore votre ceinture, Monsieur, attendez le signal sonore

 - j’trouve que ça fait un boucan pas possible moi

- mais faut qu’on soye dans la teumosfère pour que ça se calme, on voit bien que c’est la première fois que tu prends l’avion

- si j’aurais su on aurait du prendre un navion moins gros, la taille en dessous, un 379 par exemple au lieu de çui-là, on n’est pas à un numéro près

- Ginette, on a choisit la destination, pas l’avion qui va avec, pas encore


clic- clong


- oooh !, qu’est-ce que c’est que ce bruit, une alarme ?, ya un problème ?, un incident…  j’ai peur

- non non, regarde le signal devant là, c’est indiqué en haut : tu peux te détacher maintenant, voilà

- j’ai mal au cœur, Maurice, j’ai pourtant pris un truc pour les jambes du docteur à cause de mes veines

 - p’tête que t’as l’estomac dans les talons, le plateau-repas va arriver sous peu, respire un bon coup, là, doucement, pense à aut’chose, au soleil, aux palmiers

 - j’crois que c’est quand j’ai vu l’hôtesse qu’a présenté les gilets de sauvetage, ça m’a fait un drôle de truc comme un nœud dedans

 - ça fait toujours ça la première fois

 - j’ai envie de faire pipi, où sont les toilettes dans c’navion que j’aime pas trop ?

 - à l’arrière comme toujours, mais ya la queue comme toujours, c’est fou c’que l’avion fait pisser, c’est l’altitude ou les chocottes, ou les deux… au fait, t’as entendu le commandant d’bord, on va traverser une zone de trubulences

 - j’ai un pressentiment, Maurice, et maintenant ça presse pour le pipi, j’ai pas envie de

 - vas-y, ça a l’air d’être libre

 - mais si ya une trubulence quand j’suis d’dans en train d’faire ?

 - tant qu’l’avion fait pas de loopings, tu crains rien

 - Yvette dit que des fois ça chahute sec et qu’ça renverse le ouatère

 - oui mais c’est rare quand même…

Maurice s’est assoupi, Ginette est revenue, elle le dérange

 - attention à tes arpions à toi

- t’as-ty fait ?

-  en tout cas ça m’a dégourdi les guibolles toutes engourdites et j’ai été soulagée car en plus j’avais des gaz en plus

- on arrive dans moins d’une heure maintenant en principe

- c’est pas trop tôt pasque c’est trop long à être coincés comme des sardines qu’on peut pas s’allonger un peu pour

- regarde le paysage par le hublot

- j’peux pas j’veux pas, ça m’donne des vestiges  


clic-clong… annonce : l’avion commence sa descente

 

- oh ! ça fait bizarre, t’es sur que c’est normal, ya pus d’bruit d’un seul coup

- y ont coupé les moteurs mais ça va reprendre à l’atterissage et alors là c’est le trintamarre pasque y mettent toute la gomme pour les freins hydroliques que ça fait peur vroooomm, accroche-toi

- c’est pas demain que j‘vais r’prendre le navion, ah ça non… de toutes façons, ma ceinture est bloquée, j’peux pas m’détacher… appelle l’hôtesse… mademoiselle, siouplait…

- nous v’là bien, on est pas sorti de la carlingue, t’es scotchée ?

- j’voudrais surtout sortir vite de c’naréoplane que j’en ai vraiment plus que marre… et on va rentrer par le train tout de suite…

-       enfin si on peut.

 

©  Jacques Chesnel

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25/01/2011

LE PARI DE JEANNE OU LES DÉSEMPARÉS - 10

 

10/ L’AUTEUR

 

En l’état actuel

Nous avons laissé tous le protagonistes de cette histoire, de ces histoires, totalement déboussolés, contrariés et, surtout, totalement désemparés… comme l’auteur lui-même.

En effet, comme il a été souvent rapporté chez/par la plupart des romanciers ou auteurs de fictions, les personnages et/ou leurs comportements, leurs caractères et sentiments (leurs confusions) échappent à la maîtrise du concepteur qui n’est plus en mesure, au moment où tout semble se dénouer, de conclure le récit quand tellement d’opportunités semblent se présenter.

Jeanne sait ce qu’elle veut, on l’aura compris, mais les moyens de parvenir à cette fin sont complexes et risquent de faire encore plus de dévastations chez ses enfants, car pour les autres elle ne veut pas y songer, c’est simplement irrévocable.

Elle est inquière pour sa santé, décidée à prendre les décisions qui s’imposent mais une peur irrépressible la tenaille, elle ne sait de quel côté se tourner, elle ne peut faire confiance à personne (croit-elle), elle n’en a même pas envie (pense-t-elle).

Cependant, inconsciemment, elle entrevoit une possibilité, un aspect des choses, une solution qui se dessinent sans oser y croire vraiment, et pourtant… il va falloir bientôt prendre une décision, une ultime décision.

Les autres personnages sont tout autant désarçonnés et communiquent leurs appréhensions et inquiétudes par l’intermédiaire de nombreux coups de téléphone, comme s’ils hésitaient à se rencontrer, à se parler de vive voix, face à face,  enfermés dans leurs solitudes. Seront-ils en mesure de résoudre leurs propres problèmes et surtout apporteront-ils à Jeanne l’aide dont elle a besoin, maintenant.

 

La fin de cette histoire approche.

 

(à suivre)

 

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22/01/2011

LE SALON DE LOTO

 

- alors, Ginette ?

- ben, on n’en a plein les pattes, voilà, enfin ouf

- comment ça dites-moi

 - Maurice a voulu tout voir, toutes les nouvelles bagnoles au salon de l’auto, mais surtout les nanas qui les présentaient et y avaient pas lésiné sur les avantages

- des voitures ?, pour les prix et sur les prêts ? pasqu’y font des efforts pour vendre aujourd’hui

- nan, des filles, avec elles, ça débordait de partout avec en plus les guibolles qui montaient jusqu’aux fesses et même plus haut et alors Maurice il demandait euh c’est comment pour le changement de vitesses en faisant les gesticulations à des couates et pour les clignoteurs je fais comme ça ou comme ci tout en reluquant sec à l’entour et y avait un de ces mondes que j’ai vite mis le holà car…

- vous avez fait la ola avec les autres en levant les bras tout haut, j’aurais voulu vous y voir que j’y crois pas

- aux japonaises Maurice il a craqué, elles étaient nettement moins grandes mais plus confortables, plus racées, plus profilées, plus modernes, plus actuelles quoi

- les filles ou les bagnoles, pasque…

- vous caricaturez tout l’temps mais fallait voir Maurice il riait toujours mais de plus en plus jaune vu la cherté et les mini-jupes des présenteuses, yen avait une on aurait dit la p’tite Yokonono vous savez la femme à Jack Lemone… et vous pendant c’temps là ?

- au lieu d’aller au salon de l’auto comme tout l’monde, on est resté comme d’habitude à jouer au loto dans le salon chez Yvette mais sans vous que les copines ont dit ah la lâcheuse avec ses caisses roulantes pour la frime

- j’aurais préféré être avec vous mais Maurice voulait tellement que je choisisse un nouveau modèle avec la primàlacasse que j’comprenais pas qu’ils vont casser notre vieille Dauphine qu’avait plus de deux cents mille kilomètres au comptoir normal et qu’on en aurait une toute neuve en remplacement que c’était pas trop tôt

- en jouant au loto avec nous vous auriez pas eu de problème avec la chance qu’on vous connaît pour trouver les bonnes combinaisons

- c’est vrai qu’j’ai souvent eu la main heureuse aux jeux de la société, une fois j’ai même gagné à de la roue de la fortune en 90 ou 11 avec le Christian Morin même si j’aimais pas sa clarinette que j’trouvais trop baveuse et dégoulinante de partout

- moi je suis été au juste prix mais ça gueulait tellement dans le studio avec le p’tit gars déplumé le Lagarce que je suis pas été sélectionnée avec regret pasque ya quand même de sacrés beaux gros lots plus qu’au loto

- ça dépend lequel… vous connaissez la nouveau jeu qui fait fourreur ? le loto à Toto ? ça fait un malheur chez les retraités et les druckérisés du dimanche martin après-midi

- bientôt y aura le lata de Tata pour les mémés… (rires) c’est vraiment n’importe quoi pour piquer l’pognon que l’état récupère toujours

- pas tellement pasqu’au loto d’Toto le gros lot eh ben c’est justement une auto et pas n’importe quoi, j’vous l’donne en mille : une asiatique que l’état récurre pas

 - alors si c’est une japonaise là Maurice y va rappliquer, il cause plus que de Toyota par ci Toyota par là comme dans la chanson tico-tico de Luis Mariano oh ho

- vous lui direz que c’est une Toyototo pour sa tata et ça lui fera plaisir, ça lui rappellera des bons souvenirs de vot’ visite au salon de la toto avec la prime à la cacasse de vot’ vieille carcasse (rires)

- ah c’est malin, vous changerez pas, vous !... quand c’est qu’on en fait un ?, de lototo.

 

©  Jacques Chesnel

 

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