Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/11/2011

L’EURO, COCO (GINETTE & MAURICE)

 

-     bon alors, qu’est-ce qu’ils nous barbent avec l’euro, vous trouvez pas, dame Ginette ?

-     ah ça oui, l’euro par-ci, l’euro par-là, plus qu’ils en parlent moins en voit la couleur dans nos escarcelles comme disent les journalistes au lieu de notre porte-monnaie pour faire chic

-     vous allez pas me dire que vous êtes contre comme tous ces souverainistes à la mords-moi la noix

-     nan, pas du tout, je dis simplement que l’euro il a bon dos  et qu’on le met à toutes les sauces pour nous faire ravaler la pilule

-     donc, à vous entendre, l’euro c’est pas du pipeau, de la gnognote, des cloclopinettes ou quoi ?

-     faut savoir s’en servir et pis c’est tout, y a quand même du bon quand on va à l’étranger sauf chez nos amis les grands bretons parce que à alors, on gagne pas au change loin de là, c’est l’eurosbif, hihihi

-     et pis revenir au franc, tenez, comme dit Maurice qui craque pour les bagnoles, prenez une Clito de moyenne gamme, ça vaut dans les 10.000 euros, ça fait presque 66.000 nouveaux francs, donc pour le grand-père qui compte en francs d’avant 6.600.000 francs, plus de six millions bon sang de bonjour-bonsoir, alors moi j’vous l’dis qui c’est qui peut encore se payer ça avec nos salaires d’euromanichel à moins d’ouvrir l’eurobinet à pognon de quoi en faire tout un euroman, surtout à l’heure de l’eurobotique et avoir la santé solide comme un euroc, c’est clair comme de l’eau d’euroche et vraiment eurocambolesque, non ?

-     et ben vous v’là lancée, Ginette, je vous savais pas aussi pointue sur les jeux de mots jeux de vilots

-     avec Maurice, c’est tous les jours quand il a plusieurs verres dans l’nez, il débite, il débite et des bites, ça nous fait passer le temps, remarquez, l’euro est partout, notre petit-fils, le dernier de la bande, il nous a dit qu’à l’école pendant la révolution y avait eu Eurobespierre, qu’on donne des cours sur l’euromantisme, pour notre cousine Magali en cuisine on se penche sur les eurognons, l’euromarin, l’euroquefort quand ce n’est pas sur l’euroblechon et sur…

-     alors là erreur et horreur, je vous arrête parce que c’est le reblochon et pas l’inverse qu’on dit

-     Maurice, lui ne fait pas de différence du moment que ça s’mange, même que lui fais toujours des eurodomontades qu’il en tient pas contre mais ça le met en eurogne quand même

-     et à part ça, êtes-vous été à la foire commerciale cette année, juste après le tournant ?

-     vous voulez dire l’eurocade peut-être, j’aurais bien voulu pour les antiquaires et leur salon car j’ai toujours aimé l’art eurococo mais comme on est fauchés, Maurice m’a dit pas question, on n’a plus d’euros ma cocotte, on est nu comme des eurobinsons sur les eurocailles, voilà, c’est pas la joie tout de suite, hein ? avec toutes ces compressions et pressions de ces cons…

-      

un bébé pleure dans la pièce à côté

 

-     ah c’est l’heure du biberon pour le petiot de notre belle-fille, elle va tarder à m’appeler pour lui faire faire son eurototo… mais bon, en attendant ça va nous empêcher de s’faire un p’tit café, tenez, j’ai du bon eurobusta du Gabon, en provenance directe de là-bas.

 

©  Jacques Chesnel

wpid-Euro.jpg

 

12:20 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

21/11/2011

NUL EN CALCUL

 

. zéro + zéro = pas un rond

. un et un = d’œufs

. un plus dix = perdu, retrouvé

. deux et deux = Cat (Félix the)

. trois et zéro = trois fois rien

. trois et trois = six (Versailles m’était conté)

. quatre et quatre = huîtres

. quatre à quatre = je monte les escaliers

. quatre x quatre = la quadrature du cercle

. cinq sur cinq = je vous reçois

. huit et huit = XVI (Louis)

. neuf et neuf = dix huîtres

. dix et dix = vain (dieu, la belle église)

. onze et onze = vingt-deux (v’là les flics)

. seize et seize = trente-trois (dites)

. trente-cinq et trente-trois = soixante-huit (bonne année)

. trente-six et zéro = chandelles

. quarante et zéro = comme en 40 (ou Ali-Baba et les voleurs)

. quarante-deux + un = 43 (fillette à se faire tâter)

. quatorze – deux = midi

. quatre-vingt + zéro = les jours du tour du monde

. soixante et neuf = pôle position

. cent pour cent = d’accord (voir aussi sang pour sang)

. cent + un = les dalmatiens

. cent x quatre = les coups de Truffaut

. cent-dix neuf + un = les jours de Sodome

. quatre cent vingt + un = jeu avec trois dés

 

©  Jacques Chesnel  (nul en calcul)

 

22:20 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (3)

17/11/2011

UNE AUTRE HISTOIRE COURTE

 

 Lorsqu’elle est partie, il n’en est pas revenu

 

 Lorsqu’elle est revenue, il en prit son parti

 

 Lorsqu’elle annonça la couleur, il a broyé du noir

 

Lorsqu’elle prit la mouche, il n’a pas raté le coche

 

Lorsqu’elle rua dans les brancards, il prit le mors aux dents

 

Lorsqu’elle devint cramoisie, il émit un rire jaune

 

Lorsqu’elle perdit les pédales, il se remit vite en selle

 

Plus tard

 

Lorsqu’elle l’aguicha, il joua à guichets fermés

 

Lorsqu’elle retira son jeans, il en resta gros-jean comme devant

 

Lorsqu’elle voulut prendre l’affaire en main, il ne lâcha pas prise

 

Lorsqu’elle constata l’échec, il ne put dire que mat

 

Lorsqu’elle cracha son dépit, il ne lui laissa aucun répit

 

Lorsqu’elle battit en retraite, il lui passa le flambeau

 

Lorsqu’elle rendit les armes, il ne vit pas ses larmes.             

 

 

P-S : Lorsque cette histoire prit fin, on n’allait quand même pas en faire toute une histoire.

             

©  Jacques Chesnel

 

22:41 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

09/11/2011

QUAND ON… (2)

 

. Quand on m’a mis à l’ombre, j’en ai pris ombrage

. Quand on m’a mis sur le gril, j’étais déjà sur des charbons ardents

. Quand on m’a dit que Mathilde était revenue, alors j’ai crié Aline pour qu’elle revienne

. Quand on m’a dit Pierre est petit, j’ai pensé à Pierre le Grand

. Quand on m’a mis des œufs dans le même panier, j’ai oublié ensuite d’y mettre la main

. Quand on m’a traité d’âne, je n’ai pas osé braire

. Quand on m’a traité d’incompétent, j’ai tout de suite lâché un gaz puant puis j’ai pété les plombs

. Quand on m’a parlé d’une perle rare, j’en ai desserré une vite fait

. Quand on m’a accordé une bourse sans coup férir, j’ai fait rire tout le monde sur le coût sans rien délier

. Quand on m’a répondu du tac au tac, j’ai cru à un tic, alors j’ai rétorqué c’est du toc

. Quand on m’a vu franchir le Rubicon, j’ai fait des efforts pour ne pas rougir

. Quand on m’a dit tu ressembles à Fernandel, j’ai henni sans être honni

. Quand on m’a dit de ne plus penser à Fernande, ce fut aussitôt la débandade

. Quand on m’a dit regarde la baie, j’en suis resté bouche bée

. Quand on m’a dit karcher, j’ai pensé aussitôt à Thatcher et j’ai eu un malaise

. Quand on m’a suggéré de fumer du hasch, j’ai dit chiche

. Quand on m’a ri au nez, j’étais content de ne pas avoir de barbe

 

©  Jacques Chesnel

 

18:18 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

27/10/2011

DE L’AIR… AU CHANGEMENT D’ÈRE

 

C’est au moment de prendre l’air que j’ai trouvé que je ne manquais pas d’air, remarquez que j’aurais pu aussi bien jouer la fille de l’air sur l’air des lampions sans en avoir l’air mais je me suis dégonflé comme une vieille chambre à air, je ne regrette rien car à l’air libre je respirais le grand air pour mon baptême de l’air sans toutefois en brasser beaucoup, air connu ; changer d’air donc : deux solutions, cracher en l’air mine de rien ou s’envoyer en l’air sans se faire pomper, je choisis une troisième voie : vivre de l’air du temps l’air de pas grand’chose sans se donner l’air d’avoir un faux air ou plus difficile de ne pas avoir l’air trop con (et la vue basse)… ou plus simplement peut-être : courir sur un erre incertain ou encore mieux changer d’ère (à défaut de permuter d’aire avec mon cher airedale sous les airelles vers la belle Eire), ce que je fis immédiatement sans ergoter ((Herr Gott) et qui me procura un éréthisme suivi d’une érection éreintante pour l’érotomane que je suis au cours de cette errance, de mon parcours erratique ; si bien qu’étant tombé  dans l’erreur, je devins vite érubescent puis dus éructer sans arriver à l’éradication, un simple éraillement comme une éraflure d’où un érythème, conséquence de ces errements. Conclusion : ce qu’il me faudrait maintenant au plus vite : avoir l’air de rien, sans toutefois prendre de grands airs. Ah !, l’air du temps.

 

©  Jacques Chesnel

 

21:59 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

25/10/2011

QUAND ON… (1)

  

. Quand on a commencé, j’ai pensé à la fin

 

. Quand on m’a accusé, j’ai accusé le coup

. Quand on m’a tapé, j’ai dit je m’en tape et me suis tout de suite retapé

. Quand on m’a aperçu, je n’avais rien vu venir

. Quand on m’a regardé, j’y ai regardé de plus près

. Quand on m’a énervé, j’ai perdu mon calme

. Quand on m’a enlacé, je me suis délacé

. Quand on m’a embrassé, je me suis embrasé

. Quand je me suis embrasé, j’ai mis le feu tout partout

. Quand on m’a fait tomber, j’ai tombé la veste

. Quand j’ai tombé la veste, j’ai tout laissé tomber avec

. Quand on m’a relevé, j’ai relevé mes empreintes, on ne sait jamais

. Quand on m’a senti, j’ai demandé qu’on m’hume

. Quand on m’a dit je t’hume, j’ai commencé à aimer un peu plus

. Quand on m’a ligoté, je me suis emberlificoté

. Quand on m’a déligoté, j’ai dégotté un Bourgogne aligoté de première

. Quand on m’a montré une loupe, j’ai tout loupé

. Quand on m’a vendu un timbre, je suis devenu timbré

. Quand on m’a dit oui, c’est par ouï-dire

. Quand on m’a dit non, ce fut un non-sens

. Quand on m’a traité de râleur, je suis resté sans voix

. Quand on m’a indiqué la mauvaise route, j’ai su de suite que c’était la bonne

. Quand on m’a dit on part pour Canton (Guangzhou), j’étais tout content mais ce n’était pas le canton d’à côté

 

© Jacques Chesnel

22:49 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

20/10/2011

À LAS VEGAS ! (GINETTE & MAURICE)

 

-    Alors chère amie, c’est-y vous qu’a gagné le gros lot à la tirelire du loto d’hier

-    Nan, car on joue pas à ce machin-là qu’est une vrai pompe à fric, oh des fois Maurice va au Casino à côté de chez nous où c’est moins cher pour les grosses commissions qu’ailleurs, d’autre fois il va à l’autre Casino où c’est plus cher car il revient toujours bredouille et raide comme passe l’assez, je crois que je vais le faire interdire de séjour d’ailleurs

-     Mais je croyais que vous m’aviez dit

-    On a tout suspendu un peu car on a perdu des mines et cents à tous ces attrapes-gogo, on reste aux jeux du Casino pas cher avec les remises pour les réclames, on a déjà gagné un séjour de ouikinde à Bagnoles de l’Orne pour une cure de jouvence de nos jambes avec l’Abbé Sourisse et un voyage en car à Lorient pour la fête des binious qu’on en avait marre à cause du boucan et de tout le tournis et Maurice qui voulait souffler dans leurs machins gonflés que les gars dégonflés voulaient pas ; à Bagnoles, un type qui tripotait les machines à sous à côté de Maurice a récolté un tombereau de pièces qu’il pouvait pas ramasser toutes tellement yen avait partout, Maurice était vert car c’était sur cette même machine qu’il s’était échiner pendant deux heures auparavant mais il rigolait de voir le type faire des sauts de carpe pour essayer de ramasser le pognon devant les badauds ébahis en criant putain je le crois pas je le crois pas, je le crois pas. Vous voulez-t’y un coup d’main demande Maurice et l’autre non non j’peux ramasser ça tout seul bon dieu d’bon dieu. En rentrant, il m’a avoué avoir carotté quelques grosses pièces pour se dédommager, dites donc. Et pis, on avait décidé de tout arrêter quand boum rien qu’à répondre bêtement à une question idiote au Casino pour les commissions, on gagne un voyage pour deux à j’vous donne en mille : Las Vegas, oui, là où braille la Céline Dion qu’on le croit pas mais c’est vrai, on embarque la semaine prochaine et hop, chère amie, attendez que j’reprenne mon souffle, le Maurice est fier comme les trabans il crie partout je suis l’As de Vegas à Las Vegas, sacré bonhomme

-    Comment qu’vous allez l’tenir là-bas, pasque avec tous ces feux qui brillent, les filles qui aguichent ou qui affriolent en gondolant du croupion, les croupiers faux-jetons, c’est l’île de la tentation, des sensations et colle en tas de merde sans Denise Grognard en quelque sorte en plus vrai, quoi

-    M’en parlez pas, j’en tremble déjà, j’en ai les poils tout hérissés, tenez, avec lui faut avoir l’œil et le bon, il est capab’ de tout d’un seul coup, de se carapater à quat’ pattes au moins, de faire le joli cœur ou un coup d’éclat pour se faire remarquer, j’en frémis déjà car il a de la ressource, je sais pas où il va chercher tout ça biscotte chez nous il est plus calme à cause du bromure dans la soupe mais il en fait déjà toute une tartine dans le pataquès et il va foutre le bordel moi j’vous l’dis que les gars du Casino vont flipper sec dans les casinos scintillants qu’on regarde à la télé de voir un grand fauve lâché dans la nature comme le gars Tarzan en string léopard dans la jungle, j’en ai la crainte et même les chocottes

-    Dites, comme vous y allez un peu fort, non ?

-    On n’est pas encore parti, ma chère, mais j’peux vous dire une bonne chose, c’est que si Maurice est déjà dans sa tête l’As de Vegas, c’est bien moi Ginette qui, déjà, est lasse de Vegas, très lasse.

                     

© Jacques Chesnel

 

IMG_2294.JPG

Photo : Pierre Letourneau sur le site : www.yvettedefrance.com

18:17 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (1)

17/10/2011

INTERMEZZO


UN AUTRE DAVID,  AU CHOIX

 

Après les rois d’Israël et d’Ecosse, les peintres flamand et français, les prénoms des cinéastes, chanteurs, footballeurs, DJ et photographe, voici en plus quelques autres DAVID :

 

Bouillet   Couillet   Douillet

Fouillé   Gouillet  Houillé

Jouillet   Kouillet   Louillet

Mouillé  Nouillet  Pouillé

Quouillet  Rouillé  Souillé

Touillé  Vouillet  Wouillet

Xouillet  Zouillet…

 

… somme toute, l’embarras du choix ?... un de trop, peut-être ?

 

©  Jacques Chesnel

 

19:03 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

14/10/2011

LES DEUX AMIES

 

En tombant par un pur hasard sur cette reproduction du tableau de Gustav Klimt, Mélanie pensa à ces deux voisines dont on disait que, enfin, elles avaient l’air de, on n’avait rien contre mais avouez cependant que, l’une blanche habillée toujours en noir et l’autre noire continuellement vêtue de blanc… ah ! et puis cette habitude de nous narguer sur leur balcon en fumant cigarette sur cigarette avec quelquefois un verre à la main. Mélanie, bien sûr, n’était pas raciste, elle comprenait la défense des droits des femmes, avait approuvé la loi Veil autorisant légalement l’avortement, celle contre la peine de mort, mais il y avait au fond d’elle-même un vieux fond indéfinissable qui faisait qu’elle était choquée, voilà c’est dit oui choquée, certainement.

 Elles faisaient la causette jusqu’à tard le soir qu’on se demandait ce qu’elles pouvaient bien se raconter et dire du mal de nous, certainement. Des fois elles avaient des mots plus hauts que les autres ou bien des rires bien sonores ou des airs de conspiratrices qui nous agaçaient. Quelques fois, on voyait un couple de personnes âgées, des parents qui passaient, certainement. Jamais de jeunes hommes de leur génération, rien que des femmes, des copines un peu fofolles ou des rombières hyper maquillées comme des tenancières de bordels anciens, certainement. Oh !, une fois seulement, un soir d’été, elles avaient parlé plus longtemps et plus fort, comme si elles se chamaillaient puis la noire s’était levée brusquement et était revenue avec de nouveaux verres pleins, certainement. Mélanie avait pensé alerter la police pour tapage nocturne, mais maintenant la flicaille ne se déplace plus que pour des choses plus graves comme la nuit où on a brûlé la voiture de son gendre qui est policier, c’est pour ça, certainement.

Maintenant que les soirées sont plus fraîches, elles ont mis des parkas ou des couvertures mais elles restent sur le balcon à cause de la fumée, certainement. Hier, en plus des exclamations, rires et autres éclats de voix, on a eu droit à de la musique, enfin si on peut appeler cela de la musique, zim boum boum badaboum avec une fille qui hurlait à la mort, certainement ; on a entendu des voix crier la ferme moins fort vos gueules arrêtez elles ont continué de plus belle comme si de rien n’était, plus fort même, certainement…

Et puis l’hiver arriva, long, froid, moche, Mélanie nous dit qu’elle ne voyait plus que des ombres derrière les voilages, le calme était enfin revenu sur le balcon d’en face. Rien de particulier à signaler dans le pâté de maisons et d’immeubles à part quelques chambardements, visites nocturnes de policiers suite à des plaintes pour vols ou de rares échauffourées à cause de la drogue, la routine, quoi, certainement.

Le printemps se décida enfin tardivement, Mélanie avait perdu son mari ainsi que des proches et quelques  voisines, elle s’ennuyait ferme en dehors de « Plus belle la vie » à la télé, elle parlait souvent des deux amies qu’elle ne voyait plus derrière ses rideaux tirés, certainement. Se couchant de plus en plus tôt, elle fut réveillée au début de son sommeil par des cris. Levée rapidement, elle vit deux silhouettes comme des ombres chinoises sur le balcon, sur toujours le même. Décidément, pour la reprise, ça barde sec, se dit Mélanie en enfilant sa robe de chambre. Le ton monta de plus en plus haut, une véritable altercation, un vrai grabuge, il y avait maintenant du monde à toutes les fenêtres, on entendit dans le vacarme une grosse voix, celle du boucher retraité hurler oh ça suffit là-bas oh quand on vit apparaître derrière les deux amies un profil masculin, oui un homme d’aspect corpulent se précipiter sur les deux femmes, les empoigner violemment et les balancer toutes les deux dans le vide de la hauteur des sept étages avec en accompagnement une clameur horrifiée venant de toutes les fenêtres. La femme noire rebondit en tombant sur une voiture avant de s’écraser sur le sol dans un splatch terrible, la blanche fut accrochée dans/par les branches d’un arbre avant de s’affaler inerte dans le bac à sable du jardin d’enfant tout proche. L’homme, vite descendu, les disposa alors avec précaution l’une à côté de l’autre puis les réunit par l’entrelacement de leurs doigts, arrangea leurs cheveux défaits, déposa un baiser sur le front de chacune et s’adressant aux curieux des fenêtres leur dit ceci : « ce n’est rien, il n’y a rien à dire, une simple dispute entre deux amies »… et il partit dans la nuit.

Ce n’était donc que cela, deux amies, un simple fait divers en somme, comme le rapporta le journal local le lendemain. Le journaliste écrivait dans son reportage que personne n’avait rien compris parmi les voisins, lui non plus d’ailleurs. Ce devait être un débutant ou un stagiaire. Certainement.

 

© Jacques Chesnel

10:52 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

30/09/2011

QUI SE SOUVIENT…

 

              Arts & Lettres

 

. Qui se souvient de Maurice Baquet et de son violoncelle Cérébos

.  de Marguerite Moréno dans « La folle de Chaillot »… et de son auteur, Jean Giraudoux

. Qui se souvient de Pierre Renoir, de Simone Simon, de Léonce Corne, de Suzanne Dehelly, de Pierre Trabaud, d’Henri Guisol, de Marcel Génin, de René Lefèvre, du Crime de M. Lange, de la belle Florelle

. des mois d’avril, des billets doux, de François Billetdoux et de Nicole Avril

. Qui se souvient d’Alec Siniavine, de Léo Chauliac, du pianiste d’Yves Montand dont je ne me souviens plus du nom… ah ! si : Bob Castella, je crois

. de Maria Casares dans « Les enfants du Paradis », de Louis Salou et de Lucien Coëdel

. Qui se souvient des clowns Footit et Chocolat (moi, avec mon grand-père Victor devant son poste à galènes), de Jacques Pills, de Ring Lardner, de Délia Garcès dans « El » de Luis Buñuel

. de Jane Sourza et de Raymond Souplex, de Gabriello et de sa fille Suzanne, de

. Qui se souvient de Roger Vitrac et de « Hector ou les enfants au pouvoir », de Roger Blin dans « En attendant Godot », d’Emile Ajar, de François de Roubaix, de Térésa Stratas dans la « Lulu » d’Alban Berg mise en scène de Chéreau

. Qui se souvient de « La loi » de Roger Vailland

. de Pierre Blanchar, d’Harry Baur, de Jean Servais, de Palau, de Madeleine Robinson et de Madeleine Sologne, de Marcel Lévêque et de la neige qui tombe à gros flacons

. Qui se souvient de « Pattes blanches » de Jean Grémillon et du rôle de Michel Bouquet

.  du grand orchestre du trompettiste Don Ellis au festival de jazz de Juan-les-Pins

. Qui se souvient de Marie Bizet, de Rina Ketty, d’Elyane Celys et d’André Claveau

. de Garcimore et de sa souris Tac-Tac décontrastée

. Qui se souvient d’avoir pleuré à la mort de Cora dans « Le dernier des Mohicans »

.  de Jean-Roger Caussimon acteur et chanteur

. Qui se souvient avoir entendu le glin glin de Roland Magdane la première fois à la radio

. Qui se souvient de Colette Darfeuil dans « L’escalier sans fin » avec Pierre Fresnay en 1943

. du rire crispé d’Alerme, de celui frémissant de Suzanne Flon, de Robert Destain dans « Les belles bacchantes », de Louis Arbessier dans « Quoat-Quoat » pièce de Jacques Audiberti

. Qui se souvient de Pierre Mingand, de Pierre Dudan, de René-Louis Lafforgue

.  de Damia, de Fréhel, de Lys Gauty, de Catherine Sauvage la superbe…

. Qui se souvient de Pierre Brasseur dans « Le partage de Midi » et d’Alain Cuny dans « Tête d’or », pièces de Paul Claudel, de la première de « Rabelais » par la compagnie Renaud-Barrault à l’Elysée-Montmartre en 1968

. de Lucien Raimbourg (cousin de Bourvil) dans « L’irrésistible ascension d’Arturo Ui » de Bertold Brecht, mise en scène de Roger Planchon au TNP

. Qui se souvient d’avoir été ému par « Dalva », personnage principal du livre éponyme de Jim Harrison

. de Robert Lamoureux, de « Papa, Maman, la bonne et moi »

. Qui se souvient d’avoir lu « Cronopes et fameux » et de « Nous l’aimions tant, Glenda » de Julio Cortázar

 

© Jacques Chesnel

 

10:50 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

23/09/2011

QUESTION DE NOURRITURE

 

Léonard vient d’avoir huit ans, parle beaucoup et chante continuellement « Suzanne », la chanson préférée de ses parents admirateurs de Leonard Cohen. On l’aime bien ce gamin mais à la fin il nous crispe un peu avec les questions qu’il nous pose sur tout avec une curiosité insatiable et obsédante. Dernièrement, lors de notre visite à nos amis ses parents, il s’est mis à nous interroger sur les aliments, sur ce qu’on donne à manger, par exemple facile, aux personnes âgées, aux animaux qu’il adore, bon jusque-là on peut répondre mais dis Antoine me demanda-t-il un jour, qu’est-ce mangent les arbres ?, les cailloux ?, les immeubles ?, les nuages et le soleil ?… alors on répondait n’importe quoi le plus sérieusement du monde avec le maximum d’humour pour le faire rire et il semblait s’en satisfaire, il nous fallait parfois partir dans des sortes d’élucubrations labyrinthiques dont nous sortions parfois épuisés d’aller chercher tout ça, ce qui nous étonnait ou nous énervait mais comme nous avions promis de répondre à toutes ses questions alors… Ses parents, nos chers amis, étaient admiratifs envers nous, de notre patience parce qu’ils avaient renoncé depuis longtemps à jouer à ce jeu qu’ils trouvaient marrant au début, intrigant ensuite, débile à la fin, bref ils avaient purement et simplement démissionné. Un jour, il nous demanda ce que mangeait Suzanne, nous lui répondîmes qu’on allait demander à Leonard Cohen mais il refusa indigné de notre inculture autant que notre paresse. Une autre fois, il nous demanda comment pouvait-on avaler dieu à genoux car il avait vu une communion pendant une messe à la télé et que pour lui absorber d’un seul coup devant tout le monde un type cloué sur une croix lui paraissait incompréhensible et au-delà de ses forces, il nous demanda même si c’était cela qu’on nommait anthropophagie, nous répondîmes que c’était un mystère ce qui lui provoqua un haut-le-cœur après fortes déglutitions. Notre non-réponse semblait l’avoir troublé car il avoua qu’il n’allait pas en rester là, il lui fallait savoir et vite parce que voyez-vous, dit-il.

Plus tard, ses sœurs, nous avouèrent qu’elles le trouvait devenu bizarre, prenant des postures de conspirateur, qu’il écoutait de la musique d’église à l’orgue ainsi que des chants liturgiques à fond dans sa chambre et qu’il lisait au lit des ouvrages qui leur paraissaient pieux bien qu’il n’ait reçu aucune éducation religieuse, ses parents étant farouchement athées et anticléricaux ; il ne posait plus de questions, à personne, ce qui dénotait un comportement pour le moins étrange en raison de sa naguère constante curiosité jugée maladive. Il exigea qu’on lui achète la bible, des livres sur la vie des saints, sur celles des anges, et comme on ne lui refusait rien… Il butait sur certains mots, s’acharnait sur certaines phrases mais ne parlait toujours pas, jamais plus, de ces nourritures terrestres qui semblaient l’obséder jusque-là ; ses parents, nos chers amis, commencèrent à s’inquiéter sérieusement mais n’osaient pas le contrarier, ce n’était pas dans leurs habitudes d’éducation. Il mangeait d’ailleurs de moins en moins allant jusqu’au jeûne une fois par semaine mais pas le vendredi, il perdait du poids ; alors débuta l’angoisse dans cette famille unie. Nous fûmes chargés  par ses parents, nos chers amis, d’essayer de voir et de comprendre ce qui se passait dans la tête de leur garçon. Dans sa chambre qui ressemblait maintenant à une cellule de moine, Léonard nous accueillit aimablement, nous demanda de nous déchausser, de nous assoir par terre et d’emblée nous posa cette question : « bon alors, qu’est-ce que ça mange un séraphin ? ».

On n’était pas sorti de l’auberge.

 

  ©  Jacques Chesnel

10:54 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

17/09/2011

LA MÉPRISE

 

Claude et moi sommes inséparables depuis longtemps, je crois bien que cela remonte au début de notre adolescence plutôt tapageuse, au lycée on nous appelait Castor et Pollux ou Cul et Chemise selon les affinités avec les autres élèves, on en riait. Cela avait commencé par les jeux, échecs et mots croisés, le sport avec le tennis de table et le basket, disciplines où nous nous défendions bien, un peu au-dessus de la moyenne. Puis ce fut les filles, les flirts, les confidences, les secrets, plus tard les partages consentis, aucun nuage à l’horizon de notre amitié. A tel point que nous nous sommes mariés le même jour, lui avec une ancienne fiancée, idem pour moi. Nous nous fréquentions plus ou moins régulièrement, soirées et vacances. Lors d’un voyage de nos deux épouses, seuls tous les deux, il me confia qu’au bout de quatre ans de vie commune, il avait quelquefois des aventures alors que moi j’étais toujours fidèle car profondément et désespérément amoureux, ce qui l’amusait. Nous nous recevions une fois par semaine sans compter des réceptions avec d’autres couples, ce qui arrivait de plus en plus souvent au grand dam de Patricia, mon épouse devenue un peu casanière. Lors d’une confidence, Claude m’assura que les jeunes filles se jetaient littéralement à ses pieds, qu’il ne pouvait résister et avait été obligé d’organiser ses sorties avec un planning clandestin ; il avait le démon de midi moins le quart car tout juste trentenaire et toujours aussi beau garçon genre latin lover Marcello ou blond cuivré Redford type surfeur californien, cela changeant suivant les saisons, vous voyez, résultat impressionnant ; et comme, il était trrrès intelligent, beau parleur, blagueur, alors là ! le succès assuré à tous les coups pour tous les coups.

-    Chérie, nous sommes invités chez les Margerien demain soir

-    Chic, il y aura Claude

-    Heu, oui sûrement, tu sais qu’il adore ce genre de soirée pour faire des rencontres

-    Oh, tu peux parler, c’est là qu’on s’est connus

-    Et qu’il y trouve du gibier à sa guise

-    Je t’interdis de parler comme ça, Claude est un type bien, un peu coureur certes mais très gentil

-    Tu ne vas pas me dire que maintenant tu as re…

-    Non rassure-toi, mais n’empêche, il a d’ailleurs très bon goût

-    Surtout dans le cheptel des tendres ados

-    Et dire qu’Eléonore ne s’aperçoit de rien, enfin

-    Bon, tu es prête ?

-    Presque , j’enfile un collant et j’arrive

-    Ah, tu te protèges donc

-    Mais non, idiot chéri, et contre qui, dis le moi ?

-    Attention, ya ta combinaison qui dépasse

-    Qu’il est bête, mon Dieu qu’il est bête         

Il y avait toujours beaucoup de monde et du beau aux fêtes des Margerien. Claude pensait souvent à Gatsby le Magnifique avec tout ce luxe un peu tapageur et ces invités qu’on disait mondains et profiteurs, et même les deux à la fois. Ce soir-là, anniversaire de la maîtresse de maison, on avait mis les petits plats dans les grands et les bouteilles débordaient abondamment des coupes et verres , un quintette de jazz jouait des ballades langoureuses, on entendait des petits cris, de grosses exclamations, parfois des soupirs ou des bulles de conciliabules, les messieurs rentraient leurs ventres éminents et proéminents, les dames bombaient leurs avantages plus ou moins généreusement décolletés, tout était dans l’ordre naturel des choses friquées. Nous embrassons nos intimes, saluons nos connaissances regardons le spectacle des arrivées, cherchons un visage ami, notamment  celui de Claude qui…

-    Je me demande bien où il est

-    Dans un coin ou un recoin en train de draguer

-    Tu crois ?... ah ! bonjour chère amie, comment allez-vous ?

-    Penses-tu qu’il sera seul ou avec une conquête

-    Va savoir avec lui

-    Et avec sa femme alors ?

-    Il peut pousser les choses jusque-là, tu le connais bien

Derrière une grosse dame type baleine échouée dans un fauteuil, un mobile de Calder, quelques serveurs en train de papoter en attendant un convive, quelques bimbos en pleine action de pépiement, une silhouette connue en discussion avec un jeune éphèbe d’une beauté à couper le souffle de Patricia ce qui d’ailleurs arriva quand elle découvrit en même temps que moi que les deux hommes se tenaient délicatement par la taille, qu’un sourire épanoui éclairait leurs visages… et que la silhouette reconnue mais oui était bien celle de notre ami tandis que mon épouse faillit défaillir avant que je la reprenne dans mes bras oups, que t’arrive-t-il ?

-   Va   me chercher un verre, s’il te plaît, je ne me sens pas bien

-  Ne t’en fais pas, il ne va pas lui rouler une pelle en public

-  On ne sait jamais avec lui, tiens le voilà on dirait

Claude nous avait aperçu avant que l’on s’éclipse et il nous fit un signe chaleureux de la main tout en arrivant vers nous avec sa nouvelle conquête en chaloupant.

-    Je ne veux pas le voir, on s’en va

Je la retins doucement et Claude fut subitement devant nous

-    Ah !, mes amis, que je suis content de vous voir, comment allez-vous, un peu pâlotte Patricia hein ?, laissez-moi vous présenter mon ami Arnaud, Patricia, Jérôme, mes chers amis dont je viens de te parler

-    Enchantés

Il a fallu ensuite se dépatouiller pour trouver une solution et sortir de cette situation, une sorte de malaise installé… quoi ? Claude devenu gay ?, dis-moi que je rêve…nous trouvâmes donc un prétexte qu’on dit toujours futile et dont je n’ai pas souvenance pour nous débiner lâchement en laissant notre Claude abasourdi, dépité, je n’ose écrire la queue entre les jambes...

Comme il fallait s’y attendre, le lendemain soir Claude nous appela au téléphone, répondeur en fonction oblige.

-    Allo, vous êtes partis bien trop vite, amigos, je n’ai pas pu vous expliquer, je crois qu’il y a une méprise de votre part concernant Arnaud, ce n’est pas du tout ce que vous croyez, c’était juste heu une façon de pouvoir par ce biais de séduction rencontrer sa femme que je guigne depuis un certain temps et que, vous me comprenez, je ne savais pas comment faire autrement, alors oui bon, il m’a en quelque sorte servi d’appât, de go-between, c’était seulement un moyen et je crois enfin j’espère que ça va marcher, voilà, c’est tout, je voulais vous le dire parce que allo, allo, vous êtes là ? allo... et merdeu !.

 

©  Jacques Chesnel

 

 

00:04 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

08/09/2011

SOUVENIRS DE DEMAIN

 

En référence (et hommage)  à Julio Cortázar qui a écrit cette phrase dans « L’homme à l’affût » dite par Johnny Carter : ce solo-là je l’ai déjà joué demain »

Je me souviens :

.  de la grippe sévère de Gérard D. au mois d’avril 2022 car il faisait très froid, moins 72°

.  des premier pas sur Mars des marsonautes Chinois, c’était beau à la télé branchée directement dans mon cerveau

. des algues vertes en Bretagne, rouges dans la Mer Rouge, noires dans la mer Noire

.  du rire coquin de ma trente-quatrième arrière-arrière-arrière petite-fille le jour de ses deux cent cinquante-quatre ans avec un grand pied-de-nez et de son bras d’horreur

. du discours du Président de la République Arnaud Montebourg lors de son investiture en 2027

. de l’explosion de la centrale nucléaire sécurisée de Flamanville, mais pas du nombre de morts par milliers contestés par le ministre de la Déflagration

. du remariage en grandes pompes de Kate III, Reine d’Angleterre avec le petit-fils de Karl Lagerfeld et Lady Gaga bis

. d’un voyage à Venise en sous-marin collectif en compagnie d’un seul japonais muet et de deux indiens aveugles

. des funérailles nationales du dernier paysan français et de son entrée au Panthéon en ruines

. de la guerre de Cent Ans en Afrique pour se débarrasser de tous les néo-coloniaux et autres envahisseurs ainsi que de l’armistice rompu en 2102

. du débarquement des plutonautes Indiens sur Pluton et de l’accueil malgré tout sympathique de la population désabusée

. de l’exécution de tous ces cardinaux fusillés pour des actes de pédophilie internationale et de la liesse de la foule

. parfaitement du dernier des 246 films de Woody Allen lors de sa rétrospective au festival de Cannes, il a été porté en triomphe, il semblait content

. de l’interminable panne de deux des 108 ascenseurs de la vingt-neuvième tour du World Trade Center haute de 1709 étages et de la panique qui s’ensuivit, du nombre de meurtres et de suicides

. de Ludivine Sagnier à cent deux ans, elle paraît plus jeune de deux siècles même sans maquillage

. que maintenant on ne lit plus Jean d’Ormesson mais toujours Jean Echenoz, ce qui me paraît juste

. de Michel Bouquet jouant « Le Roi se meurt » alors qu’il est toujours vivant

. de la marque de mon dernier hélicoptère, celui tombé en panne d’hydrogène quand j’allais acheter mon pain chez le dernier boulanger bio à 852 kilomètres

. de la réouverture des camps de concentration et le retour de la guillotine applaudi

. de fraises de sept kilos chacune, d’une vieille boîte de sardines achetée au marché noir à cause la disparition totale des poissons, de l’agneau de pré-salé des environs de Nevers et des rillettes du Mans de Tombouctou

. de la statue géante de Charlie Parker éclairant le monde avec son saxophone lumineux à la place de celle de la Liberté sur l’île de Long Island

. du zoo d’un pays inconnu où il n’y a plus d’animaux depuis la peste et le choléra en 2343

. du portrait de Nicolas 3 avec une petite moustache et le bras droit levé

. des bateaux-mouches quand il y avait encore de l’eau dans la Seine

. de l’Himalya qui a tellement rapetissé qu’on dirait le Mont-Dore qui lui est maintenant à six cents pieds sous terre.

. des jeux olympiques de 2088 où aux 100 mètres le record du numéro 85 fut validé : il était arrivé avant d’être parti, d’un saut à la perche sans perche, d’un lancer de plume à 195 mètres

. d’avoir dit : ah ! la vache ! devant des enfants qui m’ont questionné pendant des heures sur les animaux préhistoriques

. d’avoir revu Laurel et Hardy en hologramme

. de la présentation au concours Lépine d’un vélo sans cadres, sans roues, sans guidon et sans selle

. de la béatification de Valéry Giscard d’Estaing et des bagarres avec les journalistes de télévision pendant la cérémonie

. de gros chiens pataugeant dans des crottes de p’tit vieux, de poulets faisant le tapin, de loups violés par des moutons, de veaux pleurant de ne plus voir passer de trains, d’une grève des abeilles qui a mal tourné

. toujours avec ravissement du beau visage de Danielle Darrieux

. d’un certain samedi de mai qui fut le plus beau jour de ma vie…

 

…Oui, je me souviens de tout cela pour ne pas avoir en m’en rappeler plus tard, mais ça m’a soulagé de l’écrire car ma mémoire c’est malgré tout du béton.

 

©  Jacques Chesnel

19:44 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

02/09/2011

Sainte-Nitouche-Pipi

 

Ce qu’elle pouvait nous agacer, avec une forte envie de la secouer, de la gifler chaque fois qu’on la voyait mais comme chez nous on a de la compassion alors on écrasait mais quand même ya des limites. D’abord, ses grands airs avec l’air de ne pas en avoir ni d’en manquer, exercice d’équilibre parfait, la moue molle mouvante et dédaigneuse juste un poil pas trop, le sourire à l’avenant et à lavement, le papillonnage permanent des paupières fardées jusqu’au bout des cils et qu’elle agite frénétiquement à tout-va, les cheveux ah ! ce jeu univoque/équivoque des/avec les cheveux, torsadés chiadés pour le sérieux, régulés ou décoiffés fourre-tout genre bimbo pour le glamour bidon, la frime en fripes les tripes à l’air, les fringues brindezingues frappadingues ou classieuses en raison des circonstances ou des situations, un peu de rose sur les pommettes l’air pompette mais pas trop, pantalon saucissonné/boudiné ou robe virevoltante, escarpins peints ou godillots godiches, échalas sur échasses ou danseuse en turlututu, de minauderie en mignardise, affectation désaffectée, guindée ou faussement relâchée, toute la panoplie des attitudes jouées ou déjouées, se parfumant au sent-bon bon marché ou au 7 de chez Bordeaux-Chanel, tortillant ce qui lui tenait ou restait de fessier plus ou moins fessu, se mouvant avec la grâce d’une sylphide ou d’un éléphant en rut selon les cas devant les bourgeois et les ploucs, démontrant et démontant la longueur de sa langueur accentuant son pseudo côté androïde, son aspect parfois aride ou tantôt jouant candide un peu cariatide, l’allure fluide, quelquefois gravide l’air impavide voire intrépide au teint livide, souvent morbide toujours perfide rarement placide rien que du solide ah mais !.

On se demandait bien ce qui pourrait se produire pour la détester encore plus que plus quand nous apprîmes que la donzelle ne crachait pas dans la soupe pour la bagatelle avec ses airs de sainte-nitouche se faisant régulièrement culbuter par tout un chacun ou chacune avec une préférence pour les attouchements ou effleurements furtifs et variés centrés sur son petit bouton de rose plutôt incarnat qu’elle appelât tendrement « mon berlingot adoré » quand un gynéco curieux lui eut révélé la forme tétraèdre inhabituelle de son petit organe érectile que des tiers des deux sexes manipulaient si souvent sans qu’elle fut pour autant rassasiée. Elle prit alors comme devise personnelle la chanson glorifiée par Colette Renard Les Nuits d’une demoiselle qu’il lui arrivait de brailler faux à tue-tête je m’fais caresser le gardon, je m’fais mamourer le bibelot, je m’fais ramoner l’abricot ohohoh… On la gratifia alors du surnom de Sainte-Nitouche-Pipi, on trouvait que cela qui lui allait très bien, certains disaient comme un gant mais on ne voyait pas le rapport, quoique…

Nous l’avons revue par le plus grand des hasards   une quarantaine d’années après nos premières rencontres ; pas beaucoup de changement elle est seulement devenue une vieille dame qui a toujours l’air si vive, alerte et si pimpante, si vraiment si…qu’on se demande encore si… parce que là vraiment ça commencerait à bien faire…

 

©  Jacques Chesnel

11:35 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

30/08/2011

TNT & ADSL (Ginette & Maurice)

 

-    Eh ben voilà, on s’y est mis maintenant

-    A quoi encore, ma chère amie, parce que vous…

-    Ils nous ont mis la TMT pour la télé dans l’immeuble qu’on a rien compris comment ça marche et là-dessus Maurice dit on va se mettre à la déesse ELLE que je comprenais encore moins

-    C’est comme chez nous, ne nous parlez pas des nouvelles technicités que les gamins pigent tout de suite, tenez le nôtre il a appuyé sur un bouton et hop c’est parti, j’vous jure… tandis que nous on en était encore à se gratter la cafetière en regardant les cartons

-    Maurice a voulu faire tout tout seul comme à son habitude, moralité il a passé deux heures à lire la notice en japonais ou en chinetoque mal traduite en français et je l’ai retenu de foutre un coup de pied dans la fourmilière de la machine qu’ils appellent une boxe, boxe par-ci boxe par-là, ya d’quoi avoir envie de boxer, et quel boxon avec toutes ces chaînes qu’on ne sait plus lesquelles regarder avec les étrangères en langues étrangères en plus alors qu’on y entrave que couic en plus alors il s’est mis sur les sportives avec leurs commentateurs bavards prétentieux qui savent tout sur tout et surtout qui causent pour eux et quelques potes avec leur air de tout piger qu’on regrette les anciens à la retraite dorée, heureusement quand ya plus rien il me laisse les chaînes des recettes de cuisine là au moins on comprend ou bien celles sur la décoration ou les animaux de la compagnie qu’on sait plus quoi choisir tellement yen a et que j’te jacasse en tortillant du croupion

-    Moi avec les masterchefs et autres cuistots costauds qui se la pètent un max à la coule, j’ai pris René par son péché mignon et alors hop aux fourneaux et une nouvelle recette tous les soirs, du neuf du tout nouveau tout beau à s’en lui faire péter sa sous-ventrière qu’il a abondante mais tant pire comme ça je le tiens, plus question de soupe à la grimace ni de tournées avec les potes chez Bébert à côté, on bave devant les cuisines grandes comme des halls de gare qu’on s’demande comment font les gens pour s’y retrouver sans plan, et les pubs pour les désodorants des évacuations, les canalisations qui schlinguent, les bonnes femmes outrées qui s’bouchent le pif avec des grands airs étonnés oh ya ça chez moi ? à croire que tout le monde est dégueulasse et font jamais le ménage à fond à la serpillère ou à l’homo qui lave plus blanc que l’eau rend blanc ou Laurent Blanc, vous vous rappelez ?

-    Nous on est accros à Virvolta de Gildas, d’abord le son est plus fort et puis on comprend tout de suite même quand ya rien à comprendre, c’est plus facile que ces intellos qui radotent quand ils sont encore jeunes alors vous pensez plus vieux bonjour les dégâts de la marine sauf Michel la pommade  qui dit toujours merci le vivement dimanche quand on est mercredi à ce qui paraît

-    Maurice se lamente de la disparition de Jacques Martin et des Carpentier pasque lui Michèle Torr et moi Frédéric François on était si content de les entendre avec Yvette Horner et les deux  Georgette, Lemaire ou Plana, on en fait plus des comme ça et je l’dis sans nostalgie ni fleurs ni couronnes bien qu’elles soient pas mortes ou alors si peu

-    Des fois ils ressortent de ces anciennes vedettes qu’ont malgré toutes prises de la bouteille et bien grasses du bide sauf un qu’on adore et qu’on adule, je vous le donne en mille, Michel Delpech, on s’demande comment il fait ou ce qu’il prend, René dit : c’est pas étonnant : il a la pêche, lui

-    Hi hi hi, vot’ René il a toujours le mot pour rire…

-    Oui, facile, mais tellement vrai !.

 

© Jacques Chesnel

00:10 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)