Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/06/2010

LE PARI DE JEANNE -6

LE PARI DE JEANNE (suite)

 

6/ Apollon


Cette femme l'inquiétait, elle semblait perdue, perdue dans un désert de pensées, dans l'immensité de ce petit jardin public, à quelques mètres de lui sur ce banc; il avait sursauté quand, sans la regarder franchement, il avait lu sur son visage une expression fugitive mais intense de douleur physique.

Apollon Traoré, prénommé ainsi par des parents l'ayant trouvé si beau à sa naissance qu'ils le comparèrent au dieu grec (ainsi que le leur avait dit le griot qui avait été professeur de lettres en France) avait vécu plus ou moins clandestinement au gré des petits boulots plus ou moins dégradants que des  sous-patrons condescendaient à lui donner comme une aumône. Dans cette banlieue, ballotté sans résidence fixe depuis son arrivée il ne se rappellait plus depuis quand, rien ne lui avait été épargné, sa force résidant maintenant dans l'oubli volontaire de ce passé récent, il était devenu un sans-abri, un paumé, un clochard comme on disait encore il y a peu, condamné à l'errance, sans ressources régulières, se contentant de donations diverses, argent, vêtements, repas, rendant quelques petits services à de rares personnes âgées compatissantes envers ce qu'elles nommaient le nègre, pensant repartir un jour au pays dans ce petit village à la limite du désert où l'attendent des parents sans espoir de le revoir un jour. Il avait essayé de s'introduire dans le milieu de la chanson, du spectacle, auprès de compatriotes célèbres, sans succès sans vraiment savoir pourquoi, son air détaché, comme absent, son filet de voix, quoi ?.

Depuis quelques jours, il fréquentait plus assidument ce square dans ce quartier tranquille, parlant avec les jardiniers, les aidant quelquefois Mamadou tu nous donnes un coup de main contre un sandwich ou une bière. Le soir; il rentrait au foyer de travailleurs pour un repas chaud et passer la nuit, accepté par le personnel surtout les femmes qui craquaient devant sa silhouette oh Apollon t'as pas encore de copine… moi, si tu veux, hé…

La femme se leva après avoir fouillé dans son sac, allait-elle partir maintenant ?. Le teint livide, le regard affolé, elle semblait hésiter à partir, devait-il aller vers elle pour l'aider, oui mais à quoi, comment, pourquoi, il flairait la détresse, l'égarement de cette femme d'un autre milieu que le sien, d'un autre univers. Désemparé, envahi par des questions se bousculant au portillon de son cerveau, Apollon fit un pas timide en direction de Jeanne qui, se rasseyant, portait un téléphone mobile à son oreille. Il stoppa son élan. Allait-il, fallait-il, intervenir ?. Il préféra s'éloigner, se retirer de son champ de visoin, qu'allait-elle penser de lui ?...

Il avait toujours rêvé de venir en France depuis que son père lui avait parlé de ce qu'il croyait un paradis, son père grand admirateur du siècle des lumières, étudiant à la

Sorbonne, ayant vécu les évènements de mai 68, l'occupation de l'Odéon, pris dans des rafles, menotté, insulté, battu, victime du racisme ambiant contre les arabes, bicots, ratons, bougnoules, bananias et autres nègros. Apollon avait donc quitté son village au bord du désert pour rejoindre un paradis vite transformé en enfer quotidien, délaissant aussi la promise, belle et chère amie d'enfance, autre déchirure ; il ne se plaignait cependant pas et n'avait nulle envie pour l'instant de retourner là-bas malgré les suppliques de sa mère dont il embrassait la photo tous les jours à son réveil, malgré son quotidien accablant, il ne pouvait expliquer pourquoi, une attente ?, un signe, un espoir ?...

Il avait eu une aventure amoureuse de quelques jours avec une dame plus âgée que lui, issue de la haute société comme on dit, la femme d'un avocat célèbre, rencontrée quelques mois avant sa mort, une femme qui avait ressenti, lui disait-elle, comme un appel vers quelqu'un d'autre, vers lui, elle s'était offerte spontanément, simplement, sans provocation, comme un cadeau qu'elle lui faisait autant qu'elle le faisait à elle-même, Virginie, un après-midi à l'hôtel elle s'était confiée brièvement à lui, une sorte de confession, elle lui avait avoué qu'elle n'avait jamais aimé quelqu'un aussi fort, jamais ressenti si impérativement ce besoin charnel et affectif, qu'elle avait joui pour la première fois de sa vie d'où sa surprise, mon premier orgasme Apollon mon premier tu comprends…

… il avait eu un geste de tendresse tandis qu'elle pleurait dans ses bras; il revoyait sa stupéfaction quand pour la première fois, dans cet hôtel où on acceptait les noirs, elle découvrit sa façon si tendre de lui faire l'amour et elle de lui répondre aussi passionnément, Virginie : faible, fière, femme, qui à la fin de leur dernière rencontre (elle entrait le lendemain à l'hôpital) lui offrit une montre dont elle avait bloqué les aiguilles à l'heure de leur dernier rendez-vous.

- tu penseras à moi tous les jours à cette heure-là

- je n'aurais pas besoin de votre montre pour cela

Il y pensait souvent… Il voyait à présent cette femme  téléphonant, son air inquiet, la panique sur son visage, elle se levait, semblait venir vers lui… Il revoyait Virginie, sa silhouette, ses attitudes, ses gestes… Une personne arrivait, une jeune fille semblait-il, qui se précipitait dans les bras de la femme dont la silhouette, les attitudes, les gestes, non, ce n'était pas possible… il s'éloigna de nouveau.

(à suivre)

14:22 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (1)

17/06/2010

HÉCATE TOMBE

Je ne comprends pas toujours pas pourquoi mes parents m'avait affublé d'un prénom pareil, vous vous rendez compte, Hécate, divinité lunaire et infernale, la déesse aux trois têtes, moi qui maintenant a du mal à garder la mienne intacte après tant d'années ; j'avais eu beau leur demander le pourquoi du comment, je n'avais eu que des réponses évasives du genre le hasard ? mais ce n'est même pas au calendrier il n'y a pas de sainte Hécate alors ? réponses embarrassées, une lubie ?, un film ?, une lecture ?, elle n'est même pas citée par Homère dans l'Iliade et l'Odyssée, alors celle d'un roman de Pierre Jean Jouve racontant l'aventure de Catherine Crachat une actrice de cinéma, une connaissance plus approfondie sur la divinité protectrice ou celle de l'ombre et des morts, l'attirance pour une sorcière aux pouvoirs redoutables, l'attraction vers une magicienne, aucune de ces suppositions ne trouvait de réponse plausible, seulement un air gêné Maman tricotant encore plus vite l'interminable écharpe, Papa tirant encore plus fort sur sa bouffarde jamais éteinte, leure regards encore plus fuyants, mais enfin… silence radio, je n'avais jamais pu rien en tirer. Dans le village, on ne se souvenait que de mon prénom : hein ? Hécate qui ?, Hécate comment ? , Hécate c'est tout, t'es quitte !.

Lors de mes premières lointaines amours, mon prénom interrogeait et intriguait mes soupirants puis mes amants, l'un d'entre eux fit même des recherches dans la mythologie grecque et ne trouva rien d'intéressant à son avis, le mystère restait entier, j'en vins à l'oublier petit à petit. Puis je connus un musicien qui avait aussi un problème de prénom accolé à son nom, vous le connaissez, Justin Peticoup, mais ça faisait marrer tout le monde alors que Hécate tu t'éclates Hécate tu m'épates Hécate je t'attrape Hécatapulte Hécatastrophe Hécatéchisme Hécataleptique Hécatamaran Hécatogan Hécatégorique Hécatelescuisses Hécatwoman Hécatmandou Kitécate… j'avais parfois envie de flinguer tout le monde ; à seize ans un petit connard lâcha un jour Hécatombe devant tout le monde à la fête paroissiale, il a pas vu le coup de pied partir dans ses couilles et remonter jusque dans sa gorge qui saignait, il a mis du temps à s'en remettre, pas moi mais l'idée m'était venu : ça allait être leur fête, les choses sérieuses allaient donc pouvoir commencer, mes amoureux n'avaient qu'à bien se tenir.

Quand on a retrouvé Victor pendu dans la grange sous la haute poutre sans tabouret, personne n'a pensé à moi, quand on retrouvé Julien avec une fourche dans le bide, le Jacquot allongé décapité dans le fossé, Fernand avec une hache dans le dos, Augustin dans sa cambuse bouche, yeux cousus et oreilles tranchées, Bastien dans l'écluse sans ses attribus virils, le corps truffé de gros plomb de Robert le braconnier à l'orée du bois, l'abbé Gilles nu dans le confessionnal une étole serrée autour du cou,  mon préféré le Bernard plus beau qu'un dieu mais plus con qu'un balai massacré les bras en croix sur la belle pelouse de M. le comte qui s'égosillait les salauds les salauds, le petit Nicolas à la langue trop bien pendue le crâne défoncé profond, Riton le pompier affalé dans la cour de la caserne son gros zizi dans la bouche, un marinier de passage, Romain, enchaîné à la proue de sa péniche, Paulin le fils du boucher éventré avec ses propres couteaux, la Colette fille de la mercière toute recroquevillée et entravée de partout, Bernard le métayer comme piétiné par ses vaches pourtant si paisibles, Maurice le bavard éparpillé menu dans les arbres façon puzzle, Henri le cordonnier assassiné au tire-point façon Lacenaire, Germain le bûcheron homo enculé par un pieu le long de la clôture du cimetière, Michel écroulé sur son poêle à gaz ouvert sans feu, Gérard le droguiste le corps dévasté dans une cuve d'acide, Vincent le gentil petit commis-boulanger cramé dans le four à pain, Arsène le garagiste obèse coincé mort sous une auto le cric étant retombé sur lui comme par hasard… personne, personne n'a pensé à moi. Et pourtant tous mes gentils amoureux, amants, béguins, flirts, galants, et autres soupirants d'un jour aux plaisanteries douteuses s'étaient retrouvés dans ces situations pour le moins inconfortables…

Un jour à l'épicerie quelqu'un me trouva une petite mine, l'air plus fatigué que d'habitude : vous travaillez top mademoiselle Hécate, faudrait voir à vous reposer maintenant, ah vous avez lu les journaux et la télé régionale, la série continue dans le canton, les gendarmes ne trouvent rien, ça commence à jaser parce que tout le monde a peur et se demande si… il y a vraiment des malades j'vous jure, un tueur en série par chez nous, vous vous rendez compte, c'est pas concevable, ça va pas mademoiselle Hécate vous êtes toute pâle ce n'est rien heu je vais… elle n'a pas l'air bien notre préposée, ah la poste ! maintenant avec ces réformes faut toujours en faire plus pour  gagner moins, encore heureux qu'on l'a pas délocalisée comme c'est la mode qu'on peut plus toucher nos pensions chez nous.

 

P-S :

Quelques mois plus tard, un fait-divers fut relaté dans le journal local : en voulant nettoyer les carreaux de la lucarne de sa petite maison, la postière du village glisse de son échelle ; ne pouvant se retenir, mademoiselle Hécate tombe malencontreusement  et… décède sur le champ.

On retrouva dans le bonnet gauche de son soutien-gorge une liste impressionnante de prénoms masculins.

©  Jacques Chesnel




















19:40 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

12/06/2010

CONVERSATION 23

- oh! vous avez vu la Lolo Ferrari avec son voile à la télé

- oui ohlalala pour l'interviouve de Armani-et-Jade le tyran de la perce en Iran, c'est bizarre quand même

- surtout qu'on veut interdire le voile du nu intégral en France et que les femmes là-bas elles voudraient bien l'enlever que c'est obligatoire et puni de coups de fouet au derrière

- p'tête qu'il a dit aux gars de la télé, bon pas de voile sur Lolo, pas d'interviouve et que les gars ont dit bon d'accord à vos ordres chef

- attention hein, c'était un voile de classe pas à la vapeur

- avec une mèche bien blonde qui dépassait que le mec arrêtait pas de reluquer pasque pour les barbus les cheveux et les poils c'est de l'érotique, c'est pour ça qu'ils en ont partout bien visibles sur eux pour plaire aux femmes

- elle aurait dû mettre un voile du nu intégral avec une grille devant les yeux comme dans l' Affreuxquistend pasque là-bas avec les talibans c'est pas des rigolos qui transigent

- pourquoi qu'on leur balance pas une bonne vieille bombe anatomique sur le coin d'la gueule à ceux là, boum comme au vietname, allez hop en deux coups de plastic à pot hop on en parle plus du mollard Homard et la compagnie de l'Ailquidada

- oui mais à côté ya le Pasquistend et d'autres patelins qu'on connaît pas et qu'on contrôle pas du tout

- pendant ce temps c'est attentat sur attentat et nos p'tits gars qui sautent hein ?, qu'est-ce qu'on fout là-bas, c'est-y pour écouler nos armes et en reconstruire pour faire marcher le commerce et tourner les usines de nos armements, Maurice arrête pas de se poser des questionnements

- ben voui, si yavait eu la bomba en quatorze dix-huit, on aurait pu récupérer nos poilus plus vite

- vous voulez dire nos barbus comme l'autre, vous avez vu ce qu'il est tout petiot, Sarkozy à côté on dirait un géant sans ses talonettes et pourtant

- à propos y paraît que c'est plus le grand mamour-cours-toujours avec la mère Merkel qu'il arrête pas de la tripoter ma copine par-ci Angela ma copine par-là Angela que moi je s'rais Carlita je me demanderais si

- entre les deux ya pas photo, moi j'aimais mieux Cécilia elle avait du caractériel quand elle faisait la tronche, le petit bronchait pas, elle te minaudait pas le chouchou elle au moins

- tous les goûts sont dans l'immature

- j'y reviens, encore heureux qu'on lui voyait pas les seins à not' Lolo

- ça aurait pu faire un accident diplomaticaire grave pasque le gars se marre pas tous les jours j'vous dirais

- Maurice qui ne pense qu'à ça se demande ce qui ya sous le voile du nu intégral de ces bonnes femmes, il voudrait aller vérifier par lui-même le fûté

- y paraît qu'elles sont habillées et maquillées comme vous et moi, j'peux vous dire qu'elles font pas leur emplettes à Monoprix ou chez Lideul, quand elles viennent à Paris bonjour les grandes marques pas les grandes surfaces

- et pour les godasses, elles ont le droit aux hauts talons ?

- ben elles se cassent la margoulette comme les autres

- et elles ont le droit de conduire ?, pasque chez nous c'est puni par le code de la route

- on sait pas à cause de la censure et on voit rien à le télé dans les rues noires du monde tout en vert

- et en plus on dit qu'en douce elles font quand même comme nous avec nos bonshommes, et bonjour la craquette voilée

- manquerait plus qu'ça, faut bien repeuplier la natalité

- avec ou sans le voile, où ya pas de la gêne ya du plaisir comme dit Ribéry

- comme dit Maurice quand Ribéry rit Ribérygole Ribérycane Ribérygolo Ribérygide Ribérygodon Ribérypaille Ribérygoriste Ribéryquiqui et à la fin Ribéryposte mais pas avec la main lui

- bon c'est pas tout ça et si on s'faisait une petite Marie Blizzard

- allez hop, comme là-bas, à la vôtre

- tchine


©  Jacques Chesnel

 

18:59 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

11/06/2010

LE PARI DE JEANNE -5

 

LE PARI DE JEANNE (suite)

5/ Raoul

Raoul Robin, avocat réputé, grand orateur, fin bretteur, Bâtonnier de l'Ordre (RR ou Doublair pour les intimes ou les professionnels de la profession ou encore Double Blair pour d'autres, Robin des Bois pour le monde de la pègre) est le père de Jeanne, veuf depuis plus de dix ans de Virginie, une femme merveilleuse et tant aimée de tous, surtout de lui, veuf inconsolable et inconsolé. Petit, soignant méticuleusement mais vainement son alopécie, l'embonpoint seyant, affable, débonnaire, ne rechignant pas à raconter une bonne blague, faire un bon mot lors de banquets où il se tient mieux que bien à table, RR, amateur d'art, collectionneur, possèdant quelques Boucher, deux Goya et un Delacroix, pas d'art dit contemporain sauf un petit tableau de Nicolas de Stael acheté dans une brocante, grand lecteur détestant Proust et adulant Faulkner, aimant toute la musique classique mais allergique à Bach sauf interprété par Glenn Gould, n'avait pas accepté le mariage de sa fille avec Franck qu'il prenait pour un artiste de seconde zone, un parvenu que la communication complaisante et l'affairisme avait porté au pinacle (presse spécialisée, chaînes de télé) bref, un connard tout simplement, affirmait-il dans le privé. Il appréciait encore moins sa liaison avec ce Louis, cet homosexuel ayant trempé un temps dans des affaires de détournements de mineurs, un comble pour ce magistrat  sans reproches et bien-pensant qu'il prétendait être, à juste titre pensait-il. Lors du divorce de Jeanne, il avait œuvré pour que sa fille en sorte avec le maximum d'avantages financiers, la mettant ainsi à l'abri des intentions présumées malfaisantes de son gendre honni et des malversations présumées de son amant honni autant. Et voilà bientôt quatre mois que Robin des Bois n'avait plus de nouvelles, depuis qu'elle s'était entichée de ce Louis jusqu'à se mettre en ménage comme on disait naguère, il en fulminait...

Désemparé, un comble pour un homme comme lui, il ne savait que faire ni où se tourner pour demander avis ou conseil devant un cas inhabituel pour lui. Il tournait en rond dans sa carrée, fumait pipe sur pipe avec l'envie pressante de s'en faire tailler une pour l'hygiène, il avait des fourmis dans les mains tout en trépignant sottement, bref, il ne se reconnaissait plus, un comble, lui si calme, pondéré, maître de lui, quelque chose d'inconnu, une sorte de changement involontaire, allait-il devenir incontrôlable, le comble pour un con, pensait-il. Il appela son assistante ; lorsque Armelle entra, il avait déjà baissé son pantalon jusqu'au chevilles avant qu'elle s'agenouille.  Le téléphone se mit à sonner. "Nom d'une pipe", éructa-t-il en repoussant doucement Armelle et se rajustant vite fait.

C'etait Jeanne. Il avait du mal à reconnaître sa voix hésitante, hachée, saccadée, entrecoupée de sanglots, ce bruit non identifiable en arrière-plan, Papa je, quoi ? Papaaaa, coupure, rappel, Papa je ne sais pas je ne sais plus, j'arrive Jeanne où es-tu, je... terminé... plus rien. Doublair, affolé, s'aperçut qu'il n'avait plus son numéro de portable, elle avait appelé d'une cabine ? ou d'un café ?, celui où Vincent Lindon était barman ? il pensa rappeler Eric qu'il avait défendu quand, ado paumé, il avait été embarqué dans un braquage de banque avec prise d'otages, quel était le nom de ce café-bar-tabac, Armelle lui souffla Le Darrigade là où se réunissent les amateurs de vélo le dimanche matin. Raoul regarda la photo de Virginie sur son bureau, revit le visage de Jeanne identique à celle de la disparue, cette ressemblance trait pour trait, expression pour expression, caractère semblable, difficile parfois, exaspérant souvent, Jeanne, ma fille on ne se refait pas tu sais.

Il se souvenait de son enfance fut difficile, son adolecence pire, ses problèmes réels, supposés, inventés, ses engagements q'il ne comprenait pas, mais malgré tout cela, une fraîcheur, une générosité, une disponibilté, un élan vers les autres, ses contradictions, en un mot un amour de fille. Il pensa tout d'un coup à cette phrase de Faulkner lue et qu'il avait soulignée dans une de ses nouvelles on n'aime pas parce que mais malgré ; pas pour les qualités, mais malgré les défauts...

Oui, c'était cela avec Jeanne, il n'avait jamais su quoi faire et s'interrogeait, avait-il été un bon père, que lui reprochait-elle, comment le savoir, question qui l'obsédait, le passé dont on ne peut faire table rase et dont des faits qu'on croyait oubliés depuis si longtemps vous sautent à la figure, vous prennent à la gorge subitement. Et maintenant, tout de suite, que faire ?. Sans nouvelles depuis plus de trois mois calculait-il, se souvenant du dernier accrochage/décrochage/dérapage qui avait pu laisser des traces de part et d'autre, des séquelles irrémédiables, Raoul, entre deux préparations de plaidoirie envahissante, se décida à appeler sa fille sans grand espoir de réponse. Il récidiva plusieurs fois, toujours occupé, absence de réseau, laissez votre message, pfffuittt... il y a longtemps qu'il ne disait plus merde mais il le pensait, fort, merde et remerde.


...(à suivre)


01:06 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

07/06/2010

UN FILM

le jour se lève...

le point du jour, le règne du jour, les démons de l'aube, la ronde à l'aube, à chaque aube je meurs, cela s'appelle l'aurore, contre toute attente, quartier sans soleil, les affranchis, le bal des vauriens, la valse des truands, au royaume des crapules, affreux sales et méchants, querelle, les assassins sont parmi nous, nous sommes tous des assassins, haute pègre, l'emprise du crime, le démon des armes, règlement de compte, la règle du jeu, haines, la horde sauvage, la cité des dangers, main basse sur la ville, rendez-vous avec la peur, face au crime, forfaiture, le fond de l'air est rouge, le cri de terreur, le refroidisseur de dames, les mauvaises rencontres, les visiteurs du soir, la nuit de la vengeance, crime passionnel, graine de violence, la soif du mal, descente aux enfers, plus dure sera la chute, ici commence l'enfer, l'ange exterminateur, répulsion, un après-midi de chien, le faux coupable, l'homme qui en savait trop, les tueurs dans la ville, je suis un évadé, le démon s'évade la nuit, l'homme aux abois, les flics aux trousses, la mort aux trousses, en quatrième vitesse, la grande vadrouille, la poursuite dans la rue, la poursuite impitoyable, mortelle randonnée, panique dans la rue, que la bête meure, le carrefour de la mort, l'inspecteur ne renonce jamais, soupçons, les flics ne dorment pas la nuit, les ripoux, ronde de nuit, les forbans de la nuit, dans la gueule du loup, rue sans issue, les ruelles du malheur, la souricière, péril en la demeure, l'impasse tragique, panique, l'homme perdu, l'introuvable, le troisième homme, délit de fuite, le tournant décisif, ne vous retournez pas, la chute d'un caïd, plus dure sera la chute, vers sa destinée, l'inexorable enquête, le seul témoin, l'ombre d'un doute, l'incroyable évasion, un homme marche dans la ville, le témoin doit être assasiné, j'ai engagé un tueur, pacte avec un tueur, sans pitié, le prix d'un homme, celui qui doit mourir, une balle signée x, crime sans chatiment, un meutre sans importance, une sale histoire, sans lendemain, la foule hurle, un cri dans la nuit, hors d'atteinte, passage secret, le refuge, les clameurs se sont tues, quand la ville dort, la ville gronde, angoisse dans la nuit, au cœur de la nuit, éclair de lune, la lumière d'en face,  dans la chaleur de la nuit, les amants de la nuit, j'ai pas sommeil, une heure près de toi, un si doux visage, regards et sourires, la fièvre au corps, le plaisir, désirs humains, le grand frisson, la fureur de vivre, torrents d'amour, la nuit nous appartient, la dernière nuit, étreintes brisées, le grand sommeil, le temps s'est arrêté, le monde du silence, nous nous sommes tant aimés, une passion, l'heure des adieux, le bonheur est pour demain, la ligne du destin, adieu ma jolie...

... autour de minuit.

- les titres des films étrangers sont donnés dans leur traduction française par les distributeurs ; exemple: Le prix d'un homme / This sporting life ; Quand la ville dort / Asphalt Jungle


© Jacques Chesnel  (6 juin 2010)




19:23 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

24/05/2010

INCIDENT CANIN


(à Roba, à Boule et à Bill)


C'est pas lui qui va m'empêcher de "tirer" comme il dit, parce que d'abord c'est lui qui marche de moins en moins vite avec son allure cloclopinante, alors voilà oui je tire, bon ça me blesse un peu avec ce nouveau collier, je préférais l'ancien comme d'habitude mais elle elle veut toujours le dernier modèle pour faire chic, est-ce que je discute de ses colliers à la con à elle non de ses bagouses de vieille mémé à elle non, tiens je vais tirer encore plus fort et puis re-tiens voilà un joli réverbère je lève la patte hououou purée que ça soulage mais c'est lui qui continue à marcher et donc c'est lui qui tire ce duconlajoie s'il pouvait se casser la gueule une bonne fois peut-être que ça lui apprendrait, bon alors tu viens qu'y m'lance méchamment je viens si je veux j'ai encore le droit de pisser oui ou merde eh ben re-re-tiens je vais me mettre à courir comme si j'avais vu un putain de matou dans le coin et hop au galop gros canter mon pote je repasse devant et là je re-tire comme un malade en prenant l'air affolé la truffe en l'air les oreilles en hélices la queue toute vibrionnante je fouette comme un lévrier devant le lapin-leurre au cynodrome allez coco ça s'essouffle derrière ça ahane ça rabote ça coince ça dérape ça s'étrangle ça tout ça en même temps dans l'coincetôt et moi stopppp des quatre fers des papattes maintenant c'est pour le caca mon caca à moi un gros bout d'boudin tout noir et tout chaud que j'extirpe avec moult satisfactions et délices aaaaah bon dieu de bordel de merde quel soulagement quel pied d'autant qu'il a pas fait attention et bingo en plein dans sa godasse du pied droit occupé qu'il était à reluquer une gamine prépubère sur le trottoir d'en face qu'il en manque de tomber et se raccroche tant bien que mâle à une dondon dodue qui l'enguirlande non mais pour qui vous vous prenez vous pouvez pas faire intention il s'excuse et piteux fait semblant de fouiller dans sa poche pour sortir un sacàcrotte qu'il a oubliè comme d'habitude et que la grosse lui dit c'est du propre vous allez ramassez ça tout de suite quand même c'est honteux et moi je lui balance un sourire canin-câlin de derrière les fagots si c'est pas malheureux avec un si gentil p'tit chienchien que je refrétille grave de l'arrière-train-train d'autant qu'elle se baisse s'accroupit me prend dans ses bras et que j'te la léchouille un bon coup avec un goût de fond de teint bon marché que je lui débarbouille la margoulette ohohoh qu'elle jouit ahahah et lui aimable laisse donc la madame tranquille voyons il me prend au colbac alors je montre les crocs en grognant grrrrrrr à tout berzingue et la grosse recule il est pas méchant au moins on dirait pas comme ça faut toujours se méfier une voiture passe s'arrête et un quidam éméché lui balance t'es pas dans la merde dis donc avec ta bonne femme quel cageot et avec ton clébard à deux balles qui chie partout alors je me retourne ta gueule connard je fonce sur l'aile arrière de sa bagnole que je lui griffe fort et raye profond qu'il en sort de la tire en beuglant on va faire un constat t'es pas dans la merde toi non plus mon pote pendant que j'aboie il hurle couché le clebs que j'aboie plus fort encore du calme monsieur on va arranger ça je suis assuré voyez-vous et moi furieux je te chope une guibole du micheton j'attaque d'emblée sur le falzar que vraaac je déchire sur une bonne longueur tandis que de l'autre jambe il m'envoie un coup de pied dans le ventre que j'esquive en jappant encore plus fort tandis qu'ayant loupé sa cible il ne peut éviter ce qui reste de mon cadeau tartiné fumant et ô combien odorant sur le trottoir en rippant et s'étalant de tout son long en plein milieu plaffff devant maintenant un petit attroupement provoqué par tout ce bazar vociférant et hurlant avec rires ou grimaces amusement ou compassion discussions ou atermoiements et moi pendant ce temps j'en profite pour me barrer vite fait bien vu car en pleine altercation sévère avec l'autre tordu avant peut-être les coups qui sait ? il a lâché bêtement la laisse et me voilà maintenant parti batifolant musardant fôlatrant gambadant papillonnant baguenaudant... que ma vie de chien est belle lalala lalalère... et youpiiiii... you, c'est pas de sitôt qu'on va me rattraper, tu peux toujours courir !.


©  Jacques Chesnel


12:00 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

19/05/2010

CONVERSATION 22

- j'me sens pas bien moi en ce moment

- keski va pas ? keski vous chiffonne ?

- tout, la santé de Marcel qui perd la boule, et encore j'vous parle pas de les p'tits enfants qu'auront plus droit à la fessée intedite, not' président qui navigue à vue basse avec nos retraites que ça va bientôt péter et maintenant la Grèce qui dégraisse de l'euro, la mère Merkel qui joue perso, les angliches qui savent plus où donner d'la tête avec leurs rérections Cordone-JohhnyClegg-Camerone et maintenant les belges qui se séparatisent pour les langues,le volcan Beurkmachintruc qui érupte qu'on sait plus quoi faire de ses cendres, Giscard qu'a le feu au cul dans un livre avec une princesse morte, les jeux à la con les pubs à la con à la téloche à la con qu'heureusement ya Lagaf' à la con et le juste prix que c'est faux, la Bruni qu'a reperdu sa voix qu'elle avait pas avant, le gars Borlot qui fait sa courbette devant un chinetoque qui s'bidonne comme un malade parce que l'autre a cru que c'est un japonais...tout quoi, tout j'vous dis pas...

- hola vous allez pas donner dans le pessimisse ambiant, bon pour Marcel je compatis parce que c'est unsubmersible malgré les nouveaux traitements mais pour le reste on a vu pire, au moins ya plus de guerre intestinales, maintenant tout le monde regarde arté la nuit, on peut lire les vacheries du président JFK pas mort et ressucité qu'écrit  dans le journal de Marianne, la Nadine Mormoilafort qui veut qu'on baise plus pour augmenter la taxe de natalité et celle du carbone pour réduire ainsi le trou de balle de la sécu, Johnny qui va enfin payer ses impôts en retard chez nous comme Alain Prost et les autres planqués, bientôt l'essence à trois euros le litre comme ça y aura plus de circulation plus de ces foutues bagnoles et qu'on va remettre les fiacres avec des vrais chevaux et du crottin pour nos p'tits zosiaux, Niet-à-mi-août qui fait copain-copain avec les gars de la Ramasse de Palestine, Poutine qui se marre tout le temps comme le chef de not' gouvernail à Matignon, Dany le Rouge qui voit tout en vert et Mélangeson tout en rouge... tout ça...

- vous voyez ça par le grand bout de la norgnette mais si vous matez par le p'tit bout hein ? vous voyez bien qui qui va payer le pavillon français à la foiratout d'empoigne de Changaï aïe aïe, l'avion présidentiel avec un four à pizza, les voyages en djette privé pour tous les misinistres, la robe déchirée de Milène Farmeur qu'on peut pas réparer, les doses de vaccin foututes de la Roseline Bachelor qui rit jaune, les pots-de-vin des frégates de je sais pas d'où au nom imprononçable, le bouclier fiscal de la France d'en-bas qui se relève et le RSA de celle d'en-haut qui s'abaisse, les retraites des p'tits vieux qui veulent plus mourir avant cent ans que maintenant y en a trop qu'on sait pus quoi n'en faire et aussi... les robots si jeunes et des japonais qui vont remplacer les caissières des supermarchés qu'auront pus de boulot, les grèves qui se généraliseront et le généraux qui s'mettront en grève, la semaine de cinquante heures et les congés payés gratuits, canal + qui retransmet le jour du seigneur à la place du porno, Eric Besson ministre de la Culture et des OGM, on reconstruit la ligne Maginot et on imagine des nouvelles armes de construction massive, tous les pays possèdent la bombe anatomique pour pas s'en servir, les usines qui ferment et les bordels qui vont rouvrir, Ribéry ne rit plus dans le Berri, Domenech ne dit plus que des conneries et Thierry Henry passe la main ailleurs, pour protester contre la burqa les jeunes bonnes sœurs optent pour la minijupe et les vieilles pour le porte-jarretelles, les minettes mettent des strings par-dessus sur leurs culottes, le plan de rigueur dépasse la rigueur du plan, Luc Chatel retourne chez Oréal  et le petit Bertrand dans les assurances qui n'en veulent plus parce que mais, les appartos de Christian Est-ce-trop-de-zizi, les volcans d'Auvergne piquent des crises de jalousie pour se réveiller, on a volé le tapis rouge du festival de Cannes que les vedettes savent plus comment monter dessus, Gaspard Proust et Stéphane Guillon ne flinguent plus à tout-va-rien-ne-va- plus, les bourses qui plongent profond et rien qui remonte, la marée noire qui vire au rouge et vous voulez qu'on soye contentes si vous voyez ce j'veux pas dire qu'il y en a tellement tous les jours de nouveaux qu'on sait pus où donner de le têêêête...

le téléphone sonne

- allo oui c'est moi... long silence... vous êtes sûr... bon, merci... c'était la clinique pour Marcel, y se sont gourrés dans le cliché irréel et iréhème des photos du crane avec un autre malade, c'est pas la panne des sens dans l'ciboulot qu'il a, c'est juste un cancer du mal au foie qu'est maintenant tout juste guérissable avec les dernières volontés...

- ah ! vous me rassurez pasque...

- allez, on va fêter ça, vous reprendrez bien un doigt de porto

- et même deux pendant qu'on y est... santé

- tchine


©  Jacques Chesnel







19:19 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

16/05/2010

LE PARI DE JEANNE -4

4/ Jérôme

Un homme criait sur le trottoir la tête dans les mains.

La manif' avait été géniale, beaucoup de monde, peu d'incidents graves, quelques bousculades, beaucoup de cris, le nom du ministre conspué scandé à l'infini, les panneaux explicites sur l'exploitation des migrants, les marchands de sommeil, les centres de rétention et de détention, le gouvernement et sa politique arbitraire et répressive, nombreux contrôles d'identité et interpellations sous les huées lazzis et sifflets, il avait répondu aux supplications de Jeanne reste calme je te connais ne réponds pas aux provocations ne t'emballes pas tu es un impulsif. Jérôme sourit car il savait que sa mère dans sa jeunesse avait souvent débordé pour d'autres causes aussi recevables que celle-là.

Jérôme s'approcha du type, ça va monsieur ça va ? il lui toucha le bras que l'autre baissa, Jérôme le reconnut immédiatement l'amant de sa mère l'homme pour qui elle avait quitté papa et... il eut un geste de recul ; Louis lui fit un comme signe d'apaisement il savait par Jeanne ce que le jeune homme ressentait à son égard peut-être même le comprenait-il. Allaient-ils enfin pouvoir parler ? essayer de se comprendre malgré la situation incompréhensible pour le jeune homme ?. Eric était sorti du troquet et leur demanda gentiment mais fermement  de rentrer ce que refusait Jérôme crispé buté anxieux ; Eric insista bon cinq minutes... qui durèrent deux heures.

- Crois-moi, j'aime ta mère, je n'ai jamais connu quelque chose d'aussi fort avec quelqu'un, jamais, je pourrais te le jurer si tu veux quoique...

- Non, ne jurez pas... mais... avant

- Avant elle oui, je ne vais pas te raconter ma vie, j'ai toujours été attiré par les garçons, j'ai mené une vie dissolue de drague, d'aventures multiples, puis j'ai vécu longtemps avec un homme que j'ai cru aimé quand j'ai rencontré Jeanne par hasard à un bal

- Mais bordel, comment vous croire, je n'y arrive pas, c'est impossible, vous qui

- Je ne l'explique pas, je ne cherche pas à comprendre surtout maintenant que

- Que quoi ?

- On s'est engueulés, j'ai... elle est partie

- Partie ? partie, où mais où ?

Vincent Lindon arrivait avec des verres et mit la main sur l'épaule de Jérôme qui déjà n'écoutait plus les paroles de Louis, il avait décroché, maintenant plus rien ne comptait que Jeanne, il se revoyait au mariage de ses parents quand il avait sept ans, Maman tellement belle dans sa robe si compliquée dans la simplicité l'air conquistador moustachu de Papa l'excitation de sa sœur des cousines et de ses copines, les questions qu'il posait et pourquoi comment qu'est-ce que et le curé qui le regardait d'un œil affamé les jets de grains de riz et pétales de fleurs les flashes des photos les reporters de la télé régionale pour le héros du jour célèbre créateur de mobilier contemporain réputé la fierté arrogante de la belle-famille la réserve affichée pour ne pas dire la triste tronche des grands-parents hostiles ça ne marchera jamais on en reparle dans deux ans les applaudissements et vivats de la foule le repas somptueux surtout le gros gâteau dégoulinant à cause de la chaleur la partie de cache-cache dans le parc les cousines qui cherchent à l'embrasser et à l'entraîner sous la table pour faire quoi et Maman Maman toujours elle ça va mon grand et Papa ne t'énerve pas trop tu vas encore avoir de l'urticaire et... ...comme un éblouissement crois-moi Jérôme j'ai été le premier surpris de ce qu'il faut bien appeler un coup de foudre il entendait Louis pérorer il s'en foutait de ses pleurnicheries ce qu'il voulait savoir où est Maman bon dieu de merde dites-moi ce que lui avez-vous fait pour qu'elle parte de cette façon si inhabituelle chez elle qui ne s'emballe jamais sauf... on a eu des mots au sujet de ma prise de position au sujet de la scientologie une secte Louis disait-elle c'est une secte tu ne vas pas tomber dans ce piège pas toi comme l'autre Tom Machin-Ducon pas toi quand même ressaissis-toi elle était déchaînée elle hurlait et moi aussi plus fort et maintenant la scientologie une nouvelle lubie après les francs-maçons et puis quoi encore Louis mais c'est pas vrai et au comble de la colère elle lâcha en plus ils n'acceptent pas les pédés dans un geste que je ne m'explique pas j'ai levé le bras comme pour... quoi la frapper vous avez voulu la frapper frapper Jeanne ma mère on est en plein méli plus que mélo ce n'est pas crédible qui peut avaler une connerie pareille hein ? pire qu'une mauvaise série télé soap opera débile sur une chaîne commerciale de merde scénario minable d'un film de série XYZ d'un roman de gare série rose du sous-Delly du pseudo-Paul Bourget tous deux désuets et risibles le tout torpillé par une critique littéraire unanime pensait Jérôme à la pâleur inquiétante qui se mit si rapidement debout comme pour...une fois de plus Vincent Lindon intervint allons allons... il posa sa main rassurante sur les épaules du jeune homme allons.


...(à suivre)...



10:52 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

06/05/2010

MONSIEUR LE DIRECTEUR

Comme d'habitude à cette heure-là, après les consultations et les soins, aux alentours de18 heures, Monsieur le Directeur se dirige de son pas chaloupé vers la salle de conférences dite salledeconf' pour le briefing de fin de journée. Grand, portant beau malgré les prémices d'une soixantaine bien assumée, impeccablement vêtu sous la blouse immaculée, Monsieur le Directeur, toujours souriant et affable, salue les membres du personnel qu'il croise dans le couloir et s'arrête volontiers pour dire un mot toujours aimable aux patients qui déambulent, alors Madame Beaulieu la sieste a été profitable et vous Monsieur Lamarche quelle mine splendide, excusez-moi Monsieur Aristide mais on se voit demain plus longuement aux sujet des chauve-souris chauves hein ?... docteur pressez-vous s'il vous plaît la réunion est commencée. A son entrée, le personnel se lève, applaudit, Monsieur le Directeur sourit quel est l'ordre du jour Mademoiselle Virot, tout le monde est là ?, bon...

La réputaion de la clinique venait principalement de la grande liberté laissée aux malades alors que se pratiquait encore par ailleurs des normes et règles trop strictes contraires à l'évolution de la psychiatrie actuelle ; néanmoins on ne manquait pas de critiquer ces nouvelles méthodes notamment en ce qui concerne les thérapies comportementales et cognitives face aux affections organiques comme les syndromes confusionnels ou démentiels, les modifications du caractère et/ou du comportement, les manifestations délirantes ou hallucinatoires.

La personnalité du Professeur M. O., le directeur, était bien celle qui avait réussi à hisser cet établissement au sommet dans le relevé que publiait annuellement le ministère de la santé. En raison de cette autonomie laissée aux malades, le bouche-à-oreille avait fait que maintenant la liste en admision était d'une longueur impressionnante, on refusait du monde. Aussi pouvait-on croiser dans tous les couloirs des trois étages des cinq bâtments situés dans un vaste parc bien entretenu une foultitude de personnages dont certains en costumes d'époque ce qui faisait dire à quelques malveillants de visiteurs que décidément cette maison de fous était tenue par des dingues, une belle bande de sinoques et de mabouls en tous genres.

Ainsi une Aggripine la Jeune (43 ans) était toujours flanquée de son Néron de fils (8 ans) avec une lyre dans une main et un briquet dans l'autre, une Jane Birkin aux seins à la Lolo Ferrari chantait du Franck Michael à tue-tête sans poser de problèmes à un Alain Finkelkraut plus vrai que le vrai, Charlotte Corday et Marat s'ébattaient avec passion derrière des buissons très ardents, un Flaubert tirait des plans sur la comète avec une madame Bovary aussi belle que Juliette Binoche, Maurice Thorez et Marcel Déat jouaient aux échecs sans savoir y jouer, une princesse de Clèves minaudait avec un petit gars trépignant et continuellement agité des épaules, un Gérard Dipardiou maigre comme un clou sautait comme un cabri et lançait des petits papiers sur lesquelles étaient écrit ah! Margueritte ahah hein hein!, Socrate, Henri III et André Gide lutinaient les infirmières, Minou Drouet jouait avec un petit chat en peluche et Henti IV avec un cheval en bois noir, tous les prètres avaient quittés la soutane pour le kilt gaélique, un Jacques Chirac prenait douche sur douche toutes les cinq minutes, la mère Denis en string s'essoufflait dans les sentiers sur les traces du père Dupanloup en tenue de golfeur, Roberto Begnini était devenu muet et Bill Clinton fumait la pipe, une Mireille Mathieu devenue blonde était aphone et le cardinal de Richelieu adipeux et apostat, Pierre Laval portait l'étoile jaune et Mao-Tsé-Tung un col italien, un Richard Virenque lisait la bible et bénissait la foule à vélo, un boxeur thaï de 40 ans cherchait désespérément un partenaire et Louis XVI une guillotine en bon état de marche, un Xavier Darcos comptait sur ses doigts en faisant la règle de trois de ses deux mains et un Roland Dumas marchait nu-pieds, une Thérèse de Lisieux gambadait en nuisette sous l'œil réprobateur du divin marquis...bref, tout était pour le mieux dans le meilleur des mondes à la clinique "La joie pour tous", impasse du Désir Vibrant à Charenton sur le Lardon.

Au cours de la séance, sous la présidence de Monsieur le Directeur, on évoquait maintenant les problèmes habituels de petite intendance, ceux de la cuisine dont le chef ne donnait pas entière satisfaction auprès du personnel et des patients, la suppression de certains médicaments remis en cause par les nouveaux traitements et les déremboursements, bref le train-train habituel. Pas de discussion particulière, alors au moment de conclure, Monsieur le Directeur se leva et dit sur un ton docte: Mesdames, Messieurs, je vous remercie tous pour votre attention et conclurai donc cette réunion par ces mots (il commence à s'énerver): je sais que pour une femme, il est difficile de rendre un homme heureux (il s'agite) mais si ce travail vous paraît trop dur toute seule (il s'emballe) mettez-vous à plusieurs car vous savez n'est-ce pas qui  n'avance pas recule... (il hurle) et si vous voulez que je vous encule...(il vocifère) alors je dis merde à Freud et à Lacan et à tous ces psys avec  leurs théories à la con et...

Rémus et Romulus, les deux doux infirmiers jumeaux préférés des patients avec les plantureuses Thelma et Louise, qui attendaient sagement derrière la porte se précipitèrent dans la salledeconf' et empoignant avec précaution le Directeur redevenu soudain calme et docile allez Monsieur Michel, la fête est finie, on y va  maintenant c'est l'heure de la séance de soins intensifs qui vous font tellement de bien allez on y va Monsieur Michel là  doucement.... là... non... doucement.

©  Jacques Chesnel


11:26 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

30/04/2010

CONVERSATION 19

- oh ! keski vous arrive ?

- cétadire ?

- que si c'était pas vous, ben je vous aurais pas reconnute

- ah, c'est ça, vous êtes bien la seule, même Marcel qui

- quoi ? vot' mari n'a rien vu ou alors il vous regarde pas plus

- voilà, je me suis décidée à aller voir un chirurgien esthétique car j'en avais marre de toutes ces rides et ce qui dégouline avec, quand on voit toutes ces actrices alors je m'suis dit à mon tour pourquoi pas moi

- il vous a pas loupé, c'est un vrai miracle, racontez

- d'abord,  la consultattion de l'état général est obligatoire, exament complet avec l'estéthoscope et tout le tintouin

- tout ça pour le visage

- le principe de les précautions à cause des procès, puis le marquage, j'enlève là je rajoute ici sur l'esthéordinateur avec visuel précis que je me reconnaissais pas moi-même

- ah le progrès, la technique, l'esbroufe, tout ça, c'est pas pour vous piquer vot' pognon ?

- vous auriez vu les appareils, carrément impressionnant, du dernier cri américain de technique nucléaire de la nasale

- ça vous a pas fait un p'tit pincement au cœur

- le cœur me pince plus depuis mon premier infractus

- et il a pas trouvé de contre-indications à contre-courant

- pas entre le palpitant et la binette, pas pour l'escamotage résiduel et puis en consciencieux il s'est ensuite ravisé en disant qu'on pourrait d'abord essayer le botox en petites doses éparses

- du botox... mais c'est du toxique le botox ma chère

- non c'est rien qu'une toxine bucholique, un poudre blanche qu'on mélange avec du sérum psychologique et de la flotte qu'il m'a espliqué longuement pour rassurer si besoin

- donc vous avez eu une confiance aveugle, moi avec la poudre blanche, hum

- totale au vu des résultats sur les photos de vedettes, vous pensiez à quoi, à la cococaïne que sniffent certaines ?

- dites, dites-moi qui, parce qu'à la télé ils font pas de gros plans que beaucoup ne veulent pas qu'on voudrait pourtant savoir en profiter

- en tous cas, je peux vous dire que c'est pas Danielle Darrieux ni Michèle Morgan ni la Françoise Arnoul elles en ont pas besoin malgré leur âge avancé mais y en a je vous dis pas à cause du secret professionnel et des conséquences avec procès et tout le tremblement dans les magazines que vous lisez

- et vot' toubib il vous a pas proposé le laser

- nan, il l'utilise seulement pour des lésions graves mais je suis pas touchée à ce point là sinon gare aux séquelles et aux troubles du compartiment

- et vous vous sentez comment, ça tire un peu, non ? ya des actrices qui peuvent plus sourire ou alors tout craque et le botox se barre, donc elles jouent dans les drames graves genre mélo

- au début, j'ai tiqué et paniqué un peu j'y allais doucement, devant la tronche à Marcel j'ai failli éclater de rire, je m'y suis reprise en trois fois quand il m'a dit on te dirait comme Greta Garbo dans Nana Karenine

- ben, je croyais qu'elle était morte

- ya longtemps mais on repasse toujours ses films en allemand au ciné-club sous-titré sur les chaînes pas du public

- mais elle était pas botoxisée tout de même

- à l'époque, on appelait ça du collagène pour retenir les tissus du conjonctif ou bien on faisait comme Mistinguett avec le sirop de corps d'homme de ses amants en application à ce qu'il paraît mais c'est peut-être légendaire sans parler de la silicorne vallée pour les nibards en déroute que j'en ai pas encore besoin, les miens sont pas encore nichons

- je vois pas mon mari se branler la zigounette pour me maquiller, remarquez, il regarde assez les pornos sur internet comme ça, y aurait de quoi assurer en quantité, faut le retenir, gare à l'addition qu'on appelle comme ça maint'nant

- le mien il a mis du temps à s'en apercevoir mais maintenant il est content d'avoir retrouvé une jeunette du moins pour la bobine car j'ai pas osé le botox tout partout  à cause des ronds et des rondeurs parce que je vous dis pas le prix

- avec l'allongement de la vie et le développement des rides et des sillons qui va avec, y en a des esthéticiens qui vont pas chômer

- et ce sera peut-être remboursé un jour par la sécurité sociale ou déclaré d'utilité publique car bon pour le moral en berme

- en attendant nos bonshommes iront pas voir ailleurs, le mien est tout émoustillé et distribue des photos de moi partout si bien que maintenant je me fais draguer même par des jeunots oh Brigitte qu'ils m'appellent

- vous aller me donner l'adresse de vot' gars là, parce que je sens que je me ferais bien botoxiser moi aussi

- vous irez de ma part, j'aurais peut-être une ristourne ou alors des bons de réduction pour des séances gratuites... pour dans dix ans.


©  Jacques Chesnel (conversations)









12:59 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

16/04/2010

RÉVEIL ET COCCINELLE

J'ai l'impression qu'on me chatouille alors qu'il n'y a que moi dans ce lit, donc c'est moi qui me chatouille ou bien... j'ouvre un œil, puis les deux, je regarde le cadran du radio-réveil, c'est flou, j'écarquille et les chiffres bleus me disent il est cinq heures ah! Paris s'éveille toujours encore ducon et je me gratouille ce n'est pas le moment de s'énerver simplement une toute petite coccinelle rouge à pois noirs que je baptise Ophélie allez savoir pourquoi et qui rampe sur mon bras celui que je préfère généralement, la bestiole fait du slalom ou batifoldingue ça m'agace alors je me lève doucement le bras tendu j'ouvre la fenêtre de l'autre main et hop malgré quelques contorsions incompréhensibles et une poussette mini elle s'envole  se retourne et me dit merci ce qui est la moindre des choses à cette heure-ci quand même ouf.

Je me recouche, baille, rote, pète, rotepète ou pèterote au choix en même temps avec un soupir de soulagement comme tous les matins sauf que d'habitude c'est à sept heures et qu'aujourd'hui je ne bosse pas alors je me demande si hier soir j'ai éteint le lave-vaiselle et réglé le chauffage car j'ai froid je ne vais tout de même pas me lever vraiment maintenant je n'en veux pas vraiment à Ophélie ma petite cocci envolée partie se faire bouffer par un connard d'oiseau quelle idée bon j'aurais peut-être pas dû mais je ne sais pas élever ce genre de coléoptère à élytres tiens qu'est-ce que ça becquette une bête à bondieu comme celle-là hein le frigo est vide sauf les bières et encore avec ce qu'on a picolé hier soir avec Gégé et les plantes vertes font la gueule parce que j'ai oublié de les arroser depuis je sais plus quand et y en a de toxiques pour ce genre de bébêtes, je me retourne, gratte les zones de turbulence qu'Ophélie a laissé sur mon bras peut-être avec des déjections qu'est-ce que ça chie ces bestiaux-là j'ai rien retenu des leçons de choses à l'école et c'est si loin j'enlève les petites crottes invisibles le reste partira bien sous la douche, sur le côté gauche je ne vois plus le réveil et j'ai une contraction dans le pied que je sais pas lequel va falloir que je tire ma crampe c'est pas tous le jours maintenant que ma meuf s'est évaporée chez ses vieux pour un bon mois et je ne m'en plains pas dans le genre collante en collant on fait pas mieux n'empêche que certains matins le biniou taquin tient de la place dans le pageot et que ça me démange faut faire avec et malgré ça je ne suis toujours pas sourd hé avec Ophélie point de problème de ce genre j'aurais p'têtre pas dû la laisser sortir et d'ailleurs comment était-elle rentrée j'ouvre jamais les fenêtres que ça commence à secouer sec dans l'appartos on peut pas tout faire en même temps je me retiens de pisser malgré les signes extérieurs de rissette et que ma crampette de gauche s'est définitivement barrée j'essaie de ne pas penser à rien ce qui est dur pour un intello comme m'appellent les gars de la bande pasque je lis les journaux enfin un seul hormis Paris-Truffe mais pour eux c'est beaucoup on dirait qu'on cogne à la fenêtre c'est peut-être Ophélie qui veut rentrer à moins que ce ne soit la tempête annoncée hier soir à la télé et comment s'en sortent les coccinelles avec le dérèglement climatique songe-je dans mon quart de somnolence va falloir demander à ce gros patapouf de pseudo sciento à l'allure pas allègre qu'a réponse à tout c'est comme pour les autres moustiques du temps de Mao-sait-tout que les oiseaux avaient plus rien à se mettre sous la dent ça leur faisait une belle jambe il doit bien être six heures maint'nant demi-tour droite merde bordel que 05:35 et y en a qui trouve les cons que le temps passe trop vite cette fois c'est bien Ophélie qui me demande de lui ouvrir de sa petit voix futée et flûtée tu peux toujours courir je me lève qu'a sept heures t'attends encore un peu va faire un tour mignonne va voir si la rose et la tempête cogne plus fort sur les carreaux j'ai pas envie pas encore envie de me crapahuter je suis si bien je pense à rien encore que ça pue sous les draps j'ai dû péter trop fort à cause de la bière et les flatulences  je vous dis pas vrouououm que ça fait dehors et dans le pageot ça doit secouer fort pour Ophélie pauvre petite mère alors je me lève lentement j'ouvre la fenêtre avec précaution et prend comme un immense seau de flotte au jet dans la tronche splatchchch y en a partout sur le lino quand Ophélie me sussurre à l'oreille enfin quoi merde c'est pas trop tôt !.... mais si ma belle il est pas encore sept heures que je me recouche vite fait bien que maintenant je sois complètement entièrement lucidement réveillé avec toi qui recommence ton foutu parcours de vitesse sur l'autre bras celui pas préféré... encore heureux que ce soit pas un hanneton.


©  Jacques Chesnel


23:28 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

09/04/2010

LE PARI DE JEANNE -3


LE PARI DE JEANNE (suite)


3/ Héloïse

Allô allô maman c'est moi quoi ? je ne t'entends pas allôôôô t'es où c'est quoi ce bordel oh tu me rappelles je te laisse un texto je te...

Depuis quelque temps Héloïse, l'aînée des deux enfants de Jeanne, trouvait certains comportements de sa mère plus ou moins bizarres surtout depuis qu'elle avait quitté Franck son papa pour ce Louis que pour tout dire elle n'aimait pas oh non pas à cause de son passé Jeanne lui avait bien avoué tu sais je ne sais pas où on va ensemble je suis la première femme qu'il connaît je veux dire physiquement oui il est homo plus exactement il l'était avant moi mais Maman tu es sûre que comment expliques-tu comme ça du jour au lendemain oh il a vécu neuf ans avec un homme il a eu aussi d'autres aventures d'un soir Maman j'ai des copains homos à la fac Jérôme a été dragué souvent c'est un monde à part... Héloïse avait alors lu des livres sérieux, des études de spécialistes médeçins, philosophes, psychologues, sociologues, Freud, Lacan, Gide, Genet (elle n'avait pas pu terminer Notre Dames des fleurs), les ouvrages de l'apologiste Dominique Fernandez, des revues gay, vu à la télé des spectacles de cabaret, des films anciens ou récents (La mauvaise éducation de Pedro Almodovar), chez elle comme pour

beaucoup de filles de son âge cela posait tellement de questions quantité de problèmes oui elle avait aussi des copines lesbiennes certaines cavalières qui cherchaient à la coincer ou à l'entraîner à la circonvenir (le mot l'avait fait rougir) elle connaissait des couples bisexuels d'autres adeptes du triolisme on l'avait sollicité elle avait même été tentée comme ça pour voir pour ressentir puis non mais tout de même : MAMAN, ma maman à moi avec un pédé bon si elle était vraiment heureuse avec lui pourquoi pas... son frère Jérôme par contre était résolument hostile il avait voulu aller dire deux mots puis casser la gueule à cette tapette lui couper les couilles s'emportait-il ; certainement que cette histoire de curé qui avait tenté de le violer plusieurs fois dans la sacrisite quand il avait huit ans l'avait perturbé ça se comprend.


Rentrée dans sa chambe à la cité universitaire, Héloïse avala une aspirine, aspira deux bouffées de ventoline car elle sentait venir la crise d'asthme, pris une douche  s'étendit et attendit une réponse à son texto M chouette j'ai réussi mon exam bisaplus ; penser à avertir Papa ne rien dire sur Maman pour ne pas l'inquiéter lui qui s'angoisse pour elle depuis leur séparation et sa liaison avec ce Louis. Elle s'endormit soudainement ; la veille elle avait regardé le film Les désarrois de l'élève Törless à la télé, jusqu'à la fin en pensant fort à son frère.


A son réveil aussi rapide que son endormissement, Heloïse reprit son portable et appela sa mère aussitôt, sans réponse. De colère, elle faillit jeter l'appareil, se ravisa, allait-elle s'enquérir auprès de Louis ou en parler à son père, dont les relations n'étaient toujours pas au beau fixe mais plutôt à la tempête permanente depuis son histoire pourtant courte, un coup de déprime, une faiblesse momentanée, quelques jours de pure baise, avec cet Eric qui ressemblait tant à Vincent Lindon, l'acteur de cinoche que Franck trouvait nul et même archi nul.

Désemparée, elle pensa également à ce grand-père inaccessible, le RR toujours affairé/embourbé dans d'autres problèmes/conflits que les siens qu'il ignorait, une sorte d'étranger qu'on embrasse vite fait au cours des rares réunions d'une famille dispersée et qui vous gratifie l'air narquois d'un mais c'est que tu deviens jolie dis donc toi, tu dois avoir des tas de fiancés et alors cette envie de lui cracher à la gueule et toi toujours aussimoche papi, ne pas ajouter et encore plus con. Vers qui se tourner ?.

Maman, ce n'est pas le genre à ne pas répondre au phone surtout quand mon numéro s'affiche, elle répond dès la deuxième sonnerie allô allô, rien... si... coupé ; rappel : ça sonne

- allô allô Maman, c'est moi, t'es où ? dis-moi


.../...




11:11 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

06/04/2010

ET SI ON CHANTAIT...

Au commencement, allons enfants de la partie, chantons la carmagnôle, Mathide est revenue, on ira au bord de la mer,  un beau jour une belle nuit, dans mon jardin d'hiver, les lauriers sont coupés, c'est une fleur de province, t'vas voir ta gueule à la récré, que serais-je sans toi, mon légionnaire, mon amant de Saint-Jean, la ballade irlandaise, la javanaise, ça va ça vient, il est cinq heures paris s'éveille, c'est ma combine, l'homme à la moto, t'as voulu voir Vesoul, il est mort le soleil, déshabillez-moi, les dessous chics, si tu suis mon regard, j'arrive, quand vous mourrez de nos amours, volver, j'aime Paris au mois de mai, il n'y a pas d'amour heureux, quand on s'promène au bord de l'eau, si tu revenais, dès que le vent soufflera, toutes peines confondues, c'est comme ça, la fiancée du pirate, vive les on du canon, l'amour est un caprice, j'attends un navire, les voyages immobiles, le poinçonneur des lilas, mais quand c'est toi, tout ça me tourmente, j'aime les filles, je suis un homo comme ils disent, des questions me reviennent, dès que j'te vois, je m'voyais déjà, la valse à mille temps, prends-moi dans tes bras, Marinella, j'aime tes grands yeux, la femme chocolat, nuages, l'ombre au tableau, les amours cardiaques, le corps des uns sous le corps des autres, le travail c'est la santé, je n'peux pas vivre sans toi, c'était un jour de fête, il faut lever la tête, comme un p'tit coquelicot, le premier rendez-vous, le cul de Lucette, le plaisir des dieux, quelqu'un qui m'aime, chanson du pied léger, le temps ne fait rien à l'affaire, que reste-t-il de nos amours, dis-moi que tu ne pleures pas, la pluie fait des claquettes, Félicie aussi, je suis venu pour elle, la rumba du pinceau, nous sommes du hasard, le jour de la défaite, ya d'la joie, que c'est triste Venise, le cœur grenadine, la semaine prochaine, la maman des poissons, le fils de la femme poisson, sur la plage abandonnée, où sont les roses, l'amour est une étoile, on n'est pas à une bêtise près, quoi ma gueule, quand on est con on est con, je suis venu pour elle, loin de la foule, tout va très bien madame la marquise, fantaisie militaire, la bourgeoisie des sensations, la complainte des infidèles, si j'vous tutoie, je t'ai donné mon cœur, mais à force de rire son ventre devint rond, sous la blafarde, viens chez moi j'habite chez une copine, ah! si vous connaissiez ma poule, el dia que me quieras, on n'a pas tous les jours vingt ans, tout change dans la vie, le tango bleu, j'ai dansé avec l'amour, une grande claque dans la gueule, comme une plume au vent, la tactique du gendarme, le serpent qui danse, au suivant, bande de dégonflés, je m'suis fait tout p'tit, c'est l'piston, je chante, les mots s'envolent, un soir d'hiver tard, le chaland qui passe, le curé de camaret, besame mucho, au creux de mon épaule, monte là-dessus, je ne l'entendais pas, ce sacré piano, je hais les dimanches, elle avait des bagues à chaque doigt, tata Yoyo, je l'ai suivie du regard, un refrain courait dans la rue, Barbara song, mon truc en plumes, l'amour est un alcool, le coup de grâce, j'ai rien vu j'ai rien entendu, le jour où je me suis donnée, faut tout prendre à la bonne, j'm'en fous, le temps des cerises, la vie en rose, le rouge et le noir, l'amour c'est comme une cigarette, et v'lan passe-moi l'éponge, résidents de la république, les jolies colonies de vacances, avril à Paris, je préfère comprendre, le pêcheur au bord de l'eau, surgit un aigle noir, les clés du paradis, après quoi on court, le zizi, c'est si bon, à la queue leu leu, prenez mes mandarines, lève la jambe voilà qu'ça rentre, Madame rêve, aux timides anonymes, on trace ta route, si tu vas à Rio, tant que tu es loin, la fille du cannibale, sous le soleil exactement, figures imposées, quand j'serai k.o., plus rien ne me fera mal, je t'attendrai à la porte du garage, nous deux Totor, le soleil mon grand copain, tiens voilà du boudin, ma petite entreprise, quand on a que l'amour, ya pas d'printemps le long d'ma vie, l'eau à la bouche, j'vous ai apporté des bonbons, comme on fait son lit on se couche, et maintenant que vais-je faire, osez Joséphine, fais de ton mieux, chacun fait fait fait ce qui lui plaît plaît plaît, rien ne vaut la vie la vie ne vaut rein, ça pourrait changer, c'est comme vous voulez, je suis venu te dire que je m'en vais, je n'en connais pas la fin, yop là boum...

... faut rigoler... avant qu'le ciel vous tombe sur la tête.


©  Jacques Chesnel  (tous titres et/ou extraits de chansons)


00:58 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

27/03/2010

CONVERSATION 20

 

- bouououh, j'ai eu chaud ce matin

- dites vite, vous me faites peur

- j'ai piqué une de ces suées, je n'avais plus un poil ni un pli de sec ni le reste aussi

- là, j'ai carrément les jetons

- ya d'quoi, j'avais perdu mes clés

- mais moi ça m'arrive tous les jours et je panique pas pour autant

- eh ben, vous avez de la chance parce que moi je suis ordonnatrice sévère et le moindre grain de sable ça me

- ya pourtant pas de sable dans vos clés

- nan, mais les enfants et mon mari sont tellement bordéliques, tenez par exemple, au moment de partir tiens plus de clés, si c'était encore le portable avec celui qui reste allumé on appelle tuitetuitetuite on le retrouve tout de suite sous un coussin ou sous le canapé ou mais les clés

- faudrait mettre une sonnerie à vos trousseaux, comme ça...

- tiens c'est une idée à creuser

- vous voulez pas dire à approfondir plutôt

- avec ce qu'ils inventent maint'nant, j'ai même vu des bébés robots à la télé qui pleurent et font pipi qu'il faut les changer

- moi j'ai vu une ferme avec des animaux robots, avec une vraie fermière pour la traite de vrai lait

- avec des pis robots en plastic ?

- bientôt on aura pus besoin de clés, on arrive devant la porte on pense: ouverture, clic, et c'est parti on pense: fermeture, clac, pareil

- peut y avoir un hic, non ? et si on pense à aut'chose ou qu'on pense à rien comme ça m'arrive souvent

- vous attendez dehors ou dedans que ça vous revienne, on appelle ça l'intelligence artificielle

- franchement je ne vois pas ce que l'artifice vient faire là, d'autant que si quelqu'un est con comme

- heu, ça l'empêche pas de penser mais il peut se gourer et là ya pas de dépanneur pour le clic-clac

- ce qui prouve que c'est pas encore au point

- moi, à part les clés et le portable, ce qui m'inquiète aussi c'est le gaz quand on part en vacances ou la lumière dans la salle de bains

- au premier carrefour, je dis toujours à Roger, t'as pensé au gaz ?  et toi t'as éteindu la lampe du lavabo qui me fait ?

- avec l'intelligence des artifices, ça peut marcher dans un rayon fixé par l'inventeur mais pas plus d'un kilomètre à la ronde

- ouf, on est sauvés, le premier carrefour est à six cents mètres, c'est un rond-point avant régionale moquette discount

- alors là, attention, ils aiment pas les complications, ça fait tourner tous les logiciels en bourrique, ya des limites à pas franchir, c'est pas encore la panne assez universelle, ya encore du boulot, ils en sont aux prêts de miss sur des souris

- des souris ? artificielles ?

- c'est encore à l'état de laboratoire avec de vraies bestioles

- des vraies ? mais alors et les droits de l'homme ?... n'empêche, je trouve qu'on joue avec le feu et qu'on sait pas comment ça va continuer longtemps comme ça

- j'pense à mon père qu'était mécano à la SNCF et qui disait qu'on arrête pas le progrès sur les machines à vapeur d'avant-guerre... il en reviendrait pas

- surtout si il aurait oublié ses clés, son portable fermé sous le canapé,  le gaz et la lumière avant le rond-point  je vous dis pas la suite, le mien il avait une peur folles des souris

- heureusement qui sont plus là, ils repartiraient aussitôt

- vive le progrès quand même... tiens, je m'demande bien où j'ai pu fourrer mes clés que je les trouve plus que ah ben merde je

- dites, manquerait plus qu'ça.


©  Jacques Chesnel



01:39 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

22/03/2010

PROUST OU PAS

(à Jean Derval)

A chaque fois c'était pareil, inévitable, on ne pouvait pas s'en empêcher, tous les ans tous les étés au moment du café à l'ombre dans le jardin... qui allait commencer le premier lui ou moi on se regardait sourire en coin les femmes aux aguets qui va commencer bon les hommes pas question y en a marre tous les ans vos discussions à n'en plus finir c'est bon oui on a encore rien dit on se moque seulement de Raffarin tu sais le rocker à la tronche de guignol lyonnais arrête on a dit pas le physique quoi alors la pente est forte ohohoh le mec et il se prend au sérieux au fait alors tu t'y es mis les femmes alors là vraiment on vous laisse ce n'est pas possible y en vraiment assez quoi-qui on vous voit venir gros comme une montagne avec vos drôles de mines... je repose ma tasse et lui la sienne tu sais bien que je n'ai jamais pu aller plus loin que mettons dix pages au plus les femmes allaient partir on va à la plage bande de nases avec votre Marcel hé doucement ricane-t-on tu as tort il faut faire un effort ça paie il y a comme un envoûtement mais ça m'emmerde mon cher Jean-Jacques envoûtement ou pas ça m'emmerde Proust bon mais toi tu as lu Philip Roth ? non bon tu vois moi je le relis tous les trois ans comme Faulkner maintenant dans l'ordre puisque tout est publié moi aussi ducon je le relis pas dans l'ordre ça n'a pas d'importance je m'en fous je ne peux pas tu comprends JE NE PEUX PAS hé ne crie pas si fort les enfants siestent attends je vais refaire du café tu as du whisky oui du pur malt je ne sais pas attends il y a dans les jeunes filles comme un parfum j'aime pas son parfum na je reste seul avec un chaton qui fait des bonds dans la pelouse pas tondue j'ai du Jameson ça te va ce n'est pas pur malt mais bon... tu sais qu'on passe un film sur Albert Ayler ce soir à la fondation Maeght oh ! oui oui c'est dans le journal mais j'aime pas Albert Ayler on éclate de rire tous les deux ahahah elle est bonne celle-là tu me bassines avec ton Marcel par-ci Proust par-là et tu n'aimes pas l'Albert allez viens il y aura Michel et Arlette tu sais ceux de Bonneval on a trouvé quelqu'un pour garder les mômes une fille de l'est genre bimbo wooh je te dis pas je la connais je lui ai prêté A la recherche... et elle l'a pas trouvé quel con mais quel con tu fais et elle lis très bien le français elle connaît bien notre langue la tienne ah non je t'en prie pas toi Jean-Jacques je te promets si tu viens avec nous je te le jure sur moi et sur toi je le lirais jusqu'au bout ton Marcel peut-être mais moi j'aime toujours pas ton Albert...

Jean-Jacques vint avec nous. Le public trente ans après les fameuses nuits était toujours aussi partagé et les commentaires allaient bon train génial ou cinglé ou les deux. Le lendemain au rituel du café les femmes restèrent on avait promis on en parle pas tu sais tout compte fait hum Ayler il y a quelque chose de... enfin comme chez Marcel finalement non ?.

Jean-Jacques  souriait. Il  avait l'air heureux.

Moi aussi.


©  Jacques Chesnel  (jazz divagations)


01:10 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)