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22/03/2010

PROUST OU PAS

(à Jean Derval)

A chaque fois c'était pareil, inévitable, on ne pouvait pas s'en empêcher, tous les ans tous les étés au moment du café à l'ombre dans le jardin... qui allait commencer le premier lui ou moi on se regardait sourire en coin les femmes aux aguets qui va commencer bon les hommes pas question y en a marre tous les ans vos discussions à n'en plus finir c'est bon oui on a encore rien dit on se moque seulement de Raffarin tu sais le rocker à la tronche de guignol lyonnais arrête on a dit pas le physique quoi alors la pente est forte ohohoh le mec et il se prend au sérieux au fait alors tu t'y es mis les femmes alors là vraiment on vous laisse ce n'est pas possible y en vraiment assez quoi-qui on vous voit venir gros comme une montagne avec vos drôles de mines... je repose ma tasse et lui la sienne tu sais bien que je n'ai jamais pu aller plus loin que mettons dix pages au plus les femmes allaient partir on va à la plage bande de nases avec votre Marcel hé doucement ricane-t-on tu as tort il faut faire un effort ça paie il y a comme un envoûtement mais ça m'emmerde mon cher Jean-Jacques envoûtement ou pas ça m'emmerde Proust bon mais toi tu as lu Philip Roth ? non bon tu vois moi je le relis tous les trois ans comme Faulkner maintenant dans l'ordre puisque tout est publié moi aussi ducon je le relis pas dans l'ordre ça n'a pas d'importance je m'en fous je ne peux pas tu comprends JE NE PEUX PAS hé ne crie pas si fort les enfants siestent attends je vais refaire du café tu as du whisky oui du pur malt je ne sais pas attends il y a dans les jeunes filles comme un parfum j'aime pas son parfum na je reste seul avec un chaton qui fait des bonds dans la pelouse pas tondue j'ai du Jameson ça te va ce n'est pas pur malt mais bon... tu sais qu'on passe un film sur Albert Ayler ce soir à la fondation Maeght oh ! oui oui c'est dans le journal mais j'aime pas Albert Ayler on éclate de rire tous les deux ahahah elle est bonne celle-là tu me bassines avec ton Marcel par-ci Proust par-là et tu n'aimes pas l'Albert allez viens il y aura Michel et Arlette tu sais ceux de Bonneval on a trouvé quelqu'un pour garder les mômes une fille de l'est genre bimbo wooh je te dis pas je la connais je lui ai prêté A la recherche... et elle l'a pas trouvé quel con mais quel con tu fais et elle lis très bien le français elle connaît bien notre langue la tienne ah non je t'en prie pas toi Jean-Jacques je te promets si tu viens avec nous je te le jure sur moi et sur toi je le lirais jusqu'au bout ton Marcel peut-être mais moi j'aime toujours pas ton Albert...

Jean-Jacques vint avec nous. Le public trente ans après les fameuses nuits était toujours aussi partagé et les commentaires allaient bon train génial ou cinglé ou les deux. Le lendemain au rituel du café les femmes restèrent on avait promis on en parle pas tu sais tout compte fait hum Ayler il y a quelque chose de... enfin comme chez Marcel finalement non ?.

Jean-Jacques  souriait. Il  avait l'air heureux.

Moi aussi.


©  Jacques Chesnel  (jazz divagations)


01:10 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

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