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12/10/2011

CHRONIQUE CD : PING MACHINE

        

                       DES TRUCS PAREILS

                           (Neu Klang / Coadex)

 

Chacun sait que la vie sans surprise(s) serait bien monotone ; chacun sait également que le chroniqueur ne peut pas hélas tout écouter bien qu’il entende pas mal de choses et que pour revenir aux surprises elles arrivent toujours quand on s’y attend le moins. Tout ça pour dire que je n’avais jamais entendu la musique de Ping Machine si ce n’est que par les rumeurs et opinions enthousiastes qui mirent mes oreilles en éveil et en attente … et c’est ainsi que Des trucs pareils se retrouvent sur ma platine déjà frémissante.

Pour quelqu’un dont le parcours jazzstique fut marqué très tôt par les «grands formats » (Ellington/Basie/Lunceford d’abord, puis le joyeux hourvari du Gillespie BB à Pleyel en 48, les digressions de Gil Evans, le chambardement de la bande à Sun Ra et plus récemment par les turbulences bienvenues de l’ONJ de Claude Barthélémy, les pépites du Vienna Art Orchestra et de Maria Schneider), ce big band (big bang aussi) de quatorze musiciens est tout simplement fascinant, on peut même ajouter d’autres superlatifs comme flamboyant, vibrionnant, pétaradant, revigorant, irradiant…

Parce que, oui, nous voilà bien en présence d’un petit chef-d’œuvre par/pour les raisons suivantes : sophistication d’une écriture très travaillée (celle de Frédéric Maurin, compositeur et arrangeur), sens aigu d’une certaine forme de dramaturgie, de mise ne scène musicale avec un brio et une mise en place impeccable, la dualité complexité/raffinement de grande diversité dans la prise de risques au-delà des genres et modes, l’intonation permanente de l’ensemble, motifs répétitifs et fourmillements (Alors, chut…), une énergie communicative délivrée par une bande de joyeux pyromanes et propulsée à bout de baguettes impétueuses par un batteur, Rafaël Koerner d’une rare efficacité/prodigalité, et les éboulis et déboulés, emballements et répits, relâches et poursuites  (Des trucs Pareils)… ainsi que la qualité des interventions des solistes tous remarquables.

 

Cotation de l’agence de notation jazzistique Chesnel & Co : 9,5 sur 10 sur l’échelle de Richter.

Précaution : sortez couvert Des Trucs Pareils, ça décoiffe !.

 

© Jacques Chesnel

 

Fred Maurin (g, comp, arr, dir)

Bastien Ballaz (tb), Guillaume Christophe (bs,bcl),Jean-Michel Couchet (ss, as), Andrew Crocker (tp), Fabien Debellefontaine (as,cl, fl), Florent Dupuit (ts,fl, afl), Quentin Ghomari (tp, bu), Didier Havat (btb, tu), Rafaël Koerner (dm, perc), Benjamin Moussay (p, elp), Fabien Norbert (tp, bu), Raphaël Schwab (b), Julien Soro (ts, cl). Enregistrement : mars 2011

 

Cover_DesTrucsPareils_PingMachine.jpg 

02:20 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (2)

29/09/2011

CHRONIQUE CD / JEAN CHAUDRON TRIO

   

         COULEUR ORANGE & LEGENDS and something blue(s)

       

Dans les arts, comme ailleurs, il y a la mode qui ainsi que le disait Jean Cocteau est ce qui se démode ; et dans le domaine de la musique, en dehors des modes musicaux également ; quelques musiciens n’ayant pas grand-chose à exprimer s’engouffrent parfois avec culot dans d’hasardeuses et infructueuses directions, certains réussissant ainsi à faire parler d’eux quelque temps. D’autres, au contraire, plus modestes dans leur démarche, avec plus ou moins de talent et de conviction, perpétuent une certaine tradition qui, certes, ne contribue pas à l’évolution du jazz mais qui n’en demeure pas moins estimable. Les trois musiciens de ce trio en apportent la preuve évoluant entre jazz classique (Couleur orange, 2008) puis teintée de néo-bop (Legends, 2011). La plupart des thèmes sont signés du leader et contrebassiste Jean Chaudron, les autres par le pianiste Bernard Désormières et le batteur/ percussionniste Alain Bouchaux. Pas de recherches intempestives et extravagantes dans ce répertoire mais une simplicité évidente qui exclut néanmoins tout simplisme, des thèmes chantants d’une certaine sérénité qui produisent un climat d’onirisme et d’apaisement, parfois de langueur dans le premier. On note une certaine tendance plus musclée  dans l’écriture et les interprétations (le solo d’Alain Bouchaux sur Pure Malt) dans le second album avec la présence du saxophoniste et flûtiste Bobby Rangell, ce qui est confirmé par leur version du thème de Monk Well You Needn’t, vigoureuse façon de conclure.

 

Legends.gif

Les disques du Jean Chaudron trio sont en vente sur www.musicarea.fr

 

Jacques Chesnel

16:21 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)

09/09/2011

JACQUES VIDAL / FABLES OF MINGUS CHRONIQUE CD

 

Il y a des musiciens dont on parle beaucoup dans les milieux dits autorisés et d’autres, parce que trop discrets, qu’on semble ignorer ou pour lesquels on a quelque condescendance lorsqu’ils se manifestent (la critique), des musiciens qu’on n’invite pas dans les festivals (ignorance ou frilosité des organisateurs) et qu’on entend peu dans les clubs branchés ou prétendus tels, des musiciens qui ne s’aventurent pas dans le mélange des genres, ces nouveaux métissages pas toujours convaincants, des musiciens qui sans sacrifier à la commémoration obséquieuse rendent hommage aux maîtres qui les ont inspirés avec la plus grande modestie : Jacques Vidal est de ceux-là, avec son Fables of Mingus dans la même veine que le précédent opus Mingus Spirit (2007). Hommage donc, d’un musicien français, contrebassiste de talent, a l’un de ceux qui ont contribué à l’histoire de la musique afro-américaine.

Création/re-création, choix judicieux du répertoire et de ses partenaires, originalité dans les arrangements avec l’adjonction d’une voix claire et mélodieuse, celle d’Isabelle Carpentier, chanteuse et également récitante (déjà remarquée sur le précédent disque), modestie du leader qui ne cherche pas à se mettre en avant, privilégiant la notion de groupe. Restitution de l’univers d’un rebelle enraciné dans le terreau du blues grâce à la connivence entre les musiciens, la dualité rythmique impeccable  Vidal/Desandre-Navarre, les interventions vigoureusement chaleureuses des souffleurs, notamment l’apport considérable de Daniel Zimmermann au tuba, surtout au trombone et la véhémence toute mingusienne de Pierrick Pedron.

 

Anecdote : je me souviens avec émotion du concert de Mingus à Paris en octobre 1970 avec Anita O’Day huée en première partie et de l’intervention du contrebassiste contre la bêtise d’un certain public… parce qu’elle était blanche ( !).

Dans l’assistance, je ne devais pas être très loin d’un certain Jacques Vidal.

 

© Jacques Chesnel

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Personnel : Jacques Vidal (contrebasse), Isabelle Carpentier (voix), Pierrick Pedron (saxophone alto), Daniel Zimmermann (trombone, tuba), Xavier Desandre-Navarre (percussions)

 

Répertoire : 1/ La peur du noir. 2/ Les fables de Faubus. 3/ Nostalgia in Times Square. 4/ Pithecanthropus Erectus. 5/ Duke Ellington’s sound of love. 6/ Moanin’. 7/ Orange was the colour of her dress then silk blue. 8. Fables of Mingus. 9/ Boogie stop shuffle. 10/ What Love. 11/ Jelly Roll. 12/ Portrait (sur Willow weep for me)

 

Cristal Records  cr182 / Harmonia Mundi

 Vidal:Mingus.jpg

 

 

 

 

 

 

J. Vidal.jpg

10:22 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)

11/07/2011

CHRONIQUE DISQUES : KURT ELLING / JOHN SCOFIELD

 

              L’UN CHANTE, L’AUTRE AUSSI

 

     KURT ELLING / JOHN SCOFIELD

 

Depuis le début de ce siècle, les chanteuses sont de plus en plus nombreuses, quelques-unes pour le meilleur, d’autres… En ce qui concerne les chanteurs, à part Bobby McFerrin génial vocaliste, ceux-ci sont plus rares.

 

The Gate.jpgSe détache singulièrement, et ce depuis ses débuts il y a plus de quinze ans : KURT ELLING, né en 1967, dont le dernier disque The Gate (Concord Jazz), son dixième, est une pure merveille, un en-chant-ement  de bout en bout de ses neuf titres, suivant le même principe : adjonction de textes sur reprises et adaptation de standards, soit de jazz (une déchirante version de Blue In Green) ou de pop (les Beatles avec Norwegian Wood et Joe Jackson Steppin’ Out), de funk (Earth Wind and Fire, le décalé After The Love Has Gone)  et même du rock progressif avec le Matte Kudasai de King Crimson, notamment ; le tout avec la complicité de son pianiste habituel Laurence Hobgood, de Bob Mintzer, du guitariste John McLean et de John Patitucci à leur top. Un des meilleurs disques de ce chanteur à la voix de baryton médium sensuelle sans excès, diction parfaite, se plaçant à l’opposé du crooner classique, dont le travail sur le son est une de ces nombreuses qualités (sens du swing, émotion en filigrane).

 

A Moment'S Peace.jpgS’il ne chante pas avec sa voix, JOHN SCOFIELD n’en chante (et enchante) pas moins avec sa guitare dans A Moment’s Peace (Emarcy). Calme, élégance et modestie, luxe et volupté dans ces 12 titres (5 compositions personnelles plus standards) en compagnie de musiciens actuels du plus haut niveau : Larry Goldings (piano et orgue), Scott Colley (contrebasse) et Brian Blade (batterie). De ses nombreux opus, celui-ci est le plus serein avec cette absence de virtuosité gratuite qui est la marque des plus grands créateurs. On craquera plus particulièrement pour son interprétation de You Don’t Know What Love Is, point culminant de ces moments de paix débordant de sensualité et de feeling, en un seul mot : la sublimation du chant par un guitariste hors normes.

 

 

 

 

©  Jacques Chesnel

22:11 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0)

16/06/2011

CHRONIQUE CD EDWIN BERG (trio) / VOL. II

 

EDWIN BERG (trio) / VOL. II

Edwin Berg (piano), Eric Surmenian (contrebasse), Fred Jeanne (batterie)

                                                            

Aujourd’hui, on ne compte plus les trios piano-contrebasse-batterie ; il y en a tellement, voire même pléthore ; par contre parmi ceux qui comptent vraiment, celui-là se trouve en compagnie des plus talentueux ainsi que le précédent Perpetuum le laissait entendre déjà. La volonté du trio est clairement proclamée : une musique d’aujourd’hui tournant résolument le dos à ce néoavant-gardisme simpliste que remet en cause Guy Lelong (dans son article paru dans Libération du 2 juin) au sujet de la musique contemporaine. Il s’agit bien ici de jazz, acoustique (résolument jazz dans sa réflexion/ conception/exécution) dont ces musiciens parcourent, développent et assument l’histoire sans avoir recours aux débordements que parfois la mode ou le besoin d’épater entraînent. Il ne s’agit nullement d’une position réactionnaire mais bien d’une continuité dans ce qu’il faut bien appeler la recherche de la beauté suivant des canons précis (notamment la qualité de ce qui suscite un plaisir esthétique, n’ayons pas peur des mots, de ces mots-là conjoints), ce qui n’exclut pas l’esprit d’aventure(s) et la prise des risque(s) pour atteindre l’art de tous les possibles tout en demeurant investi dans la sphère jazzistique.

 

Ce nouvel opus confirme donc le talent de ce trio à/au travers des onze titres dont trois du leader, trois d’Eric Surmenian et les Poussières d’ange de Fred Jeanne, tout cela en compagnie d’arachnéennes et radieuses versions de deux standards dits  incontournables sublimés par Bill Evans (The way you look tonight et Who Can I Turn To ?), une interprétation de Con Alma, jouée avec « âme », débarrassée de son côté parfois trop tintamarresque ou inutilement fanfaronne, ainsi qu’une émouvante chanson qu’interpréta Serge Reggiani Ma Dernière Volonté.

 

EdwinBerg.jpg

Je réitère mes propos sur l’exquisité de ce vrai trio aux antipodes des inconsistantes attitudes billevansiennes, jarrettiennes et autres « braderies »  pianistiques et affirme sans barguigner que nous sommes en présence là de quelques instants de de poésie à écouter sans tarder.

(Axolotl Jazz records / Bee Jazz)

 

Jacques Chesnel

Photo ©Jean-Claude FRANCOLON.

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15/06/2011

COUTANCES 2011, 30ième ROLAND SOUS LES POMMIERS

 

Le jazz étant aussi une forme de sport, le tournoi de tennis de Roland Garros se déroulant dans le même temps, ce compte-rendu de trois jours choisis parmi la profusion de concerts tous plus ou moins alléchants (vraiment plus), se fera donc sous le signe de Roland.

. Premier concert et premières balles neuves: ALDO ROMANO : 10.

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Carte blanche à ce musicien italien, batteur, compositeur, guitariste et chanteur (né au jazz sous la houlette du free) pour honorer et fêter ses cinquante ans d’une carrière bien remplie qu’il retraça, en abrégé étant donné son parcours, en compagnie des musiciens ayant formés ses différents groupes.

D’abord « Palatino » (groupe formé en 1988) avec Stéphane Belmondo (remplaçant Paolo Fresu) avec ce phrasé et cette sonorité au bugle qui le caractérisent aux côtés d’un Glenn Ferris au trombone jubilatoire, manifestant et communicant sa joie d’être là et Michel Benita au jeu toujours aussi fluide. Aldo, souriant, décontracté autant que visiblement ému drivant le tout de mains de maître (coups droits, revers slicés et nombreux aces). Deuxième set avec un Enrico Rava à la fois plus jeune et plus vieux sage que jamais, méritant parfaitement sa renommée de « Miles Davis transalpin », sonorité spécifique, lyrisme constant, la classe élégante de Baptiste Trotignon, Aldo sourit de plus en plus, le public aussi. Dernier set, balle de match : le Don Cherry Quintet. Retrouver (et retrouvé) l’esprit de la musique de ce trompettiste de légende avec lequel Aldo se produisit ; point (et foin) de nostalgie : Fabrizio Bosso déchaîné, débit haletant, phrasé serré, balles juste sur la ligne, sonorité acérée, Géraldine Laurent n’est pas en reste, volubile, hargneuse, services liftés, Henri Texier (autre vieux compagnon) assurance tous risques garantie, Aldo exulte, le public de même et trépigne en sus, comme nous. Pour le final, un bon vieux blues monkien pour/entre/avec 10 musiciens aux anges, rien de tel pour une fin de partie. Tout le monde debout, nous aussi.

 

. Deuxième concert : MICHEL PORTAL BAÏLADOR 6.

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A la balance, Portal n’a pas le sourire, on a appris son intervention chirurgicale due à de mauvais calculs (rénaux) la semaine précédente. Son sourire est revenu au début du concert, entouré des musiciens du disque, sextet international. Il jouera principalement de la clarinette basse et du soprano se retournant souvent vers Bojan Z qui fait office de directeur musical, Michel aligne les notes comme autant de balles, ça danse un peu, ça ne swingue pas beaucoup, (M.P. a-t-il d’ailleurs jamais vraiment swingué ?) Bojan se démène avec efficacité et a le set bien en mains dans les cordes, Ambrose Akinmusire étonne et détonne par ses effets alternés de blues/gospel/free, belle sonorité dans les graves, un peu claironnante dans les aigus, Lionel Loueke, trop discret est très applaudi (fort heureusement) lors de ses interventions délicatement colorées, Scott Colley et Nasheet Waits assurent avec le professionnalisme qu’on leur connaît. Le public est ravi, c’est le principal.

 

.Troisième concert : RON CARTER « Golden striker trio » : 3.

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Le grand Ron avance avec majesté sur la scène en compagnie du pianiste Mulgrew Miller, un monstre du piano et du guitariste virtuose Bobby Broom, remplaçant Pat Martino (qui doublait déjà Russel Malone initialement prévu). Et là, un des miracles qui (bien que non croyant) se produit parfois : une heure et demi de pures délices musicaux, intelligence, sensibilité, musicalité, charme, émotion à travers ces standards revisités comme ce My Funny Valentine, dans un silence de cathédrale. Plein de musique, de sons, de mélodies, de visuel aussi, sur les longues mains de Ron, ses longues phrases enchevêtrées, sa grande souplesse et cette superbe sonorité, la présence magique de Mulgrew Miller sa pesanteur (le corps) sa légèreté (musicale), les moments de guitare dans la grande tradition des années 50/60 de Bobby Broom ; guitariste connu comme étant celui de la dernière formation de Sonny Rollins. Devant une salle comble, subjuguée puis énamourée : quelque chose qui ressemblait au bonheur pour tous, intégralement.

. Cette année, il faisait beau, à Roland, à Coutances, dans tous les sens du terme pendant ces trois sets entendus/vus par Roland. Pendant les autres aussi à ce que j’ai entendu dire.

 

Texte © Jacques Chesnel                                       Photos © Patrick Audoux

20:11 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (1)