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27/04/2013

NICÉPHORE RUTABAGA, Grand Couturier

 

Lorsque Jérôme prit connaissance du nom du grand couturier par l’intermédiaire des copines de Muriel, il voulut en savoir un peu plus…

Né à Buenos-Aires, fils unique de Luis-Miguel Ortega de Castro y Rutabaga et Iciar Martinez, il eut une enfance d’abord studieuse, puis se dispersa à son adolescence lorsqu’il découvrit le cinéma, le tango, le jazz et surtout la littérature grâce à son père diplomate et ami de Julio Cortazar, Jorge-Luis Borges et d’Adolfo Bioy Casares. Il se mit à tout lire, tout écouter de Carlos Gardel au free jazz surtout Archie Shepp, tout voir de Buñuel et Welles à Godard et Bergman, ah ! Harriett Henderson. Quand sa famille s’exila à Paris, il continua sa « dissipation » comme disait Luis-Miguel sous le tendre regard d'Iciar qui se mit alors à fréquenter les défilés des collections des grands couturiers de l’époque avec une préférence pour Balenciaga, le catalan génial. C’est à ce moment que Nicéphore (prénom attribué en hommage à Niepce dont son père admirateur avait honoré la mémoire à l’ambassade de France à B-A) fut surtout littéralement emballé quand il vit à la cinémathèque le film de Jacques Becker « Falbalas » avec Raymond Rouleau et la craquante Micheline Presles, choc absolu : décision irrémédiable, il allait être créateur de mode ; à cette annonce, sa mère s’évanouit et remercia le seigneur d’avoir exaucé un vœu secret, le papa haussant les épaules il ne manquait plus que cela coño de mierda, (l’équivalent en français de bordel de merde) d’ici qu’il nous tourne inverti.

Dans une chambre de bonne, Nicéphore commença à dessiner comme un fou puis se mit à assembler tous les morceaux de tissu qu’il pouvait trouver/glaner, et les disposant/assemblant sur d’imposants croquis, il devenait comme fou de travail cependant encouragé par Iciar littéralement bluffée ; elle se mit à en parler à des amies dont l’une lui trouva un stage chez le jeune Hubert de Givenchy, une autre chez Pierre Cardin où là il sut qu’il pourrait devenir quelqu’un dans le milieu jusqu’à sa rencontre avec le basque génial Cristobal Balenciaga deux ans avant que le  Maître se retire, fatigué. Cristobal fut impressionné par les combinaisons de formes et couleurs proposées par ce Nico, il ne pouvait pas prononcer son prénom, Nico, c’est bien, Nico c’est mieux, Nico guapo Nico tonto, disait-il affectueusement tou vas être oune grande si tou continoues comme ça hombre !. Nico décide alors de créer sa propre maison, ce qui lui fut facilité par les « connaissances » influentes de ses parents ; il s’installe rue St-Honoré, recrute et au bout de deux ans le succès est foudroyant, créant des jalousies dans ce petit monde fermé. Il n’en a cure car, comme on dit, Paris est maintenant à ses pieds et il chausse du 47.

Jérôme, de plus en plus curieux, apprit que Nicéphore était un grand séducteur amateur de femmes contrairement à beaucoup de ses confrères, ses conquêtes parmi les petites mains du cousu main  et clientes huppées pépées connues du grand monde furent innombrables alors que, sur le tard, Luis-Miguel, devenu coquin, découvrait de plus en plus de charmes aux assistants qu’il trouvait si mignons, provoquant quelques petits scandales vite étouffés mais n’échappant pas aux ragots qui faillirent nuire à la réputation désormais internationale de la maison. C’est en allant récupérer le papa Luis-Miguel en compagnie de travelos brésiliens dans une boite gay mal famée que Nicéphore rencontra deux ravissantes fliquettes, les fameuses Ava et Eva dont il tomba immédiatement raide dingue et qui devinrent par la suite ses modèles préférés, des mannequins vedettes connues mondialement, devenues des copines à Jérôme entre temps, comme quoi…

Si cette histoire vous semble un peu tirée par les cheveux sur  la soupe, demandez donc à Muriel Branlon-Lagarde, rien que pour voir… ou bien allez au prochain défilé du Nico mon coco, on en parle déjà comme le grand événement de cette année, pensez à réserver vos places, il y aura du monde,  rien que pour voir... ou être vu.

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22/04/2013

AVA et EVA

 

Avec Jérôme, on n’était sûr de rien, un jour des sœurs disait-il, et jumelles en plus, une autre fois seulement des copines affirmait-il, avec ça allez savoir !, en tout cas ces deux créatures étaient uniques tout simplement, on voyait ça au premier coup d’œil et on ne s’en privait pas. Et contrairement à ce qu’on écrit d’habitude, l’une n’était pas brune et l’autre blonde (vieux cliché), elles étaient rousses toutes les deux, d’un roux flamboyant et rutilant, enfin bref elles étaient magnifiques et encore plus si possible, des physiques qu’on dit de stars genre Rita Hayworth ou Monica Vitti qui ne l’était pas mais presque, vous voyez, d’autant que leurs yeux étaient de braise bordée de velours et quelque fois l’inverse. Jérôme était fier de se trimballer avec elles en bombant le cul, pétant plus haut que son torse et roulant des mécaniques en même temps,  sans se rendre compte qu’il était ridicule mais nous on en bavait des ronds de chapeaux en faisant des serviettes à nos nœuds et quelques ronds de jambe cul par-dessus tête en surplus, ce qui est assez délicat autant que périlleux, il faut bien en convenir. Nous en étions à nous demander où Jérôme avait bien pu dégotter de telles pépites qui n’avaient pas du tout l’aire de pétasses, toujours fringuées comme des princesses mais sans ostentation, créant ainsi des tentations néanmoins ostentatoires, avec une préférence marquée pour les marques comme celles du grand couturier Nicéphore Rutabaga, élève du mythique créateur basque Cristóbal Balenciaga, alors là, on était scotchés littéralement. Toujours avidement curieux, on se questionnait sur ses rapports avec la Muriel avec qui il s’était fiancé depuis peu, car ça faisait un peu concurrence, comment allait-il se dépatouiller de tout cela ?. Pas de problème nous rassurait-il, cela se passe très bien elles ont copines comme cochonnes par les nippes de dessus et dessous, les parfums et les escarpins. Romain, le copain cinéphile pensait bien sûr à Ava Gardner et à Jeanne Moreau dans le Eva de Joseph Losey tandis que Guillaume le calotin se référait à Eve notre mère à tous disait-il en pouffant ; on fantasmait et flippait tous comme des malades bien portants. Ce qui nous intriguait le plus : les voir seulement de jour et disparaître la nuit, alors on supputait grave : des belles de nuit, des filles de bar topless, des hôtesses particulières, pourquoi pas des poules de luxe, des gourgandines à la madame Claude ?. Il a fallu que notre ami Alain le fêtard se retrouve au commissariat suite à une bagarre à la sortie d’une boîte de nuit pour que le mystère soit élucidé : il se retrouva en compagnie des demoiselles qui étaient des fliquettes : oui, les gars, bimbos le jour, fliquettes la nuit, Jérôme avait vraiment de drôles relations. Quelques-uns de la bande se mirent à rêver et à chercher comment se faire alpaguer afin de se retrouver enfin en si charmante compagnie. Essayez donc pour voir…

 ALORS, AVA ET EVA, EVA ET AVA ou AVA ou EVA ?

(lisez-le titre d’une traite, c’est marrant, allez on recommence cette fois sans la ponctuation, d’un seul souffle, c’est encore plus rigolo)

©  Jacques Chesnel

 

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15/04/2013

MES HABITS, ÇA SERT D’AUTO

                 

Jérôme savait bien qu’il risquait de s’attirer quelques foudres chez les soit-disant bien-pensants mais il ne pouvait s’empêcher de trouver ce nouveau Pape, le François, bien plus inquiétant que le précédent, le petit Benoit avec son air compassé, tout ratatiné et son sourire un peu niais. En effet, sous couvert de chamboulement apparent dans le comportement avec la foule des croyants, les positions rétrogrades sont les mêmes mais présentées avec plus d’hypocrisie. Quelques coups de pattes de velours et coups de menton volontaristes, rien sur son passé douteux pendant la dictature argentine, aucune visite par exemple aux mères et grand-mères de la place de Mai, son opposition farouche au mariage pour tous promulgué par la présidente argentine, sans parler de l’avortement ou de la contraception. Pas un mot pour désavouer les prises de position et les diatribes des évêques français, notamment celle du cardinal Barbarin (je ne peux l’appeler monseigneur, disait-il) « le mariage pour tous ouvrait la porte à la polygamie et à l’inceste » phrase franchement surréaliste dans la bouche d’un homme d’église. Et maintenant l’appel à « l’église des pauvres, pour les pauvres » slogan complètement bidon quand on sait que la charité se réduit le plus souvent à l’aumône, bonne conscience de la bourgeoisie, tenez mon brave mais surtout n’allez pas boire, hein ! (« les plaisirs de la charité ne sont que les jouissances de l’orgueil », Sade).

Mais ce qui exaspérait le plus Jérôme toujours partant pour s’emballer à la vitesse grand V, c’était toutes les cérémonies grandioses et fastueuses, ces célébrations et processions à n’en plus finir avec tous ces apparats chics (apparatchiks), cortèges en chapelet et chapelets en ribambelle avec litanies au programme, ces habits aux garnitures d’or avec ornements, passementeries, galons et liserés portés par des prélats bedonnants avec un air toujours compassé, une componction permanente, coiffés de ces ridicules chapeaux pointus turlututu appelés mitres qu’il trouvait trop en forme de suppositoire pour… habits donc, il se souvenait de cette phrase de son copain Claude, fils d’un garagiste, qui lui avait dit en sortant d’une séance de catéchisme : « moi, mon vieux, mes habits ça sert d’auto ».

©  Jacques Chesnel

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06/04/2013

LE FARFOUILLEUR

 

Quand Jérôme parlait de son père avec Muriel, il était intarissable, avec tellement de sujets, d’histoires, de souvenirs réels ou rêvés. Voilà un de ces songes d’une nuit d’été particulière sans rapport avec la réalité :

 Antoine Branlon-Lagarde avait d’abord la particularité d’être né le 14 juin 1940, le jour de l’entrée dans Paris des troupes allemandes, il était fier que son premier cri soit considéré comme un signe de révolte contre cette infamie : il avait déjà décidé de sa future carrière de général dans l’infanterie pour repousser cette horde de barbares, c’’était clair et net. A ce propos, il prononçait (volontairement ou non, on ne l’a jamais su ni oser lui demander) cette expression de la façon suivante : « c’est clarinette », donc ne soyez pas surpris si cela revient assez souvent. Rien ne semblait le destiner à cette vocation urgente, rien dans la famille Branlon, qui s’était associée à la famille Lagarde depuis le milieu du XIXième siècle, ne le laissait prévoir, si ce n’est un fort sentiment patriotique exprimé si tôt, c’est clarinette. En 1963, il avait épousé Vera, la fille d’un amiral russe, Fédor Krapouchik, né le lendemain même de sa propre arrivée dans ce monde, ils étaient connus à un bal à Saint-Pétersbourg (il disait en blaguant : le saint pète et s’bourre), ils avaient eu trois enfants, deux filles et Jérôme le petit dernier, fruit d’un retour de flamme et d’un oubli de pilule contraceptive. Ils formaient un couple heureux et sans problèmes. Et la vie commune s’était déroulée sans histoire jusqu’à sa retraite en 2010 car il avait rempilé un peu. .Et c’est là que tout a basculé, c’est clarinette.

 Complètement désœuvré et assurément paumé devant l’inactivité subite et totale, il se catapulta  à corps perdu dans l’informatique qu’il avait eu l’occasion d’aborder lors de la seconde partie de son métier de militaire. Alors que Vera  se lançait de son côté et de plus en plus dans la tricoterie laineuse et cotonneuse pour les habits  destinés aux petits-enfants issus de ses deux filles (car du côté de Jérôme il semblait y avoir du retard à l’allumage pour faire sauter la capsule), Antoine se procura tout le matériel le plus avancé et le plus performant pour sa nouvelle lubie et s’y attela derechef et séquence tenante, se découvrant une passion soudaine pour les réseaux sociaux et les blogs en particulier, ça c’est clarinette. Fallait le voir dès poltron minette, penché sur son clavier l’œil dérivé sur son écran, ses menottes fébriles parcourant toutes les touches à toute blinde et poussant parfois de petits cris d’orfèvre quand il tombait sur quelque chose qui lui bottait hihihihi han. Il avait instauré une sorte de rituel grâce au marque-pages de son moteur de recherche favori en démarrant par les favoris, journaux et revues d’abord, tous et toutes sauf « Le Figaro » (il ne pardonnait pas au canard la publication relatant une supposée faute grave, une « aventure » au cours de sa carrière) et « L’express » à cause du rédac’chef  à l’écharpe rouge qu’il trouvait braillard et prétentieux, ça c’est clarinette. Et puis après, place à la farfouille directement dans le tas tout azimut et vogue la galère. Sa frénésie ne connaissait pas de bornes, il sautait allègrement de l’un  ou l’une à l’autre avec gourmandise, étonnement ou dégouts (les révisionnistes, le déviationnistes, les intégristes, les pisse-froid, les pisse-copies et autres touche-pipi, les fétichistes et les bidouilleurs, les fous du roi et autres rois des fous, les cumulards et les canulars, les p’tits branleurs et les mal baisées, les empafés du paf, quelques anciennes vedettes siliconées, les machos bidon, les sportifs mégalos), il riait des hallucinations, démonstrations, affirmations ou négations, contradictions, persécutions, il pouffait face aux délires de jeunes fous ignorants ou de vieilles mémés émoustillées ou coincées mais sûres d’elles-mêmes et de leurs prétendus savoirs, aux coups de menton de certaines ganaches qu’il reconnaissait. Il commençait tôt le matin et finissait tard le soir, était réticent et renâclant quand Vera hurlait à table, quelquefois il repartait sur sa machine avant le dessert, il n’y avait plus de ouikainde, plus de ballades, de sorties ou de voyages et loupait volontairement les réunions d’anciens militaires, le bon temps c’était maintenant et c’était clarinette. Il devenait totalement accro et même un peu dingue.

Deux fois par mois, il consultait un site porno pour se prouver qu’il pouvait encore se mettre au garde-à-vous et présenter les armes rompez, pasque avec la Vera le temps n’était plus au beau fixe question ouinette, niet, cul tourné et porte close trop souvent pour un gros démarcheur de son acabit et de son gros mandrin. Il s’amusait des commentaires farfelus ou des assertions machiavéliques, des théories les plus absconses ou carrément débiles ? Antoine convenait qu’il lui était difficile de résister à la tentation (bien qu’il ne fut pas saint, hihihi) de se promener et de farfouiller dans le labyrinthe de la toile, il avait une conscience aigüe de son péché qu’il trouvait trop mignon et restait sourd aux critiques et injonctions ou sermons de son épouse, de ses enfants, de ses amis. Il avait découvert tout un monde nouveau pour lui à son âge et rien ni personne ne pouvait l’en distraire, c’était clarinette…

Et pour vous aussi, c’est clarinette ???

©  Jacques Chesnel, clarinettiste

13:25 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (2)