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26/12/2014

DE PART ET D’AUTRE

 

                          

D’une part, 

 j’ai toujours eu envie de partir quelque part pour la plupart du temps arriver nulle part, j’en ai donc pris mon parti en regrettant de ne pas avoir la part trop belle, blague à part. Toujours dans les parages de lignes parallèles, je parvenais tant bien que mal à éviter les parachutages, à me mettre entre parenthèses parentales ou bien à parcourir par-ci par-là les paramètres du paranormal avec parcimonie tout en faisant la part du feu quelque part à défaut d’obtenir celle du lion ou du gâteau… mais comme je ne suis pas partageur, alors !

 Ceci n’est pas une parade encore moins une parabole, juste un petit paragraphe, une parcelle peu parcellisée au parfum étrange pour certains, un simple pari d’une singulière parodie de particule élémentaire pour d’autres, cela dépend des partisans, et ce en attendant quelque partouze sans parure pour parvenus le temps d’une partition de partita ou d’écouter les parulines sur un parking désert, ce qui est parfait, sans particularisme.

 

D’autre part, 

 j’ai toujours envie de rester là où j’étais, éternel rescapé en respectabilité sans ressentiment et aussi sans ressource avec l’esprit de résistance pour resserrer les boulons. En résumé, résolument réservé quant à la résilience, j’ai vu resurgir les restaurations et autres restructurations comme de vaines résurrections quand ce ne fut pas la résonance avec quelques répudiations indispensables.

Je pensais à tout cela au restaurant face à la curieuse résorption de mon plat après résection ce qui conduisit au résidu sans rétention possible. Pas de rétropédalage dans le rétroviseur, simple représentativité conduisant à la répression avant la répugnance ou réciproquement. Je n’ai pu me réprimer et perdis ainsi ma réputation et ne put la retrouver rétroactivement. C’est donc pourquoi maintenant  je tire ma révérence.

 

  Jacques Chesnel

 

 

 

 

21:42 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (1)

10/12/2014

CHEZ ELLE

 

Au début, on aimait bien aller chez elle de temps en temps. 

Comme toutes les rencontres qui découlent non pas du hasard mais sont bien des rendez-vous (merci Paul Eluard), nous n'avions rien programmé de particulier ce jour-là et nous décidâmes tiens pourquoi pas cette exposition dont tout le monde parle mais dont l'artiste nous était inconnu. Vernissage, pas trop sage, beaucoup de monde, de bruit, de champagne, d'exclamations, de manières... sauf dans un coin une dame d'un certain âge, disons plutôt d'un âge certain était assise devant une toile sans bouger depuis un certain temps.Elle se retourna soudain et nous regarda avec un sourire que Muriel mit un certain temps à trouver éclatant faute d'autre mot, alors que moi je choisis plus rapidement rayonnant ce qui est presque pareil.

- C'est fantastique, plus je m'efforce de comprendre, moins j'aime, dit-elle, alors je me suis laissée aller et je trouve cela merveilleux, je n'en reviens toujours pas, vous aimez Antoni Tàpies ? 

Voilà comment nous avons fait la connaissance d'Elvire et le début de notre amitié. Nous la reconduisîmes chez elle accrochée au bras de Jérôme jusqu'à cette petite allée toute proche dans ce quartier aux rues portant des noms de fruits, c'était allée des Myrtilles, une maison basse à la porte et aux volets de couleur bleu-violacé, le fruit préféré de René, dit-elle en ouvrant la porte, nous l 'avons achetée car le jardin en état rempli alors vous pensez. Dès l'entrée, nous fûmes surpris par la disposition des pièces, on avait l'impression qu'elles avaient été rajoutées en bout-à bout, leurs dimensions inhabituelles, bien éclairées surtout la plus spacieuse donnant sur un jardin qui nous parut immense. Ce qui nous étonna également à l'intérieur : l'ordre, tout semblait à sa place quand on découvrit la bibliothèque, la discothèque, les étagères aux bibelots et masques divers, les tableaux aux murs, je ne sais pas pourquoi, me dira plus tard Muriel, mais je m'attendais à un joyeux capharnaüm.

Elvire nous fit asseoir et dit je vais nous faire du thé quand nous entendîmes un claironnant « bonjour » venant du coin le plus sombre de la pièce, c'était un perroquet. Ah, j'ai entendu que René vous a salué, dit Elvire revenant avec un plateau. Vous savez c'est un perroquet jaco dit aussi Gris du Gabon, un beau parleur que nous avions acheté deux ans avant la mort de mon mari qui lui faisait la conversation tous les jours et je lui ai donné le même prénom que l'homme avec qui j'ai vécu pendant quarante ans de bonheur.

Au cours de l'entretien amical qui dura plus de deux heures, Muriel et Jérôme firent un portrait différent de cette élégante dame dont ils ne purent s'accorder sur l'âge, entre soixante et soixante-dix pour Jérôme, un peu plus pour Muriel qui attarda son regard sur les vêtements d'Elvire, bon chic bon genre mais pas du tout ce qu'on a l'habitude voir sur une femme incontestablement âgée, sans maquillage outrancier, elle remarqua l'abondante chevelure d'un blond-gris légèrement désordonnée, un tailleur-pantalon bien coupé, quelques bagues sur ses mains sans taches brunes, des pieds petits dans des chaussures à talons mi-hauts ; ce qui frappa le plus Jérôme était sa prestance, son maintien mais surtout la douceur d'un sourire permanent, de grands yeux comme étonnés de ce qu'elle voyait et pour couronner l'ensemble une discrète fossette à la Frances McDormand, une actrice fétiche des cinéastes et frères Coen que Muriel et Jérôme apprécient.

- Qui c'est ceux-là, dit René en remuant son plumage bruyamment pour se donner un air intéressant.

Elvire se lança alors dans l'évocation de sa vie en compagnie de ses deux René, l'époux et le perroquet. Je dois tout à mon mari que j'ai connu quand j'étais aide-bibliothécaire, il m'a fait découvrir la littérature, la peinture, le théâtre, le cinéma, nous étions devenus boulimiques, nous voulions tout connaître, tout savoir, nous laisser emporter par toutes les émotions que procurent l'art sous toutes ces formes et puis, l'âge venu, nous avons pris ce volatile immobile et bavard alors que nous ne pouvions pas avoir d'enfant, ce volatile drôle, malin, qui avait écouté avec attention tout ce que mon mari lui racontait, du plus grand sérieux aux plus mauvaises blagues qu'il répète avec délectation, ce qui me fait bien rire, il est devenu un complice indispensable, ajouta-t-elle en souriant.

- Ellllviiiire, jeute aiaiaiaiaimeueueueu, hurla René. 

Au moment de partir, elle nous demanda comme un service de revenir la voir souvent pour parler de tout et de rien., mais surtout de jazz, de John Coltrane, de peinture, de Tàpies et de l'Arte Povera, et de cinéma, de Buñuel et de David Lynch.

Sur le pas de la porte, au moment de l'embrassade, on entendit un bruissement de plume et une voix éraillée dire :

- Qui c'est ces deux-là, Elvire ?. 

Maintenant, on aime bien aller chez Elvire, dès qu'on peut, dès qu'on veut.

Chez elle et chez René.

 

Jacques Chesnel

23:46 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (1)

L'ÉCHAPPÉE BEAU

Alan ne s'était jamais échappé jusque-là, c'était donc la première fois.

Désorientés, Muriel et Jérôme évitaient de se renvoyer la balle des putain c'est pas vrai c'est pas moi moi non plus mais qu'est-ce qui s'est passé je t'avais pourtant dit de faire attention crie pas si fort il ne doit pas être loin mais depuis quand est-ce que je sais… et à six heures il n'était toujours pas revenu at home nom de Zeus de…

Ce chat, un sémillant et splendide British Shortair de trois ans, avait un pedigree long comme le bras : Alan Beau de la Tirardière de la Tour Dupin, très affectueux, amoureux éperdu de Muriel, joueur filou rusé avec Jérôme et surtout très bavard, il avait toujours des tas d'histoires à raconter ou, par exemple, à commenter les films à la télé dont il était friand plus que nous, il avait ses préférences, principalement les actrices, surtout Scarlett Johansson, intarissable. Il avait piqué une colère mémorable lorsque Jonathan Rhys Meyers la tue dans Match Point, il avait même failli griffer Jérôme méchamment dans la foulée. Par contre, bien que mâle et bien pourvu, il détestait l'acteur favori de Muriel, Matthew McConaughey et le faisait savoir quand il apparaissait sur l'écran. Son fil culte était « Le chat » avec Jean Gabin et Simone Signoret, ah si on nous avait dit un jour qu'un chat pouvait pleurer !. Il montrait parfois aussi son sens du comique en prenant des poses, poils hérissés, dos rond, pattes roides tendues, crachotements, yeux exorbités, devant la grande glace de la chambre ce qui faisait dire à Muriel qu'on avait droit au chat pitre, hihihi.

Ils partirent donc vaillamment à sa recherche chacun de leur côté, faisant des appels désespérés devant des curieux éberlués des Alan Alan... qui c'est ?, vous avez perdu votre petit garçon ?, questionner les voisins, héler les petites vieilles aux fenêtres, regarder sous les voitures dans le parking, lorgner dans les arbres, taper dans les buissons, à la fin dépasser un peu le quartier au cas où, Muriel sanglotant se souvenait de chats étant revenus après quantités de semaines et nombre de kilomètres, Jérôme rongeant son frein (?), bref, c'était la panique car on y tient à notre Alan. Peut-être que maintenant avec la pluie qui tombe en rafales comme il déteste l'eau sauf les bains que lui donne amoureusement Muriel, alors... 

Au bout de deux heures on est rentrés bredouilles, dépités, anxieux.

Pour se détendre, Jérôme raconta cette histoire quand il était gamin : cette vieille voisine qui avait un chat appelé Bijou : - elle l'appelait  de sa petit voix tremblotante Biiiijououou et au bout de quelques minutes le Bijou rappliquait à toute allure et nous les gosses on continuait à brailler Biiiiijououou.

- Au fait, dit Muriel, t'as pensé à regarder dans le garage cette boite où on met les vieux vêtements à donner, il aime bien se fourrer là-dedans de temps en temps. Muriel avait raison, on le trouva affalé sur les habits froissés, sur le flanc, comme endormi, pantelant, le souffle court et rauque, inconscient, avec près de son museau plein de petits brins d'herbe vomis… la cata totale, quoi !, hop vite chez le véto...

Le vétérinaire fut rassurant : Alan faisait une indigestion/intoxication à l'herbe à chat ; échappé il avait dû aller directement à un endroit afin d'ingurgiter cette herbette pour se purger mais il avait forcé sur la quantité avalée trop rapidement goulûment, un petit lavage d'estomac et je vais vous le rendre tout neuf, tout vaillant comme avant, nous assura le praticien, mais surveillez-le quand il y retournera car c'est un drôle de rapide votre Alan Beau de....

Nous avons vraiment eu peur...avec l'échappé Beau on peut dire que nous l'avons échappée belle !.

 

Jacques Chesnel

20:47 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

03/12/2014

CASA BLANCA

 On s'est longtemps demandé pour quelles raisons les proprios de cette belle  bâtisse (si intensément blanche) l'avait baptisée « Casa Blanca » plutôt que « Maison Blanche » tant la copie sur la vraie  et célèbre était parfaite à part, distinction et élégance suprêmes, la porte d'entrée principale peinte d'un joli bleu nuit. Elle se trouvait à l'entrée du village (ou à sa sortie vue dans l'autre sens), un bel emplacement. Curieux Muriel et Jérôme s'étaient renseignés sur ces proprios et quelle ne fut pas leur surprise en apprenant que c'était à la famille Clinton, pas celle des fameux Bill et Hilary qui se prononce Clinetonne alors qu'ici il s'agissait ici des Clinton comme ça s'écrit, un français de souche ayant travaillé en Espagne et au Maroc d'où, peut-être, le choix naturel de Casa Blanca.

Dans ce petit village endormi que nous avions découvert en allant rendre visite à notre ami Alain le solitaire, les quelques langues vivantes se déliaient quand on évoquait la « clinnetonnerie » et la superbe demeure qui allait avec, quelques doigts sur la tempe s'ajoutait au mot fada pour ne pas dire cinglé, d'autres voyaient un dangereux mégalo espion du genre soviétique, certains un trafiquant de choses pas très correctes armes ou drogues ou médocs ou putes ou tout cela, bref, comme on dit dans les chemins de fer, les commentaires allaient bon train. 

Une fois ce village traversé après un dernier regard sur cette maison si blanche, Muriel et Jérôme retrouvent leur pote Alain qui les attendait devant la porte de son gîte superbe puisque conçu par lui, architecte-conseil de renom ayant participé à de grandes et renommées réalisations dans le monde entier. Il avait décidé après avoir quitté Paris de poser ses pénates dans ce coin merveilleux si paisible. Il nous reçut en regardant ostensiblement sa montre et nous fit la gueule comme d'habitude mais c'est ce qui fait son charme disait toujours Muriel qui savait que c'était une attitude provisoire du meilleur effet, Alain était un homme absolument charmant, un véritable ami. Cette fois, il avait prévu le champagne sans attendre, ce qui signifiait qu'il avait une grande nouvelle à nous annoncer, on ne s'attendait pas du tout à ce qu'il allait nous déclarer, lui le célibataire qu'on disait toujours endurci : « je me marie », bing !. Jérôme reçut Muriel dans ses bras au début de son évanouissement  non feint.

Alain était toujours d'une beauté stupéfiante, une sort de Rock Hudson hétéro, il avait fait fondre un nombre incalculable de cœurs à partir de 16 ans jusqu'à l'infini mais avait toujours refusé de conclure par le mariage qu'il trouvait d'un autre temps révolu. Une fois la bouteille de champ' vidée, nos deux tourtereaux s'enhardirent à demander qui était l'heureuse élue : - qui ?… Léonora Clinton... la fille de ?… du proprio de la Casa Blanca ?… oui, répondit Alain avec son sourire narquois mais toujours charmeur : Elle !. En le torturant un peu, Muriel remise de son malaise, réussit à connaître le fin mot de l'idylle.

 L'histoire d'amour : Alain fit connaissance de Léonora lors d'une réception à l'ambassade de France à Casablanca, ville où il était venu pour superviser/coordonner les finitions des travaux de construction d'une salle de spectacle créée par lui et où fut projeté, lors de l'inauguration, le film chef-d'œuvre de Michael Curtiz, « Casablanca ». D'après lui, d'après elle, ce fut le coup de foudre réciproque, un des ces moments dont Alphonse Allais avait dit : « c'est comme un coup qu'on reçoit là, pan ! dans le creux de l'estomac ». Ce qui aussi fut un déclic  étonnant: la ressemblance étrange de Léonora avec Ingrid Bergman, l'héroïne du film. Alain, cependant peu féru de cinéma, se prit immédiatement pour Bogart et bien qu'il fut loin de lui ressembler physiquement usa de son charme  personnel autant que naturel, si bien que Léonora-Ingrid tomba dans le piège et dans ses bras en même temps. Ils décidèrent de se marier sur le champ ou presque, c'est-à-dire dès leur retour en France.

 

Épisode : A la fin de la visite à leur ami après un dîner au cours duquel Alain invita ses amis à la noce prochaine, Muriel un peu éméchée  lui demanda sur un ton goguenard : « tu ne vas nous dire que c'est toi aussi qui a fait les plans de cette horreur de  baraque baptisée Casa Blanca, non ? ».

 

Jacques Chesnel

21:49 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (2)