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31/05/2016

LES ANGES : SEXE, SAXE ET SAXO

 

Tous les ans, à cette période de fin de l’année et début de la suivante, Jean-François se posait et nous posait toujours la même question, celle sur le sexe des anges, question récurrente depuis son catéchisme où il était toujours bon dernier et jugé incontrôlable par le curé et les dames patronnesses car posant justement des questions dont les réponses ne lui convenaient pas, à lui, au prêtre et aux vieilles cinglées ; un peu plus tard, en sciences dites naturelles (étude du corps humain, la différence entre homme et femme) problèmes avec un prof’ peureux et complexé, puis le dessin, les arts dits beaux avec les reproductions de tableaux surtout ceux comportant des anges qu’il aimait contempler pendant des heures sans dire un seul mot, ce qui constituait une véritable performance. JF avait vu tous le tableaux consacrés à l’angélologie, notamment ceux de Fra Angelico, Giotto, Van Eyck et Roublev mais celui qui le fascinait était Trois amours dansant dans les nuages de François Boucher (1703-1770) par ailleurs auteur de Diane sortant du bain qui le laissait tout chose avec des picotements dans le bas du ventre. Il s’intéressa avec passion aux chérubins et séraphins, à la langue des anges qu’évoquait St-Paul, aux anges déchus, aux anges rebelles peints par Pieter Bruegel l’Ancien.

Il se posa des tas de questions sur leur aspect, leurs tailles de bébé de huit mois joufflus, potelés, poupards, pas d’ange maigre ni de noir ou d’autre couleur, leurs cheveux blonds et bouclés, la délicatesse de leur peau toujours immaculée, la fraîcheur de leur teint d’un rose discret, leur manque de poils sous les bras, leurs fesses dodues-charnues et, surtout leur absence de sexe, ni bosse ni creux apparants sous le voile pudique à cet endroit pour lui essentiel ; quant à leur air d’extase permanente, il s’en demandait les raisons… et ces postures un peu niaiseuses ! ; quant à Cupidon, ou plus exactement à ses représentations, il trouvait celles-ci plutôt du genre cucul-pipi-dondon dans tous les sens des termes, ce qui faisait hurler de rire Myriam tout en lui reprochant ses constantes vannes à deux balles, c’est nul, JF, c’est supernul !.

Un peu plus tard ce fut le tour des anges gardiens, après un court épisode avec Gabriel sans résultats probants. Déjà, à treize ans, il convoqua plusieurs fois son ange gardien à lui qu’il appelait Victor (prénom de son grand-père favori mort dans les tranchées à Verdun pendant une absence de son propre ange gardien parti aux toilettes ce con pendant un des plus forts bombardements, quelle idée) et deux ans plus tard y renonça définitivement devant les carences de résultats dans les moments où il en avait eu le plus besoin, notamment pour la besogne quotidienne de séduction des filles, une propension au prurit aquagénique ou aux plaques d’urticaire et de fréquentes et incontrôlables fuites urinaires aux plus mauvais moments, d’où le coït toujours interruptus… jusqu’au jour où le médeçin de famille trouva le remède que Victor n’avait même pas envisagé, c’est nul, Victor, supernul !.

De plus en plus tenaillé, tiraillé, obnubilé, tourmenté, tourneboulé par le sexe, d’abord le sien, son propre instrument de service, de ses vices et de sévices pas toujours très propre, celui des filles qu’il tentait en vain d’explorer toujours de plus en plus et, plus énigmatique, celui des anges, leur non-zizi, Jean-François s’embarquait dans une quête de plus en plus pressante dans ses recherches et préocuppations. Tout passa en revue, du sexagénaire sexologue aux sex-symbols sextuplés, du sextuor sexy aux pratiquants du sextant au fort sex-appeal… rien ne vint calmer son ardeur de recherches pointues qui se poursuivent encore. 

Aux dernière nouvelles, on vient de voir un ange passer dans le ciel avec son sexe en érection, sa porcelaine de saxe dans son sac air messe et son saxo le plus petit d’Adolphe son génial inventeur en bande doulière, voilà bien un ange d’un genre nouveau non exterminator, contrairement à celui de Luis Buñuel, ce qui va encore provoquer chez notre JF une bienfaisante sexcitation… c’est reparti… bon, alors… il recommence son énumération du sexe absent chez nos fameux blondinets… au choix : l’arbalète, le bigoudi, le boute-joie, le chibre, la coquette, le dardillon, l’épinette, le moineau, le pain-au-lait, le plantoir, le rat-sans-pattes, la ravissante, la tête chercheuse, le zigomar ou la foufoune, le berlingot, la cerise, la reluisette, le vestibule, le gardon et autres friandises (merci Colette Renard pour Les nuits d’une demoiselle)…

                … et tout ce qui s’ensuit… et tout ce qui s’enfuit.

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22/05/2016

LA MÉPRISE

 

Claude et moi sommes inséparables depuis longtemps, je crois bien que cela remonte au début de notre adolescence plutôt tapageuse, au lycée on nous appelait Castor et Pollux ou Cul et Chemise selon les affinités avec les autres élèves, on en riait. Cela avait commencé par les jeux, échecs et mots croisés, le sport avec le tennis de table et le basket, disciplines où nous nous défendions bien, un peu au-dessus de la moyenne. Puis ce fut les filles, les flirts, les confidences, les secrets, plus tard les partages consentis, aucun nuage à l’horizon de notre amitié. A tel point que nous nous sommes mariés le même jour, lui avec une ancienne fiancée, idem pour moi. Nous nous fréquentions plus ou moins régulièrement, soirées et vacances. Lors d’un voyage de nos deux épouses, seuls tous les deux, il me confia qu’au bout de quatre ans de vie commune, il avait quelquefois des aventures alors que moi j’étais toujours fidèle car profondément et désespérément amoureux, ce qui l’amusait. Nous nous recevions une fois par semaine sans compter des réceptions avec d’autres couples, ce qui arrivait de plus en plus souvent au grand dam de Patricia, mon épouse devenue un peu casanière. Lors d’une confidence, Claude m’assura que les jeunes filles se jetaient littéralement à ses pieds, qu’il ne pouvait résister et avait été obligé d’organiser ses sorties avec un planning clandestin ; il avait le démon de midi moins le quart car tout juste trentenaire et toujours aussi beau garçon genre latin lover Marcello ou blond cuivré Redford type surfeur californien, cela changeant suivant les saisons, vous voyez, résultat impressionnant ; et comme, il était trrrès intelligent, beau parleur, blagueur, alors là ! le succès assuré à tous les coups pour tous les coups.

  • Chérie, nous sommes invités chez les Margerien demain soir
  • Chic, il y aura Claude
  • Heu, oui sûrement, tu sais qu’il adore ce genre de soirée pour faire des rencontres
  • Oh, tu peux parler, c’est là qu’on s’est connus
  • Et qu’il y trouve du gibier à sa guise
  • Je t’interdis de parler comme ça, Claude est un type bien, un peu coureur certes mais très gentil
  • Tu ne vas pas me dire que maintenant tu as re…
  • Non rassure-toi, mais n’empêche, il a d’ailleurs très bon goût
  • Surtout dans le cheptel des tendres ados
  • Et dire qu’Eléonore ne s’aperçoit de rien, enfin
  • Bon, tu es prête ?
  • Presque , j’enfile un collant et j’arrive
  • Ah, tu te protèges donc
  • Mais non, idiot chéri, et contre qui, dis le moi ?
  • Attention, ya ta combinaison qui dépasse
  • Qu’il est bête, mon Dieu qu’il est bête         

Il y avait toujours beaucoup de monde et du beau aux fêtes des Margerien. Claude pensait souvent à Gatsby le Magnifique avec tout ce luxe un peu tapageur et ces invités qu’on disait mondains et profiteurs, et même les deux à la fois. Ce soir-là, anniversaire de la maîtresse de maison, on avait mis les petits plats dans les grands et les bouteilles débordaient abondamment des coupes et verres , un quintette de jazz jouait des ballades langoureuses, on entendait des petits cris, de grosses exclamations, parfois des soupirs ou des bulles de conciliabules, les messieurs rentraient leurs ventres éminents et proéminents, les dames bombaient leurs avantages plus ou moins généreusement décolletés, tout était dans l’ordre naturel des choses friquées. Nous embrassons nos intimes, saluons nos connaissances regardons le spectacle des arrivées, cherchons un visage ami, notamment celui de Claude qui…

  • Je me demande bien où il est
  • Dans un coin ou un recoin en train de draguer
  • Tu crois ?... ah ! bonjour chère amie, comment allez-vous ?
  • Penses-tu qu’il sera seul ou avec une conquête
  • Va savoir avec lui
  • Et avec sa femme alors ?
  • Il peut pousser les choses jusque-là, tu le connais bien

 Derrière une grosse dame type baleine échouée dans un fauteuil, un mobile de Calder, quelques serveurs en train de papoter en attendant un convive, quelques bimbos en pleine action de pépiement, une silhouette connue en discussion avec un jeune éphèbe d’une beauté à couper le souffle de Patricia ce qui d’ailleurs arriva quand elle découvrit en même temps que moi que les deux hommes se tenaient délicatement par la taille, qu’un sourire épanoui éclairait leurs visages… et que la silhouette reconnue mais oui était bien celle de notre ami tandis que mon épouse faillit défaillir avant que je la reprenne dans mes bras oups, que t’arrive-t-il ?

-   Va me chercher un verre, s’il te plaît, je ne me sens pas bien

- Ne t’en fais pas, il ne va pas lui rouler une pelle en public

- On ne sait jamais avec lui, tiens le voilà on dirait

 Claude nous avait aperçu avant que l’on s’éclipse et il nous fit un signe chaleureux de la main tout en arrivant vers nous avec sa nouvelle conquête en chaloupant.

  • Je ne veux pas le voir, on s’en va

Je la retins doucement et Claude fut subitement devant nous

  • Ah !, mes amis, que je suis content de vous voir, comment allez-vous, un peu pâlotte Patricia hein ?, laissez-moi vous présenter mon ami Arnaud, Patricia, Jérôme, mes chers amis dont je viens de te parler
  • Enchantés

Il a fallu ensuite se dépatouiller pour trouver une solution et sortir de cette situation, une sorte de malaise installé… quoi ? Claude devenu gay ?, dis-moi que je rêve…nous trouvâmes donc un prétexte qu’on dit toujours futile et dont je n’ai pas souvenance pour nous débiner lâchement en laissant notre Claude abasourdi, dépité, je n’ose écrire la queue entre les jambes...

 Comme il fallait s’y attendre, le lendemain soir Claude nous appela au téléphone, répondeur en fonction oblige.

  • Allo, vous êtes partis bien trop vite, amigos, je n’ai pas pu vous expliquer, je crois qu’il y a une méprise de votre part concernant Arnaud, ce n’est pas du tout ce que vous croyez, c’était juste heu une façon de pouvoir par ce biais de séduction rencontrer sa femme que je guigne depuis un certain temps et que, vous me comprenez, je ne savais pas comment faire autrement, alors oui bon, il m’a en quelque sorte servi d’appât, de go-between, c’était seulement un moyen et je crois enfin j’espère que ça va marcher, voilà, c’est tout, je voulais vous le dire parce que allo, allo, vous êtes là ? allo... et merdeu !

19:03 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

12/05/2016

REVOLVER

 

 

( à Hugo, mon fils )

 

La première fois que j'ai tenu un revolver dans la main c'était pour faire comme Richard Widmark dans Les forbans de la nuit de Jules Dassin, j'avais trouvé l'objet lourd, peu maniable et surtout froid, l'armurier avait eu l'air plus sidéré qu'étonné et moi plutôt con je le reconnais. A cette époque, je portais un trench-coat comme celui d'Albert Camus, un chapeau comme ceux de Jean-Pierre Melville, je prenais des airs à la François Périer ou à la Robert Mitchum, je lisais Dashiell Hammett, Raymond Chandler et tous les livres de la série noire de Marcel Duhamel, il ne me manquait plus que le pétard. Je l'avais bien planqué à la maison et le regardais tous les matins tous les soirs avec fascination, c'était donc ça un revolver, un Colt Detective Special d'occasion mais en parfait état de marche avec les balles prêt à tirer. Il y a avait plein de personnes à dézinguer, la liste était tellement longue que je ne savais pas par qui commencer en premier, ah! si, Pierre peut-être qui m'avait fauché Séverine mon premier amour mais néanmoins salope donc elle en deuxième place et puis...

La deuxième fois que j'ai tenu mon revolver c'était pour m'exercer au tir dans un champ sur des boites des conserves pendant qu'on était en train de me piquer ma mob que si j'avais vu le gars il aurait été ma première cible vivante pan! touché! crevé! ; j'avais détalé vite fait quand des chasseurs alertés s'étaient ramenés avec leurs flingues, j'avais pas osé tirer ils étaient trop nombreux et je n'avais plus assez de balles car les conserves avaient tout pris, le lendemain c'est un chien fou un pointer qui s'est pointé, comme il bougeait tout le temps je n'ai pas pu l'aligner, un sacré coup de pied et le clébard s'est barré en hurlant ; au cinoche, je voyais toujours tous les polars qui sortaient j'avais bien aimé Touchez pas au grisbi et Razzia sur la chnouf et j'étais tombé amoureux de Jeanne Moreau et de Magali Noël, je caressais toujours mon feu en pensant à elles et à des tas de poupées starlettes plus tard les psychiatres ont dit des tas de choses là-dessus que j'ai rien compris en parlant de substitution c'est ça non ? mais j'avais pas envie de les tuer le Ventura lui il chômait pas…

La troisième fois que j'ai tenu mon revolver le coup est parti tout seul j'ai à peine appuyé et le convoyeur est tombé tandis que Mimile gueulait j'avais dit de pas tirer bordel de merde faut qu'on s'casse maintenant connaaard que j'étais resté comme une andouille je voulais pas je voulais pas que les cognes m'ont cueilli debout près du mec à terre je voulais pas je voulais pas et que j'en ai pris pour quinze ans avec remise de peine il y avait un doute sur le tireur car on était plusieurs au braquage que je voulais pas… En sortant de tôle, j'ai acheté le même revolver parce que dans mon quartier tout le monde était armé jusqu'aux dents et même plus loin, j'allais toujours voir des polars, surtout ceux de Michael Mann, de James Gray, de Martin Scorcese, des fois je ne savais même plus où j'avais planqué l'engin c'est dire, j'étais toujours amoureux de la Moreau mais il n'y avait pas de nouveau Lino et les cinéastes français continuaient à se regarder le nombril au lieu de faire du cinéma, j'avais de nouvelles marottes, la musique baroque parfois un peu Purcell et surtout le hard rock, j'écoutais les vieux Van Halen ou les Scorpions, j'admirais AC/DC et Aerosmith, j'aimais cette pêche là, l'ambiance survoltée… quand un jour au boulot sur un chantier au moment de la pause un jeune mec m'a dit en souriant :

- alors l'ancien, toujours dans ta bulle hardeuse à mort ?... faut écouter autre chose pépère, un peu plus de délicatesse, demain j't'apporte du nouveau pour ton lecteur mp3

Dans le casque, ce fut comme un choc mais doux, quelque chose de mélodique, de chaleureux, d'inhabituel à mes oreilles habituées à la dure, je fus d'emblée emballé

- c'est qui ?

- les Beatles, un groupe d'angliches au top dans les années 60

- c'est un de leurs disque ?

- oui, REVOLVER.

 

 

12:17 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (2)