Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

20/08/2014

UN PROBABLE OU IMPROBABLE SCÉNARIO

 

Il y a des nuits comme ça.

On n'arrive pas à trouver le sommeil, on se tourne dans son lit, on se retourne, on change de position, dos ventre ou chien de fusil, rien n'y fait. Muriel regarde l'heure et Jérôme n'est toujours pas rentré, ce n'est pas la première fois mais là il est vraiment tard, 2 heures 20. Elle essaie de se concentrer sur la respiration abdominale comme le lui a conseillé Rodolphe, le grand type prof de yoga et puis elle s'endort enfin.

Il y a des nuits comme ça.

Elle rêve, ils sont partis faire de la photo depuis que Jérôme s'est entiché de son nouveau Reflex. Il veut photographier les filles en imperméable, une lubie, tiens celle-là avec son imper jaune fluo clic clic clic. En rentrant, il trouve dans la boite à lettres une photo de la fille avec son nom, Rose Patillon. Le lendemain, à la radio, on annonce le meurtre d'une jeune fille vêtue d'un imperméable jaune, on recherche un photographe dénoncé par des badauds, Jérôme est arrêté, clame son innocence mais condamné à mort et elle se réveille, trempée de sueur.

Il y a des nuits comme ça.

Et Jérôme n'est toujours pas là. Muriel se lève, s'habille et sort. Le premier endroit où aller, le bistrot ouvert toute la nuit, là où Jérôme rencontre ses potes après le boulot. Le rade est fermé. Elle a très froid maintenant, désemparée elle court sous la pluie qui commence à tomber drue. Réfugiée sous un porche, elle voit arriver une haute silhouette avec un étui sous le bras, putain quel temps de merde dit la silhouette, vous êtes Dominique Pifarély dit Muriel on vous entendu hier New Morning, on a aimé surtout Jérôme qui apprécie votre jeu au violon.

Il y a des nuits comme ça.

Ce doit être dans les cinq heures maintenant le jour s'est levé et Paris s'éveille, Pifarély regarde sa montre et dit le quart, vous attendez quelqu'un alors elle lui explique le rêve et pourquoi elle est sortie. Vous avez une cigarette ? Désolé non je ne fume pas mais peut-être que le bar-tabac est ouvert maintenant vu l'heure. Ils partent en courant sous la flotte qui redouble d'intensité comme exprès. La lumière est allumée, ils rentrent en se secouant et en riant.

Il y a des nuits comme ça.

Muriel pousse en petit cri en voyant Jérôme discuter avec un grand type qui a posé un étui sur le comptoir à côté de son caoua. Tiens Pif te voilà toi aussi dit le gars et Muriel se met à hoqueter nerveusement tu m'a fait une de ces frayeurs à cause de la fille dit-elle, tu sais Rose Patillon et son imper jaune, alors Jérôme la prend dans ses bras allons allons, oh je savais bien que c'était pas toi j'ai eu peur au procès pasque une erreur judiciaire est si vite arrivée et puis la peine de mort. Tu as loupé Rose, elle vient de partir ya pas cinq minutes, elle était pressée, son mec l'a appelée au téléphone. Les deux musiciens se regardent en souriant, bon c'est pas tout ça en fin de compte dit Jérôme. Pom pom pom le téléphone de Muriel sonne, c'est Rose.

Jérôme demande l'addition. C'est payé, assura le taulier.

Il y a des nuits comme ça… et des jours aussi.

 

Jacques Chesnel

 

00:23 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (3)

19/08/2014

SCÉNARIO IMPROBABLE

 

Il y a des jours comme ça.

Combien de fois Jérôme avait entendu ou lu cette phrase qui aujourd'hui lui revient comme un boomerang tandis qu'il se pose des tas de questions sans réponse, des questions sur tout et sur rien, surtout sur tout alors qu'il s'efforce de penser surtout à rien donc de ne pas penser, exercice difficile pour lui qui s'est toujours pris pour un grand penseur.

Il y a des jours comme ça.

Alors il rentre dans un bar pour se saouler la gueule comme il a vu dans des films américains, s'approcher du comptoir, demander un puis deux puis trois ouiskis et regarder la fille d'à côté qui fait pareil, Jérôme hoquette-t-il, Jérôme Ricard comme le pastis, Rose lui répond-elle en le saluant militairement de la main, Rose Patillon avec un t au lieu d'un p et sans ailes, ricane-t-elle, ils éclatent de rire, on a l'air malin, garçon s'il vous plaît, remettez-nous ça, merci.

Il y a des jours comme ça.

On ne voit pas le temps passer mais on entend le bruit des chaises que les garçons rangent en leur jetant des regards significatifs et que la lumière baisse et que le patron compte les billets et que Jérôme dit encore que d'après lui et que Rose approuve en se dévissant la tête bien que remarquez on est pas sûr à cent pour cent, pardon dit en garçon avec son balai à sciure, on dirait qu'ils veulent qu'on se tire dit Rose en ouvrant son sac à main et Jérôme en fermant son briquet, vous croyez.

Il a y des jours comme ça.

Dehors la nuit noire, l'éclairage public en veilleuse, il doit être tard dit Rose en fermant son sac à main à Jérôme rouvrant son briquet merde je n'ai plis de clope, je connais un rade encore ouvert dit Rose chancelante c'est tout près, vous êtes comme moi vous vous posez toujours les mêmes questions et attendez toujours les mêmes réponses non ?, pas exactement parce que je ne veux plus penser aux mêmes réponses que les questions répond Jérôme l'air soudain sentencieux, juste ciel alors là vous m'épatez parce que j'avais une réplique pareille quoique différente dans la forme si vous voyez ce que je veux dire, nan on y voit pas grand-chose ça doit être l'heure, vous ne seriez pas un peu pessimiste constata Rose, merde ces cons ont fermé la boutique je croyais qu'ils ouvraient encore tard et ensuite ils vont se plaindre que les affaires.

Il y a des jours comme ça.

J'ai un peu mal au cœur moi qui d'habitude, pareil pour moi bien que je n'ai pas d'accoutumance, au fait je ne vous ai pas demandé vous habitez loin parce que pour rentrer les taxis arrêtent de bonne heure comme ce putain de bar-tabac, nan juste à proximité, d'ailleurs il faut que je rentre Muriel doit m'attendre bien que, oh j'aurais cru qu'on allait poursuivre pleurnicha Rose parce que vous commenciez à me plaire un peu plus que les autres. On entendait des pas derrière eux sur le trottoir, une silhouette apparut, on aurait dit le grand type mais celui-ci avait un étui sous le bras et Rodolphe ne joue pas de trompette, alors vous êtes Médéric Collignon, demanda Jérôme, oui exact je cherche un taxi depuis une heure ou un bistrot d'ouvert, comme nous dit Rose.

Il y a des jours comme ça.

Ce doit être dans les cinq heures maintenant Paris s'éveille argumenta le trompettiste en relevant le col de son manteau, vous n'auriez pas une cigarette ?, Rose connaît un troquet peut-être qu'il a rouvert maintenant. Ils se dirigèrent vers l'endroit où un type ensommeillé relevait le rideau de fer justement enfin . C'est pas tout ça dit Jérôme encore une fois, faut vraiment que je rentre, pas question avant d'avoir bu un p'tit jus argua Médéric en tirant sur sa première clope. Rose sortait son téléphone qui jouait ya d'la rumba dans l'air et dit en reniflant t'inquiètes je suis là dans cinq minutes tout de suite. Médéric demanda l'addition et Jérôme redit une dernière fois c'est pas tout ça en fin de compte. On est bien d'accord là-dessus, le rassura Collignon qui avait posé son étui sur le comptoir.

Il y a des jours comme ça… et des nuits aussi.

 

Jacques Chesnel

22:54 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)