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19/08/2014

SCÉNARIO IMPROBABLE

 

Il y a des jours comme ça.

Combien de fois Jérôme avait entendu ou lu cette phrase qui aujourd'hui lui revient comme un boomerang tandis qu'il se pose des tas de questions sans réponse, des questions sur tout et sur rien, surtout sur tout alors qu'il s'efforce de penser surtout à rien donc de ne pas penser, exercice difficile pour lui qui s'est toujours pris pour un grand penseur.

Il y a des jours comme ça.

Alors il rentre dans un bar pour se saouler la gueule comme il a vu dans des films américains, s'approcher du comptoir, demander un puis deux puis trois ouiskis et regarder la fille d'à côté qui fait pareil, Jérôme hoquette-t-il, Jérôme Ricard comme le pastis, Rose lui répond-elle en le saluant militairement de la main, Rose Patillon avec un t au lieu d'un p et sans ailes, ricane-t-elle, ils éclatent de rire, on a l'air malin, garçon s'il vous plaît, remettez-nous ça, merci.

Il y a des jours comme ça.

On ne voit pas le temps passer mais on entend le bruit des chaises que les garçons rangent en leur jetant des regards significatifs et que la lumière baisse et que le patron compte les billets et que Jérôme dit encore que d'après lui et que Rose approuve en se dévissant la tête bien que remarquez on est pas sûr à cent pour cent, pardon dit en garçon avec son balai à sciure, on dirait qu'ils veulent qu'on se tire dit Rose en ouvrant son sac à main et Jérôme en fermant son briquet, vous croyez.

Il a y des jours comme ça.

Dehors la nuit noire, l'éclairage public en veilleuse, il doit être tard dit Rose en fermant son sac à main à Jérôme rouvrant son briquet merde je n'ai plis de clope, je connais un rade encore ouvert dit Rose chancelante c'est tout près, vous êtes comme moi vous vous posez toujours les mêmes questions et attendez toujours les mêmes réponses non ?, pas exactement parce que je ne veux plus penser aux mêmes réponses que les questions répond Jérôme l'air soudain sentencieux, juste ciel alors là vous m'épatez parce que j'avais une réplique pareille quoique différente dans la forme si vous voyez ce que je veux dire, nan on y voit pas grand-chose ça doit être l'heure, vous ne seriez pas un peu pessimiste constata Rose, merde ces cons ont fermé la boutique je croyais qu'ils ouvraient encore tard et ensuite ils vont se plaindre que les affaires.

Il y a des jours comme ça.

J'ai un peu mal au cœur moi qui d'habitude, pareil pour moi bien que je n'ai pas d'accoutumance, au fait je ne vous ai pas demandé vous habitez loin parce que pour rentrer les taxis arrêtent de bonne heure comme ce putain de bar-tabac, nan juste à proximité, d'ailleurs il faut que je rentre Muriel doit m'attendre bien que, oh j'aurais cru qu'on allait poursuivre pleurnicha Rose parce que vous commenciez à me plaire un peu plus que les autres. On entendait des pas derrière eux sur le trottoir, une silhouette apparut, on aurait dit le grand type mais celui-ci avait un étui sous le bras et Rodolphe ne joue pas de trompette, alors vous êtes Médéric Collignon, demanda Jérôme, oui exact je cherche un taxi depuis une heure ou un bistrot d'ouvert, comme nous dit Rose.

Il y a des jours comme ça.

Ce doit être dans les cinq heures maintenant Paris s'éveille argumenta le trompettiste en relevant le col de son manteau, vous n'auriez pas une cigarette ?, Rose connaît un troquet peut-être qu'il a rouvert maintenant. Ils se dirigèrent vers l'endroit où un type ensommeillé relevait le rideau de fer justement enfin . C'est pas tout ça dit Jérôme encore une fois, faut vraiment que je rentre, pas question avant d'avoir bu un p'tit jus argua Médéric en tirant sur sa première clope. Rose sortait son téléphone qui jouait ya d'la rumba dans l'air et dit en reniflant t'inquiètes je suis là dans cinq minutes tout de suite. Médéric demanda l'addition et Jérôme redit une dernière fois c'est pas tout ça en fin de compte. On est bien d'accord là-dessus, le rassura Collignon qui avait posé son étui sur le comptoir.

Il y a des jours comme ça… et des nuits aussi.

 

Jacques Chesnel

22:54 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

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