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16/07/2012

MARESCA (Souvenir de l’été 84)

 

Ah la Toscane ! d’un commun accord avec l’amour de ma vie il fut décidé que ce serait notre prochaine destination de voyage au cours de cet été 84. Et on se promettait de visiter Firenze, Sienna, Pisa et San Giminiano sans compter sur d’autres découvertes, ce qui fut le cas. Mais où établir notre port d’attache afin de se reposer entre chaque ville ? Comme pour Aracena et l’exposition universelle de Séville plus tard, retour au compas, la pointe sur Florence distance moins de soixante kilomètres soit une heure de trajet et hop on tombe sur MARESCA (on dirait le joli prénom de una bella ragazza) village tranquille à huit cents mètres d’altitude sur la route d’Abetone à partir de Pistoia et lieu de résidence pour florentins l’été sa tranquilité sa douceur sa gastronomie, on allait en profiter suivant un plan bien précis, une journée une ville le lendemain repos et ainsi de suite… sitôt installés et nos marques prises à l’auberge accueillis comme les seuls français parmi une quarantaine d’estivants de tous âges seuls ou en couples sans enfant.

 

Nous partions le matin tôt et rentrions pour le dîner vers sept heures ; nous avons donc visité les villes choisies plus Lucca, Assisi, Orvieto, Gubbio, jusqu’à Viterbo… les jours de repos, l’amour de ma vie  approfondissait l’étude de l’italien, moi je lisais Le bel été de Cesare Pavese et après la sieste crapuleuse (toutes nos siestes l’étaient) j’allais regarder le Tour de France à la télé.

 

La première fois je m’assois à côté d’un vieux monsieur qui ressemble comme deux gouttes d’eau à cet acteur Charpin vu aux côtés de Raimu dans les films de Pagnol, buon giorno buon giorno mon voisin s’agitant dans son fauteuil au passage de Chiappucci le champion italien moi m’agitant de même au passage de Fignon avec son maillot jaune on se regarde sourit regard encore et tchao, on se rencontre après le dîner sur la terrasse fleurie où tout le monde déambule sous les tilleuls et se salue buona sera ou buona notte et le lendemain rebelote devant la télé et le vélo Fignon Chiappucci vous êtes français je suis sarde Stefano Lupo enchanté enchanté vous parlez bien français oui moi pas italien je vous ai vu hier soir avec votre heu femme oui c’est mon épouse vous aimez les femmes jeunes moi je suis veuf depuis longtemps je viens ici depuis ma retraite d’avocat car en Sardaigne il fait trop chaud pour moi en juillet-août Chiappucci va gagner le Tour de France non Fignon est le plus fort…

 

Le soir venu je lui présente l’amour de ma vie qui lui parle en italien et lui qui répond en français et moi qui ne dis rien, ce fut le début d’une longue et fervente amitié qui dure toujours (nous sommes allés chez lui à Cagliari, il est venu en Normandie, a été étonné de tant de verts pâturages et des vaches disait-il émerveillé encore des vaches et le Mont Saint-Michel ah !) c’est lui qui nous a fait découvrir Lucca (traduction Lucques en français ?) le Duomo San Martini, la piazza Napoleone, l’église San Michele in Foro et son fronton si décoré, la tour Guinigi et son bouquet de chênes en haut de la tour, ses fortifications et ses nombreuses portes, puis nous sommes allés à Monte Catini admirable petite ville d’eau, à Castelfiorentino manger des gnocchis si délicieux, tout ce qu’on n’aurait pas vu sans cette rencontre miraculeuse… le soir après de nouveaux conciliabules sur la tintarella (lieu où l’après-midi quelques alanguis s’exposaient au soleil) avec Stefano nous avouant sa passion pour la littérature et la poésie françaises nous récitant des fables de La Fontaine ou des tirades du Cid un poème de Baudelaire une citation de Camus, dispersion soit vers le chambres, la télé ou les salons dont celui ou se réunissaient les joueurs de cartes… invités par Stefano, nous regardons les joueurs et le jeu auquel je ne comprends rien mais absolument rien l’amour de ma vie si et elle se trouve invitée à participer à la prochaine partie… qu’elle gagne haut la main vous avez de la chance lui dit-on aimablement encore une oui qu’elle gagne de nouveau vous jouez bien lui assure-t-on avec un sourire crispé encore une si vous voulez qu’elle gagne de nouveau et encore une autre… bon dit l’assistance unanime et grimaçante il doit être l’heure d’aller se coucher non ? buona notte a tutti…

Le lendemain on se retrouvait Stefano et moi devant la télé Chiappucci et Fignon qui allait gagner la grande boucle, plus tard dans la soirée personne n’invita l’amour de ma vie à jouer à une nouvelle partie de cartes… nous partions le lendemain, nous avons beaucoup aimé notre séjour dans cette auberge à Maresca cette année-là.

 

©  Jacques Chesnel  (l’amour de ma vie)

11:03 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

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