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23/01/2010

LE SAC À QUI, LE SAC À QUOI

Elle avait toujours eu le goût des sacs, depuis la petite enfance avec son premier réticule cadeau de sa Mémé ; cela ne l'avait jamais quitté, toutes formes et contenances ayant ses faveurs au fil des ans avec comme exception le porte-documents trop masculin ; mais du baise-en-ville à la sacoche, de la besace à la musette, de l'escarcelle au cabas, de l'aumônière à la gibecière, elle avait choisi en fonction de ses inclinaisons ou de ses besoins, privilégiant la qualité évitant les contrefaçons sauf une fois, évitant autant que possibles les sacs à viande, à malice, à vin, à papier, à dos, de corde et de tout mettre dans le même.


Quand Jérémie connut Magali, fille d'un professeur de français et d'une mère italienne, elle venait d'avoir vingt-huit ans et sortait d'un divorce pénible, mari brutal et retors, sans enfant et était en plus diablement jolie. A chaque rendez-vous, elle avait un nouveau sac, au vingtième quand il se décida à l'embrasser, son fourre-tout en bandoulière tomba quand il le ramassa il fut étonné du poids tout un tas de choses diverses dedans tu trimbales tellement d'objets de trucs oh non moins que d'habitude tu as besoin de tout ça oui. Jérémie croyait bien connaître les filles ; avec Magali il s'aperçut qu'il ne connaissait pas grand-chose et cela lui plut quand même. Magali avait cru bien connaître les garçons mais son mariage malheureux la laissait sans illusions sauf que Jérémie... était un très bon porteur de sac quand il était lourd et qu'il embrassait bien sans mettre la langue comme les chiens. Ce qui le surprit lors de leur premier rendez-vous dans sa garçonnière c'est qu'elle ne portait pas de sac ou plutôt une sorte de porte-monnaie à sa ceinture pour le préservatif au cas où... Ce fut si bien qu'ils décidèrent de se revoir plus souvent et de continuer cette amourette qui devenait de plus en plus sérieuse à chaque rencontre. Jérémie entra dans le jeu des sacs et se mit à lui faire des cadeaux mais où vais-je bien mettre tout ça tu es fou arrête.


Ensemble ils se découvrirent une passion pour les animaux surtout ceux dit de compagnie surtout les chiens surtout les petits chacun avec sa préférence le chihuahua pour elle et le jack russell pour lui. Comme ils n'envisageaient pas pour le moment de se mettre en ménage, leur passion s'exprimait en exclamations d'admiration ou en caresses de rencontres. Ils commencèrent à fréquenter les chenils et refuges de la SPA Magali refusant les léchouilles des chiots avec leurs langues comme celle de Jérémie qui se faisait de plus en plus insistante lors de baisers de plus en plus profonds beurk alors que pour le reste il était plus du genre lapin que canin et elle aimait bien. Ils devinrent alors imbattables sur les races et les comportements les pièges à éviter au fur et à mesure du développement de leur histoire d'amour.


Quant Jérémie ressentit les premiers chatouillis dans le côté droit du ventre il ne se doutait pas que cela se transformerait en appendicite agravée et qu'il fallait l'opérer d'urgence faute de quoi. Tout se passa bien. Magali venait tous les soirs à la clinique après le boulot avec toujours ces foutus sacs qui semblaient à la fois l'empêtrer et lui convenir cela le faisait marrer quelle manie ou addiction non ?... Le troisième jour la cicatrice tirait un peu et une infirmière lui dit c'est normal je vais vous donner un calmant qui le mit légèrement dans les vapes état où il se trouvait quand Magali arriva cette fois avec un grand sac à petites poignées qui paraissait un peu pesant ; quand elle s'assit après la bise habituelle Jérémie eut l'impression que cela bougeait dans le sac et mit cela sur le compte du médicament qui lui donnait un peu la nausée il lui demanda ce qu'elle trimballait encore. Magali se leva ouvrit la porte de la chambre regarda dans le couloir ya pas d'infirmière en vue tiens et elle ouvrit la fermeture éclair.

Une paire d'oreilles se pointa puis le museau d'un chiot jack russell auquel elle n'avait pu résister sachant que cela lui ferait plaisir et venait le montrer caché alors que tout le monde sait que les animaux sont interdits dans les hôpitaux et il se mit à aboyer en voyant Jérémie. Elle le renfourna immédiatement dans le sac qui se gondolait toujours et dit tu sais tu le retrouveras en rentrant enfin chez nous quand tu sortiras je viens de signer pour un quatre pièces alors t'es content hein ? depuis le temps que tu le désirais... ouaf répondit le sac.


©  Jacques Chesnel  (Miscellanées)

 

12:06 Publié dans Mes textes | Lien permanent | Commentaires (0)

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