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09/02/2012

Chronique CD : MISCELLANÉES JAZZISTIQUES ( 2 )

              

                                                                                                                            

AHMAD JAMAL / BLUE MOON

 

Lorsque j’écoute (souvent) les disques d’Ahmad Jamal, surtout ceux avec la rythmique idéale que constituait Israel Crosby et Vernell Fournier à la fin des années 50 et en 1961 (en live at the Pershing, au Spotlite Club, at The Alhambra de Chicago) je ne peux m’empêcher de penser à ce que qu’écrivait Laurent Goddet dans un numéro de Jazz-Hot des années 70 : Ahamad Jamal ou La Musique du Désir, cette façon unique de faire durer une sorte de suspense entre les notes et entre les phrases, la maîtrise des silences, syncopes et autres soupirs,  de nous faire languir avec délices sur la façon de finir un morceau avec une conclusion qui n’en finissait pas de finir, cette sorte de rêverie sensuelle et poétique qui enchanta Miles Davis. La magie disparut en partie lorsque ses partenaires le quittèrent ; elle n’était plus présente dans les disques qui suivirent… jusqu’à ce que Jean-François Deiber le sorte, à la fin des années 90, d’un relatif désenchantement de la part du public de jazz (le disque The Essence, sur Birdology).

Depuis quelques années, il a retrouvé l’esprit de cette époque mythique, avec de nouveaux partenaires bien choisis et c’est ainsi qu’à 81 ans, il enregistre 9 titres (standards et 2 compositions originales) qui font de ce CD un véritable joyau de musique dans laquelle on retrouve l’opposition permanente entre résolution/indécision, déferlement/retenue, la réitération lancinante et savamment ordonnée d’une phrase (l’énoncé du thème de Gypsy) avec brisures, hachures, ruptures, diversions/digressions… et la perpétuation/réinvention d’un swing infaillible.

 Ahmad Jamal, la jeunesse retrouvée ou le temps suspendu.


Ahmad Jamal (p)  AhmadJamal BlueMoon.jpg                           

Reginald Veal (b)

Herlin Riley dm)

Manolo Badrena (perc)

                                                   

(CD Jazz Village / Harmonia Mundi)

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MARIA LAURA BACCARINI

A Cole Porter Tribute

                                     

  Désolé mais je ne m’associe pas du tout au concert de  louanges dont ce disque fait l’objet, non que je critique la volonté de « faire du neuf avec du vieux » (ce, depuis la nuit des temps avec parfois d’incontestables réussites ou des bides comme ces metteurs en scène qui font jouer Molière par des comédiens en short dans des cuisines en formica !) mais parce que je considère le résultat résolument antinomique avec la délicatesse (peut-être surannée mais pas du tout clinquante) des mélodies de Cole Porter ; ou bien il fallait aller plus loin comme le fit John Coltrane avec la destruction massive d’une beauté à couper le souffle de My Favorite Things de Richard Rodgers  au Village Vanguard en 1966, fallait-il aller jusqu’à l’ironie sarcastique d’un Thelonious Monk interprétant, sans dénaturer le thème, Smoke gets in your Eyes à Paris en 1954 ou regarder du côté de Barney Kessel transformant la Carmen de Bizet en franc divertissement ?… ici (j’insiste, le talent indéniable des interprètes n’est pas remis en cause), seulement des arrangements dérangeants qui se veulent dans l’air du temps, la fameuse tendance, ah !, le flirt plus ou moins poussé avec le rock, la pop et la musique dite contemporaine, ah ! la distanciation ; si encore, il y avait eu une once d’humour et de fraîcheur ; a contrario : cette pompeuse ultra sophistication/ dramatisation de What is this thing called love…  

Un tribut ? non, un pavé dans la mare ou un coup d’épée dans l’eau, une disgrâce ou une dissipation… ou bien… je suis passé complètement à côté comme le diront certainement quelques exégètes indignés par mes propos iconoclastes… allez savoir.

 

 Maria Laura Baccarini (voc), Régis Huby (vln, arr),                           

 Roland Pinsard (cl, bcl) Olivier Benoit (elg),

 Guillaume Séguron (b, elb), Eric Echampard (dm)

  (CD Abalone Production / Musea)

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                         LAURA LITTARDI / INNER DANCE

 

Connue et appréciée comme chanteuse DE jazz, Laura Littardi (italienne installée à Paris depuis 25 ans) propose ici un autre répertoire que celui qu’elle interprète le plus souvent : celui de chansons de la mouvance pop des années 70 allant de Neil Young à Stevie Wonder, plus quatre compositions personnelles, auxquelles elle offre une saveur particulière, une sensualité flottante  sans esprit de fronde ou de dénaturation, accompagnée par (émerveillement) quatre musiciens dont on parle avec considération, Carine Bonnefoy (p), Mauro Gargano (b), Guillaume Dommartin ou Fabrice Moreau (dm) avec Francesco Bearzatti (sax & cl)  sur trois titres. Ses versions, celle scattée de Isn’t she Lovely et celle divagante du Proud Mary de John Fogerty sont tout simplement délicieuses.

(CD Great Winds / Musea)

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      TRIO LALISSE – SOLER – CHABASSE / « à René Char »

 

Le Label Durance, dont le catalogue se développe sous l’égide de l’association  Action Pour le Développement Des Médias basée à Château-Arnoux dans les Alpes de Haute-Provence, propose le premier disque de ce trio formé en 2010 et qui se produit surtout dans le sud-est de la France. Plusieurs musiciens dits locaux ont été révélés grâce au travail de pédagogue de l’animateur et poly-instrumentiste de talent qu’est Alain Soler (l’équivalent d’un Alan Dawson pour la batterie) ; ici, le jeune pianiste Sébastien Lalisse qui présente ce trio né en 2010 avec le contrebassiste Olivier Chabasse et Alain Soler cette fois à la batterie.

Dans son texte de présentation, Jean Buzelin (qu’on ne lit pas assez souvent) nous renseigne : « se mettre à l’ombre de René Char pourrait sembler paradoxal lorrsqu’on sait que le poète… étatit un homme de feu… et s’ils se sont mis à l’ombre, les musiciens, ce fut simplement pour se retrouver à l’intérieur d’une salle qio porte son nom ». Nul doute que le caractère solaire du poète a dû se répercuter sur les musiciens tant cette musique, plus particulièrement dans la première partie plus lyrique à forte dominance evansisenne (esthétique, phrasé, harmonie, respiration) en est imprégnée. Dans la deuxième partie sous le sceau de l’improvisation libre, les références monkiennes sont plus évidentes, le ton plus libre sans être free, musiciens à l’écoute pour un jeu collectif.

Arrive alors le toujours attendu Raphaël Imbert qui apporte sa flamme et son crépitement dans le morceau éponyme au soprano puis joyeusement rétro avec un Brother Can You Spare a Dime ? et son intro « vieux style modernisé » (dixit Buzelin) évoquant Omer Simeon et Roland Kirk pour une sarabande finale un peu folle.

Espérons qu’avec le distributeur orkestra ce disque connaîtra une audience élargie sur tout le territoire ; il le mérite, amplement.

 

Sébastien Lalisse (p), Olivier Chabasse (b), Alain Soler (dm)

+ Raphaël Imbert (sax, cb)

 (CD LabDur – SL 192011 / orkhestra)

 

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                     JEAN-PHILIPPE SCALI / EVIDENCE

 

Voilà un petit ensemble qui sonne un grand grâce aux talents multiples de son leader (composition, arrangements innovants, musculature harmonique étrange et ossature rythmique insolite) également soliste inspiré aux saxophones, surtout le baryton. Joyeux et ludique amalgame de réminiscences (les versions de Fables of Faubus à la fois respectueuse et débordée/bousculée, de Evidence revisitée façon arrangée/dérangée, la mise en relief de la beauté de Come Sunday jouée d’émouvante façon) et de thèmes originaux fantasques comme cet Autoportrait d’un chat sauvage. Tous ces jeunes musicien font preuve à la fois de maturité et de désir de défricher vers plus de musiques.

Un disque emballant dont l’écoute répétée procure à chaque fois encore plus de plaisir ; c’est possible et préconisé.

 

Jean-Philippe Scali (ss, as, bs, comp, arr), Julien Alour (tp, flg), Jerry Edwards (tb),

Adrien Chicot (p, elp), Simon Tailleu (b), Manu Franchi (dm) + François Théberge (ts),

Thomas Savy (tb),   Bastien Ballaz (tb),  Stephan Carracci (vib)

Eric Legnini (direction artistique)

(CD Gaya / abeille musique)

 

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              DVD : ANTOINE HERVÉ / LA LEÇON DE JAZZ

                 WAYNE SHORTER, JAZZMAN EXTRATERRESTRE

                   ANTONIO CARLOS JOBIM ET LA BOSSA NOVA

 

Dans l’esprit des leçons de musique avec Jean-François Zygel, voici le pianiste Antoine Hervé accompagné par l’excellent saxophoniste, ici au soprano, Jean-Charles Richard pour nous éclairer sur l’univers poétique du plus grand saxophoniste vivant Wayne Shorter et, en compagnie du chanteur brésilien Rolando Faria, sur tous les aspects de la bossa nova ; passionnantes démonstrations pédagogiques sur un ton clair et précis à la limite parfois d’une ironique affèterie. On pourra préférer (comme moi) la lecture du CD pour s’immerger plus profondément dans la musique sans son spectacle.

(RV Productions / Harmonia Mundi


 

16:54 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (1)

Commentaires

bonjour
suis pas vraiment un connaisseur pointu question jazz, mais je connais un peu Ahmad Jamal: j'ai plusieurs cd et je l'écoute régulièrement ("big byrd", "picture perfect", "after fajr", "live in paris 92); je l'avais vu au festival de Vienne (Isère) il y a quelques années et j'en garde encore un souvenir "ému".
Je vais assez régulièrement à New York et presqu'aussi régulièrement au "Blue Notes" où passent régulièrement de bon jazzmen; il y dans ce club une ambiance particulière où se cotoeint les amateurs comme moi et les connaisseurs..

Écrit par : paniss | 08/02/2012

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